Un temps passionné par l'échange qui se mettait en place, Binns se retint toutefois d'intervenir de nombreuses fois. Soucis du détail, correction superflue, professionnalisme en somme, le fantôme du lutter contre lui même, aussi pénible cela soit-il. Mais au fil des questions, alors même que les exposants s'en sortaient avec panache, chose qui prouvait d'ailleurs le sérieux de leur travail, le débat s'embêta de quelques provocations indésirables. Optimiste le professeur fit mine de ne pas y prêter attention, jusqu'à ce que le charme de l'exercice soit peu à peu anéanti. Du haut de son bureau, spectrale sa voix s'éleva dans la classe.

- Merci à tous, nous nous arrêterons ici pour cet exercice ma foi fort enrichissant. Il lança un regard entendu à Page, Ange, mais aussi Précieuse qui se faisait plus discrète depuis quelques instants. Gauvain en fut exempté pour une raison peut-être inexistante. Exercice qui, arrêtez moi si je me trompe, a été loin de vous déplaire à vous aussi. Le professeur se fendit de l'un de ses si particuliers sourires. Il n'est pas impossible que nous renouvelions donc l'expérience un peu plus tard dans l'année. Gardez donc vos travaux en lieux sûr, votre réflexion n'aura pas été vaine.

Toute fantaisie disparut alors du visage éthéré, Binns, entiché de l'air sérieux et grave que tout un chacun lui connaissait, poursuivit alors sur un ton plus à propos.

J'espère que plus aucuns doutes ne subsistent après cette courte séance de questions. Le temps nous presse et, je le répète, je ne reviendrai pas sur les biographies dans ce cours. Arrangez vous entre vous, documentez vous à la bibliothèque si vous êtes davantage curieux ou retrouvez moi en fin de cours si le cœur vous en dit. Je vérifierai le sérieux de vos démarches et votre attention en cours lors d'un devoir écrit, la semaine prochaine, après notre cours. De dix à onze heures, vous avez un créneau lire dont il serait dommage de nous priver.

Habile et rusé, fort d'une certaine expérience, le fantôme garda tout son calme face aux bavardages qui gagnèrent la classe. Il savait pertinemment que la nouvelle en offusquerait plus d'un, les sourires absents des visages et les autres signes de protestation muets ne trompaient d'ailleurs pas. Mais il savait aussi très bien comment calmer les esprits, ou du moins suffisamment détourner l'attention des plus virulents. D'une voix forte, quelque peu amplifiée par des nuances spectrales, il annonça alors.

Mon enthousiasme quant aux exposés vous aura bien sûr tous laisser deviner que les notes seront bonnes. McHenry, Tealsdale et Gammach, vous resterez durant la pause, nous discuterons plus en détail de vos travaux. Quelques nuisances sonores demeuraient, en ce début d'année la pilule semblait avoir du mal à passer. Sûr de lui le professeur reprit alors. Je peux dès lors vous annoncer que le soutien de vos exposés vous rapporte dix points à chacun, quant à vos principaux détracteurs, qui sont des détractrices d'ailleurs... Je pense que vingt-cinq points ne seront pas trop cher payé. Miss Dawster et Miss McLane, je compte sur vous pour être aussi passionnées lors de l'heure qu'il nous reste à occuper. Au travail !

Nous nous étions quitté la dernière fois... Je... Relisez donc vos notes et veuillez me dire où exactement je... Ma mémoire semble me jouait un de ces mauvais tours, le poids des années sans doute... Donc où ? Vous avais-je spécifié quelques autres travaux que ce soit ?

Une main distraite plantée dans sa fine chevelure blanche, l'air troublé, le professeur semblait... péniblement jouer la comédie. Sans doute l'une de ses stratégies pour rendre plus humain son cours. Charity Burbage ne s'était pas montrée avare de conseils, son élève seulement, malgré toute la bonne volonté du monde, éprouvait cependant quelques difficultés quant à leur mise en œuvre...



HRP : Un point sur les points gagnés à mi-parcours dans le topic approprié.

Quelque peu surpris par la réactivité quasi surnaturelle du dénommé Griffe McLarren, Binns parut un instant décontenancé, pour ne pas dire perdu. L'intervention du Gryffondor était d'autant plus assommante qu'elle était précipitée, il n'avait pas pris la peine d'attendre d'être interrogé pour réciter sa réponse. Le fantôme fronça les sourcils, puis...

- Et bien en voilà au moins un qui apprend ses leçons. Cuthbert gratifia la salle d'un sourire narquois. Nous vous remercions jeune homme. Autre chose ? Miss Tealsdale ?

Le professeur recueillit avec un grand intérêt les propos de la Serdaigle, une élève sérieuse et appliquée pour ce qu'il avait pu en juger. Cette dernière sema toutefois le doute dans l'esprit fatigué et aux rouages poussiéreux du fantôme. Qu'avait-il dit exactement à propos de cette biographie la...

- Je... Je vous laisse jusqu'à la semaine prochaine, à vous et votre camarade. Nous n'avons pas le temps de nous plonger corps et âme dans l'histoire de Merlin aujourd'hui, l'heure tourne et le programme ne nous attendra pas.

D'un vol paisible Binns gagna son bureau, plantée dans les airs, dominant le meuble et l'assemblée, il allait commencer le cours. Machinalement il replaça ses lunettes, il était prêt.

L'Ancien Régime couvre une période très vaste de notre histoire et force est de constater que durant de nombreux siècles après son départ les populations sorcières ainsi que l'organisation de la communauté, les habitudes aussi, n'ont pas réellement évolué. Rien ne demande d'être expressément souligné du moins... Soyez toutefois vigilants lors des autres cours que vous recevez ici, à Poudlard, il n'est pas impossible que vos professeurs citent quelques dates ou personnages importants dans l'histoire de leur discipline : Ces détails pourront faire la différence lors d'examens et élever votre copie au dessus du lot insipide et singulier de devoirs...

Bien, fin de la parenthèse, reprenons sans trop tarder. La seconde moitié du dixième siècle sera fondatrice pour la communauté, britannique j'entends. Vous savez que Poudlard a été bâti à cette époque, or un autre événement, préalable au bon fonctionnement du collège, vit le jour ce siècle là. Une réalisation qui jeta les bases politiques et administratives de notre système actuel, l'ancêtre du Ministère en quelques sortes...

L'un de vous a-t-il lu ou entendu quelque chose à ce sujet ? Connaissez vous son nom ? Les principales fonctions qu'il se proposait d'assumer à l'époque ? A moins que vous n'ayez une idée des causes qui ont précipité sa création ?

Haut perché, l'air sévère et concentré, le fantôme balaya la classe de son regard, spectral. La question posée faisait appel à la culture, mais pas seulement. Bien qu'aucune des petites têtes blondes lui faisant face ne le lui ait rappelé, il était intimement persuadé qu'il leur avait fortement conseillé de lire le chapitre introductif du livre de Bathilda Tourdesac. Une recommandation peu anodine...

Ayant l'ouïe fine et l'oreille sensible le fantôme plissa les yeux, une mimique horrifiée et éphémère ayant tout juste fui son visage. Aucune main ne pointant à l'horizon, par delà les élèves avachis sur leur bureau ou nonchalamment enfoncée dans le dossier de leurs chaises, il répondit, visiblement agacé.

- Monsieur, Miss Dawster, Monsieur. Devrai-je donc répéter à chacun de mes cours de soigner votre expression ? Le regard dur, l'air navré, il accusa tout un chacun en silence, puis reprit. L'ancêtre du Ministère est bien le Conseil des Sorciers, Barberus Bragge bien qu'ayant dirigé ce dernier pendant de nombreuses années n'en est cependant pas le premier directeur, quoi que... Les historiens ne considèrent pas tous la question sous le même angle et, lorsqu'il s'agit véritablement d'histoire, d'histoire politique même, il faut bien admettre que la distinction est fondée. Quelle est-elle ? Où peut-il y avoir ambiguïté et donc débat ? Le professeur marqua un temps d'arrêt, capter l'attention du plus grand nombre était crucial. Et bien voyez vous, tout est en réalité question de pouvoir et de juridiction. Vous savez bien qu'à l'époque, chez les moldus, même s'il pouvait exister un Roi, les communautés et les clans se partageant les îles britanniques demeuraient nombreux. Les groupes de sorciers l'étaient tout autant à leur échelle, il n'existait pas de véritable cohésion. Le premier Conseil des Sorciers naquit en 972, sous l'impulsion de Mustrum Sherup, Archimède Pumpsy et Robin Tockle. Ces trois hommes étaient les leaders respectifs de trois communautés sorcières voisines, au Sud de l'actuelle Écosse. Tout trois appartenaient naturellement à trois grandes familles sorcières très influentes et à la tête de leur communauté depuis plusieurs siècles. Or ces trois communautés étaient situées sur un seul et même territoire moldu, celui du tristement célèbre Baron Beastjaw, homme qui selon les écrits aurait triomphé d'un ours brun à mains nus, ses propres morsures s'étant alors avérées plus terribles que celle de l'animal. Vous relèverez d'ailleurs le nom que l'histoire a gardé de lui, Beastjaw. Cet homme était à proprement parler un barbare, un tyran dont les méthodes étaient sanguinaires et les réflexions très limitées, en temps comme en profondeur. C'était une brute, véritablement. Il n'était toutefois pas aussi idiot que l'on voulait bien le croire !

En effet, Beastjaw, s'il tirait tout son pouvoir de sa force physique et de la peur qu'il inspirait à ses sujets, avait compris que ses méthodes n'auraient aucune prise sur les sorciers et, après bon nombre d'expérience malheureuse intentées contre la communauté, toutes vaines, changea radicalement de stratégie vis à vis de cette population. La persécution exercée n'avait su que susciter la haine, celle des sorciers mais aussi celle des moldus, car, ne l'oubliait pas, la juste cohabitation avant le code, si elle a lieu et en temps de paix, est très souvent un échange gagnant-gagnant pour les participants.

Avisant la salle de classe et estimant le poids de son récent discours, le professeur jugea qu'il était temps d'extirper quelques uns des élèves de leur torpeur.

Qui peut me rappeler les modalités de cet échange ? Pourquoi le dit-on gagnant-gagnant ? Je ne l'ai pas précisé auparavant, mais je ne doute pas que vous l'ayez déjà deviné, qu'est-ce que j'entends par juste cohabitation ?

Une nouvelle fois son cours serait haché, la parenthèse vaste, mais si la prise de note était assidue et retravaillée, il ne pouvait y avoir de problèmes.

Le professeur Binns avait repris son flot de paroles. Rattrapant sa plume, Griffe se mit à noter tout ce qu’il pouvait, prenant à chaque phrase quelques mots-clefs de retard, se sentant vaguement comme s’il devait empêcher une baignoire se remplir avec comme seul outil une petite cuillère...

C’est à cause de ce retard qu’il ne répondit pas tout de suite à une nouvelle question du professeur :

Citation :

L'un de vous a-t-il lu ou entendu quelque chose à ce sujet ? Connaissez vous son nom ? Les principales fonctions qu'il se proposait d'assumer à l'époque ? A moins que vous n'ayez une idée des causes qui ont précipité sa création ?

La main droite de Griffe voulut se précipiter dans les airs, mais elle fut retenue par les derniers mots qu’elle devait former avant de pouvoir se catapulter vers le plafond sans lâcher la plume. Tandis que les dernières lettres se formaient à toute vitesse sur le parchemin, des noms et des dates émergeaient dans l’esprit effervescent du rouge et or. Plus que deux mots... « Barberus Bragge », se souvint-il, le Conseil des Sorciers, des dates, des anecdotes… Plus que quelques lettres...

Trop tard ! Une fille de Serpentard appelée Ange Dawster avait été plus rapide à répondre :

Citation :

- J'ai entendu parler du conseil des sorciers, m'sieur, avec "Barbe-rousse" Bragge ou quelque chose comme ça.. Je crois que le but c'était déjà de cacher la magie aux moldus et de fixer des règles pour la communauté magique..

Griffe la suspecta fortement de ne pas prendre la totalité du cours, et écouta la suite du cours de Binns, résolu à écrire encore plus vite pour pouvoir répondre sans attendre. Quelques élèves autour de lui se réveillèrent temporairement de leur morne stupeur, leur attention attirée par le bruit que faisait la plume de Griffe en grattant contre le parchemin, avant de retrouver leur état de constante somnolence. Puis elle était là ! La question suivante ! Mais Griffe avait de nouveau quelques mots de retard. Que devait-il faire ? Répondre d’abord et rattraper le retard ensuite ? Il venait de se souvenir qu’il possédait également un bras gauche, qu’il aurait fort bien put lever en continuant d’écrire le temps que Binns lui donne la parole, quand Page fut interrogée.

Zut, murmura l’élève pour lui-même, encore trop tard !

Griffe se promit, dès qu’il en aurait l’occasion, de faire des recherches sur les enchantements permettant aux plumes d’écrire par elles-mêmes...

Perplexe, lunettes perchées à un point critique au bout de son nez, le fantôme observait la salle dans le plus énigmatique des silences. Les exposés avaient eu du charme, tant et si bien que de nombreux élèves semblaient s'être laissés porter par les voix fluettes de leurs camarades : L'atmosphère était étrangement détendue, la concentration loin d'être au rendez vous. Le professeur se fit alors la remarque comme quoi, désormais, toute intervention autre que la sienne attendrait la dernière demi heure de cours pour voir le jour.

- Fort bien McHenry, l'essentiel semble compris ou appris du moins... Binns réajusta ses binocles avec application, signe qui ne trompait guère : Chaque élève allait devoir s'agripper à sa plume. Je vous rappelle les faits, trois communautés sorcières sur un seul territoire moldu, une situation fréquente à l'époque. Naturellement, parce qu'ils ont tout deux intérêt à échanger, la cohabitation entre sorciers et moldus portaient ses plus beaux fruits et ceux de manière équitable pour chaque communauté sorcière. Pour reprendre un illustre homme nous pourrions même dire que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes...

C'était sans compter sur la malice d'un esprit tel celui de Beastjaw, prêtez moi votre oreille et vous comprendrez fort bien ce que je souhaite entendre par là.

Le Baron n'avait su triompher des sorciers des sorciers par la force et parvint donc à la conclusion que cette dernière, la force, ne pouvait vaincre la magie. Selon lui, un sorcier ne pouvait être défait que par un autre sorcier, plus puissant. Son idée fut donc de diviser les trois communautés en appuyant sur leur seul et unique point qui leur était faible, vous l'aurez sans doute deviné, l'échange gagnant-gagnant. Ainsi décida-t-il de racheter aux paysans œuvrant sur ses terres l'essentiel de leurs récoltes pour les distribuer à bas frais à chaque famille lors de l'hiver prochain, annoncé par les prêtres comme des plus rigoureux. Vous remarquerez que ce ne sont pas les prévisions de sorciers dont il s'agit ici et noterez, une fois encore, la forte connivence entre le pouvoir et le divin dans nos vieilles sociétés. En réalité Beastjaw n'avait guère à l'esprit le peuple et prévoyait un rationnement de ses sujets à des fins purement commerciales, la revente à un proche cousin. Stratégie qui ne contredisait cependant pas son idée première concernant les sorciers. En s'accaparant, par la ruse ou par la force, l'ensemble des ressources de son domaine il détenait dès lors un pouvoir sur les communautés sorcières, habituées à se fournir chez leurs voisins moldus. L'hiver venu le sévère rationnement mis en place concernant les denrées alimentaires fit son office...

Naturellement les dirigeants des clans Pumpsy, Tockle et Sherup vinrent tenter de commercer avec Beastjaw hors ce dernier, ayant vendu une grande partie de la production à son parent, invoqua les risques de famine qui pesaient sur ses sujets et l'effroyable rationnement auxquels ils étaient déjà contraints. Toutefois, par malice, le seigneur proposa, par générosité comme il ne manqua pas de le dire, quelques ressources. Les vivres étaient cependant en quantité suffisante pour une seule communauté, en l'occurrence les Tockle qui étaient les plus riches en monnaie moldue...

...

Fin du cours.

HRP : Mon post était immensément confus, je le concluerai très bientôt dans ce topic ou dans un résumé du cours que j'ai mené cette année.