Il était tard, la lune brillait déjà depuis un long moment, entourée d’une myriade d’étoiles scintillantes. Un vent léger mais glacial balayait les environs.
Ambre ne parvenait pas à dormir… Ces insomnies étaient de plus en plus fréquentes, mais ce soir-là, la jeune file était parfaitement consciente de leur justification…
En effet, elle se sentait seule, dans un monde totalement différent du sien, elle semblait avait fait un bond dans le temps.
Les images de son pays, qui auraient choqué les occidentaux en voyage en Inde, mais qui lui étaient devenues habituelles, lui manquaient énormément.
Les enfants nus courant le long de la route, sous l’œil bienveillant de leur mère nullement inquiétée de la proximité du trafic, ce rapport de tendresse simple et spontanée qui existait entre les gens, les odeurs épicées flottant le long des échoppes, les touches de couleurs constituées par les sarees et les Shalwar kameez des Indiennes arpentant les rues…
Tout cela lui manquait, le lien qui la rattachait à son pays lui enserrait la poitrine, et donnait plus de sens que jamais au Bindhi rouge dessiné sur son front couleur pain d’épice.
Vaincue par ce coup de cafard des plus violents, elle avait décidé de sortir prendre l’air.
Elle avait passé sa robe de sorcier par-dessus un superbe saree noir, finement brodé. La robe, plus courte que le saree, laissait apparaître les broderies sur ses pieds.
La jeune fille avait pris le soin de natter soigneusement ses immenses cheveux noirs, et d’orner sa tresse d’une guirlande de fleurs de jasmin d’une blancheur immaculée, et elle l’avait attachée d’un ruban vert.
Elle portait des babouches noires, ornées de perles assorties, et des chaînes avec des grelots ornaient ses chevilles, et tintaient à chacun de ses pas, accompagnant les bracelets assortis à son saree, annonçant son approche.
Lorsqu’elle traversa le parc désert à cette heure de la nuit, elle ressentit un certain plaisir, environnée par ce calme paisible.
Une fois devant la porte du hall menant au parc, elle hésita, se demandant si elle n’allait pas faire perdre des points à sa maison, mais entendant des pas derrière elle, elle cessa de réfléchir, et rassembla ses forces et son courage pour pousser la porte.
La bourrasque de vent qui s’engouffra soudainement à l’intérieur manqua de la renverser comme un simple bouton de rose.
Elle se faufila alors par l’ouverture ainsi créée et dévala les marches aussi vite que le saree sous sa robe de sorcière le lui permettait.
Alors qu’un frisson dû à la fraîcheur de la nuit la parcouru, elle plongea la main dans son dos, sous sa robe de sorcière et en sortit le pan libre de son saree, qu’elle rabattit rapidement mais joliment sur sa tête.
Ses pensées s’envolèrent alors, flottant sur la brise nocturne, tandis que les pas de la jeune fille la menaient droit sur la Forêt interdite.
Quelques instants plus tard, elle réalisa alors où elle se trouvait : à l’orée de la forêt interdite.
Elle scruta alors le dédale d’arbres qui s’offrit à elle dans la pâleur de la nuit, elle savait pertinemment qu’il était dangereux pour elle de se promener seule, elle qui se trouvait dans l’incapacité de jeter des sorts à cause de son mutisme, mais elle n’en pouvait plus de lutter contre ce mal du pays qui la rongeait.
Elle savait aussi très bien qu’est ce qui l’avait conduite précisément ici, c’était son amour et sa proximité avec la nature, l’éducation très simple et spirituelle ne l’avait pas quittée, et c’était seulement lorsqu’elle était dehors, qu’elle s’apaisait.
La jeune fille avisa alors une souche sèche, face à l’entrée de la forêt interdite.
Ambre se dirigea vers cette souche, de sa démarche gracieuse, héritage des éreintantes leçons de maintient, durant lesquelles elle devait porter sur sa tête un pot de taille toujours plus imposante, pour entraîner un port de tête impeccable.
Maintes fois elle s’était retrouvée douchée, à cause d’un faux pas ou d’un déhanché pas assez marqué.
Elle s’y assit alors, et sortit une petite flûte Indienne qu’elle porta à ses lèvres.
Un son envoûtant s’échappa de sa bansuri, au rythme de la course gracieuse des doigts d’Ambre…
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Sujet: Tard le soir... (Prio Adam, libre ensuite)