On ne pourrait pas le croire, mais pourtant, la vie de Suzie-Lou Lalys était palpitante. Oui. La jeune femme avait appris à vivre avec toujours en elle la peur de se faire prendre. Dès qu’elle croisait des gens, son afflux sanguin augmentait brusquement, et redescendait que très lentement. C’était ça avoir une activité secrète. Mais bon, à présent ça ne l’était presque plus. Mais la brune restait toujours sur ses gardes. Non pas qu’elle se mentait à elle-même : elle savait très bien qu’elle était mangemorte à présent, avec pour mission de recruter deux personnes. Mais elle ne souhaitait pas le crier sur tous les toits. Oui, elle était une partisante du Lord, mais s’il arrivait quelque chose… de mal ? C’était sa crainte profonde. Même si elle était prête à risquer sa vie pour son Seigneur. Elle ne pouvait s’empêcher de penser de façon pessimiste. C’était dans ses gênes sûrement. Soit.

Nous étions donc un samedi, en septembre. Mois assez mitigé, mais relativement bon. C’était ça, le tout début de l’automne, les feuilles prennent peu à peu une légère couleur marron. Oui, Suzie aimait l’automne. Mais aujourd’hui, pas de marron sur elle. Du bleu. Un magnifique bleu marine, presque étoilé. Une longue robe traînant par terre, une cape, de couleur sombre aussi. Un chapeau haute forme. Puis enfin, son accessoire obligatoire, ses gants. Montant jusqu’aux coudes pour cacher parfaitement son terrible secret. Sa terrible activité. Qui pouvait faire peur et trembler des gens. La chose qui prouvait que oui, elle était bel et bien une mangemorte. Un frisson la parcoura. Elle était presque fière de ce fameux statut. Et elle savait que des gens crèveraient pour avoir son rôle. Mais ce n’était pas le moment de faire monter l’orgueil. Aujourd’hui, elle avait une mission, une vraie. Et il fallait qu’elle y arrive sinon tout pourrait bien vite tourner au vinaigre. Et ça, ce n’était pas prévu du tout.
Ses talons aiguilles claquaient dans la rue pleine de pavés, et de monde bien entendu. Oui, Pré-Au-Lard, un samedi en milieu d’après midi, il y avait foule. Pourtant, l’atmosphère était bien lourde. On sentait la noirceur de la vie. Les gens avaient changés. Ils étaient plus prudents, moins enthousiastes. Ca se comprenait en même temps. Pourtant, sur les lèvres légèrement rosées de la jeune femme trônait un merveilleux sourire. Elle se sentait maître de la saison, maître de ce qu’elle était. Oui, elle faisait parti des rares personnes intouchables. Et c’était une sorte de réconfort.

Mais pour savoir la véritable raison de la de sa visite dans le village, il fallait remonter à quelques jours. Cela faisait en effet plusieurs mois que l’historienne devait recruter deux personnes pour passer au grade suivant dans le cursus du bon mangemort. Or, il n’y a que une semaine, elle avait entendu une rumeur. Un jeune élève de Serpentard, étudiant donc à Poudlard, avait découvert il y a peu que son père était un mangemort, apparemment lâche, mais un mangemort tout de même. Et donc, pour Suzie, c’était le moment au jamais, vraiment. Elle se devait de rencontrer ce garçon, et le plus vite possible. Elle connaissait son nom, son prénom. Eliad Midnell. Alors, la brune n’avait pas perdu de temps. Oui, il suffisait d’un hibou, d’encre, d’une plume et un morceau de parchemin. Vous l’avez bien compris, elle avait envoyé une lettre.

Citation :

Midnell,

Rendez vous au bar des Trois Balais, samedi à dix-sept heures. Si il s’avère que tu es absent, tu es mort.
Je serais au fond du bar, tu me reconnaîtras assez vite.

S&L L.

Quelques mots griffonnés à la vite, mais d’une écriture fine et relativement belle. Normal, pour une historienne et bibliothécaire, d’écrire bien, le contraire aurait été étonnant non ? Bien sûr. Puis, Suzie s’était demandé si le garçon ne venait, que devait-elle faire ? Le tuer. Sans aucun doute. Aurait-elle pitié ? Elle n’en savait trop rien. Mais elle savait déjà que le destin du fameux Eliad Midnell était scellé à présent. Il devait corriger les terribles erreurs de son père, et ça dans dix minutes.
Oui. Seize heures cinquante. L’historienne entra aux Trois Balais. D’un geste lent elle poussa la lourde porte. Le bar était bondé, mais étrangement silencieux. Elle s’avança vers le comptoir et regarda la dame qui s’y trouvant. Un regard insistant, un joli sourire. Elle demanda deux Bièreaubeurre. Simplicité et discrétion. C’est ce qui fallait. Elle prit le deux gros verre et s’avança vers le fond du pub. Une petite table était libre. Chance et hasard. C’était donc un bon jour aujourd’hui. Elle s’assit délicatement et posa les deux bières. Son regard passant de sorcier en sorcier. Il n’y avait pas d’intrus d’après elle. Mais bon, les meilleurs espions sont ceux qu’on ne voit pas n’est-ce pas ? Elle baissa la tête et but une gorgée. Le temps passait lentement, et elle savait qu’elle n’avait qu’à attendre. Certes, elle avait l’air un peu folle, avec une bièreaubeurre apparemment destiné à un interlocuteur invisible ou pas encore présent. Elle sourit bêtement.

Depuis quelques temps, même l’air avait changé. Depuis la mort de Dumbledore, c’était comme si Poudlard avait perdu de sa superbe, il lui semblait presque, que chaque soir, le faux plafond de la grande salle n’était plus que tempête et éclairs se succédant sur la tête des élèves qui ne se sentaient plus dorénavant en sécurité. Même pour Eliad le changement avait été brutal, il ressentait une animosité, une peur certaine dans chacun des élèves, qui se soupçonnait maintenant l’un l’autre, d’appartenir au mauvais camp. Mais était-il vraiment mauvais ? Certains se diront qu’il ne s’agissait sûrement que d’un point de vue qui pouvait varier. Eliad ne savait pas où il en était, il avait du reconsidérer ces derniers mois, une bonne partie de tout les mensonges que lui avait raconté son père. Alors qu’un groupe de filles passa devant lui, il replia sa manche par-dessus son poignet rapidement, visiblement très mal à l’aise. Il ne sortait plus sans un t shirt à manches longues, quelle que soit la température. La raison de cela était tellement simple… Que se passerait-il si les autres pouvaient voir… Sa blessure. ?

Il se sentait tellement sali et meurtri depuis sa rencontre avec l’une des tueuses préféré de Voldemort. Sali d’une part par les révélations qui avaient surgit de la bouche de la mangemorte et qui l’avait frappé en plein cœur et aussi parce qu’il ne s’était pas montré assez puissant pour lui résister… Il s’était senti si faible et si impuissant… En plus de cela, il aurait pu facilement succomber à ses sorts répétés, mais son corps avait bien récupéré de ses douleurs. Etait-ce pour ça qu’elle s’était assurée de lui laisser une marque qui allait perdurer ? Le marquer en signe de honte, car elle décrétait que le sieur Midnell, fils de traître, n’avait pas assez souffert à son gré.

« Ainsi père, tu n’es rien de ce que l’on croyait hein… As-tu caché ça aussi à notre mère ? Ou l’as-tu même assassiné si elle en avait appris le secret ? »

C’était une accusation fort grave que ses lèvres, frémissant imperceptiblement, prononçaient dans la brise, à l’abri des oreilles indiscrètes. Un murmure envoyé au vent pour une vérité… emmené par hibou ? En effet, un hibou grand Duc venait d’atterrir doucement à coté de lui sur la pierre où il était assis. Dés qu’il eut récupéré le message, le hibou s’envola. Intrigué, il l’ouvrit aussitôt, ne laissant pas plus de temps à son esprit, pour se faire des idées.

Un moment de silence. De doutes. De feu.

Un feu intense dans tout son bras. C’était sa blessure qui le reprenait soudainement, comme si elle se déclenchait dés qu’il allait rentrer en contact avec l’un de ses hommes ou femmes, vêtus de capes noires et d’un masque… La brûlure était encore très vive malgré le fait qu’un bon mois s’était déjà écoulé… Il se précipita dans les toilettes les plus proches et passa son poignet sous l’eau. Inutile de dire le nom du sort qui lui avait brûlé une partie du corps. C’était comme si on lui avait apposé une torche enflammée juste à cet endroit. Il y avait des sombres marques noires sur tout son poignet, remplaçant la peau qui n’y était plus. Un dernier cadeau de la mangemorte sur son poignet gauche. La mort ou une brûlure à vie, faisait de lui un homme qui n’avait pas eu le choix et qui ne l’aurait peut-être jamais. Alors que l’eau coulait, il réfléchit à la lettre une nouvelle fois… Qui était cette SLL… Il ne voyait aucune élève avec ses initiales. Etait-ce Bellatrix qui voulait l’attirer à nouveau dans un piège et jouer avec lui, comme s’il n’était qu’une proie ?

Dans sa rage, il se mit à frotter la brûlure, ce qui ranima la douleur plus encore. Lorsqu’il cessa, ce fut pour se rendre compte que l’eau ne l’apaisait que peu. Elle avait laissé une marque indélébile sur lui. Juste pour dire : Souviens toi… Souviens toi…

**

L’heure fatidique approchait. C’était passé si vite, le hibou avait-il rendu sa lettre si tardivement où Eliad n’avait-il juste pas vu le temps passé ? Malgré les inquiétudes des élèves et du monde sorcier, ils avaient encore le droit de sortir à Pré au Lard le week end, ce qui lui facilita la tache lorsqu’il s’agit de quitter le château.

Son pas dans les rues de la petite ville n’était plus les même. Sa démarche était moins assurée, son pas plus rapide, comme s’il était pressé de se mettre le plus loin possible des autres. Il n’y avait guère que Ceres qu’il voulait encore voir, mais à chaque fois qu’il voulait aborder le sujet et se confier à elle, il s’arrêtait brusquement. Crainte ! Peur ! Souviens toi, souviens toi Midnell! Ses sœurs n’étaient pas au courant de cette histoire, il n’y avait guère qu’Anja qui avait aperçu la trace de brûlure sur son poignet et qui le lui avait fait remarquer. Avait-elle avalé son histoire d’accident de potion ? Si ce n’était pas le cas, elle n’en avait rien fait remarquer et cela suffisait à Eliad.

Quelques jours après cet événement, il avait envoyé une lettre à son père par hibou, qu’il recevrait sûrement s’il ne se terrait pas en ce moment, maintenant que les sombres serviteurs devaient le rechercher… Les mots dessus étaient plus que simples, il s’agissait de le faire bouger, de lui faire faire le premier pas. De lui faire envoyer une lettre qui donnerait son point de vue, même si, de la façon dont Bellatrix l’avait raconté, il n’avait plus aucun doute possible sur son ancienne identité et sur ce qu’il avait fait de mal dans le passé. Trois mots simplement.

« Je sais tout…

Eliad Midnell »

Trois mots pour provoquer chez lui une crise de conscience que des années entières n’avaient pas réussi à faire… Trois mots pour qu’il lui explique la mort de sa mère et la présence de ces aurors chez lui.

L’enseigne des trois balais se trouvaient maintenant devant lui, alors il pénétra dans l’échoppe. Mais il y avait du monde et il ignorait qui il devait voir… Le fond du bar, le fond du bar… Il ne s’avança pas tout de suite, il préféra observer les personnes présentes… Comme s’il allait reconnaître Bellatrix parmi la foule, mais il ne la croisa pas. Et puis c’était bien risqué qu’elle se présente à la vue de tous, elle ne connaîtrait pas une telle erreur. Le fond de la salle était l’endroit le moins éclairé du bar, les bougies achevaient de se consumer, déversant leurs derniers rayons de lumière… En particulier sur une table ou l’attendait une femme. Et deux chopes.

Il s’avança et tira la chaise à lui.

« Je suppose que je ne me trompe pas si je m’assois ici… Et maintenant, pourrais-tu me dire pourquoi tu m’as envoyé cette lettre et ce que tu attends de moi. Pour ton identité, je suppose que tu me la révéleras en temps et en heure, sinon tu n’aurais pas mis seulement tes initiales sur la lettre… »

Il était très inquiet. Mais il était à l’heure, la mort s’éloignait donc… Pour le moment.

Il ne parvenait pas à quitter le sombre de ses yeux, à observer autre chose que son aspect physique, celui d’une très jeune femme, bien loin de sa cruelle occupation. Comme s’il devait se préparer à ce qu’elle l’attaque, il affrontait son regard. Chacune de ses phrases se voulaient rapides, comme si parler allait l’éloigner de la prudence même. C’était comme si chacun attendaient que l’un des deux portent le premier coup, et fasse verser le sang. Mais même préparé, il ne vit pas l’attaque venir… Sa tête heurta brutalement la table, et du sang coulait maintenant de son nez, rejoignant ses lèvres… Et le mouchoir avec lequel il tentait d’effacer les traces du coup.

« Garce… »

Les mots qui suivirent furent étouffés par le brouhaha des gens qui s’étaient étonnés de la scène, mais ils retournèrent bien vite à leurs boissons, s’y perdre… Et faire comme si de rien n’était. Personne ne voulait vraiment se mêler des affaires qui impliquaient une femme visiblement en furie. Qui en plus avait le culot de se prétendre sa sœur…

« Je sais qu’il est mangemort oui… Même s’il m’a fallut du temps pour le savoir et aussi un combat contre Bellatrix pour avoir les premières réponses à mes questions. Mon père a refusé de vous servir une seconde fois, alors pourquoi devrais-je le faire à son tour ? »

Faisant mine de prévoir le coup qu’elle allait lui donner, il recula aussitôt pour se mettre hors de portée. Même si elle semblait relativement peu craintive pour agir ainsi en public, elle devait savoir que si elle utilisait un sortilège ici, elle se ferait virer du pub aussitôt… Et à moins de semer la pagaille et d’attirer les aurors du ministère, ce n’était pas un scandale qu’elle désirait. Ca n’était peut-être pas une bonne idée par contre de lui avoir parlé de Bellatrix, si elle l’adulait… Elle pourrait vouloir l’attaquer de nouveau.

« Si je lui en veux ? »

Il comprenait en partie les raisons qui avaient poussé son père à faire ça, et Eliad n’était pas suffisamment mature à l’époque pour comprendre ce qui avait poussé son père à agir ainsi. Peut-être était-ce pour le pouvoir qu’il avait toujours recherché, peut-être qu’il avait juste eu peur. Il avait pu croire aussi que le seigneur des ténèbres allait tout renverser sur son passage et gagner la guerre qu’il avait engagée. Il l’avait donc rejoint, car il savait que c’était le seul moyen de protéger sa famille avec la victoire du Lord. Mais avec un père en fuite, c’était vraiment difficile de savoir ce qu’il avait vraiment voulu. Une lettre envoyée à l’absent… N’obtiendra jamais de réponses. Mais puisqu’il avait une mangemorte en face de lui, il était sans doute temps de poser les bonnes questions…

Mais elle était jeune, elle ne l’avait peut-être même jamais connu. Elle faisait juste un des recrutements que lui imposait le lord, avec envie… ou pas.

« Est-ce que vous allez essayer de recruter aussi mes sœurs ? Et si je refuse de vous suivre, mon sort m’importe peu à ce sujet là… mais qu’arrivera t’il pour elles ? Un recrutement à nouveau ou… pire ? »

Elle aurait pu se préparer à lui lancer un sortilège impardonnable pour le forcer à obéir, qu’il aurait pensé malgré tout à l’intérêt de ses sœurs. Il devait veiller sur elle, il n’était plus que le seul à pouvoir le faire.

Le goût du sang sur ses lèvres avaient un goût âpre. Il aurait pu espérer un entretien plus séduisant pour un recrutement de mangemort… Où était la séduction, où était le fait même de l’attirer dans son lit, pour le manipuler par les sentiments… Ils avaient la tache facile maintenant qu’ils se baladaient à la vue de tous. Ils ne s’agissaient plus de séduire, ils s’agissaient de menacer et de contrôler.

« Je ne peux pas lui en vouloir je suppose, je n’étais même pas né… Je n’aurais peut-être pas compris ses motivations à l’époque, tout comme je ne les connais pas encore aujourd’hui. J’espérais que vous pourriez m’éclairer sur ce point. Mais vous êtes sûrement trop jeune, vous ne connaissez que des rumeurs. Je suis prêt à les entendre malgré tout. »

« Et pour mon recrutement, comment cela va se passer ? Je vais devoir signer un papier avec mon sang ? Tuer quelqu’un au hasard dans la rue, pour montrer que je suis prêt à tout ? »

Il y avait un peu d’ironie dans ses propos, mais il avait appris la leçon… Il se tenait bien loin de ses mains. Elle ne le reprendrait plus par surprise.

Hj: Désolé pour le retard :/:, mais tu sais les soucis que j'ai eu, donc je pense que tu comprend. Bis.