La panoplie du parfait petit conspirateur n'était jamais loin dans la grosse valise de William ; un sweat noir à capuche, un pantalon noir, des tennis, noirs aussi, de quoi se fondre à merveille dans l'obscurité. Il avait souvent utilisé cette tenue lors de sa troisième année, lorsqu'Ombrage entendait imposer sa loi sur Poudlard, et même au début de cette année, jusqu'à ce que les retenues musclées des Carrow aient raison de lui. Depuis plusieurs semaines, il se tenait tranquille, et il devait admettre, avec une pointe de lâcheté, que la vie était beaucoup plus facile quand on ne bougeait pas. Les courriers de son père recommençaient à lui parvenir, maintenant un lien ténu avec l'extérieur ; les devoirs l'occupaient largement assez pour qu'il n'ait pas le loisir de se lancer dans de nouvelles actions d'éclat. Bien sûr, certains devaient être déçus de sa capitulation, mais ceux qui osaient lui reprocher son inaction s'étaient par ailleurs cantonnés dans une prudente réserve...

L'adolescent avait toujours éprouvé une certaine anxiété au moment de partir en vadrouille après le couvre-feu, mais ce soir, c'était une véritable terreur qui lui nouait l'estomac. En silence, il acheva de lacer ses baskets, et rabattit sa capuche sur sa tête avant de quitter le dortoir. Fred, son voisin, était déjà parti depuis un bon moment, sans s'expliquer le moins du monde. La veille, le deuxième année avait fixé un rendez-vous à son aîné, sans lui donner d'explications ; il avait à lui parler, disait-il, hors de la salle commune.

Le plus discrètement possible, William referma la porte du dortoir, et descendit l'escalier jusqu'à la salle commune. Avec de la chance, Fred y serait encore... Le roux n'avait pas très envie d'aller courir les couloirs, et il comptait bien en dissuader son camarade. Mais il eut beau inspecter du regard les moindres recoins, la salle commune était vide... Il faudrait donc sortir, aller au rendez-vous, et tâcher de convaincre Fred de regagner la tour de Gryffondor... car le rouquin devait bien se l'avouer, il mourait littéralement de peur à l'idée d'être pris en flagrant délit et mis en retenue.

Malgré toute sa prudence, la traversée des couloirs ne fut pas chose aisée : il évita de justesse de tomber sur Peeves, et quelques dizaines de mètres plus loin, c'est une patrouille de surveillance qui faillit l'attraper. William parvint à se cacher in extremis derrière une tenture, et il resta dans ce recoin quelques instants, le coeur battant à tout rompre, les jambes coupées par la peur. L'heure du rendez-vous était passée depuis déjà deux minutes lorsqu'il se décida à reprendre sa progression dans les couloirs ; si Fred avait réellement à lui parler de choses importantes, il l'attendrait...

Parvenu dans le couloir que lui avait indiqué son camarade, William eut cependant un doute ; personne en vue – et le roux eut même, l'espace d'un instant, la crainte d'être tombé dans un piège. Lentement, le plus silencieusement possible, il s'avança dans le couloir, en observant autour de lui ; il passa devant une silhouette immobile plaquée au mur, et, par réflexe, fit un pas en arrière avant de reconnaître Fred, dissimulé par l'obscurité.

-Tu m'as fait peur, murmura William à son cadet. Alors, que se passe-t-il ? Qu'est-ce que tu voulais me dire ?

Fred attendait que William sorte de la planque en regardant fixement le sol. Même s’il essayait de garder un sourire sur son visage, il s’était tellement attendu à ce que le Gryffondor le rejoigne dans son action que maintenant que ce dernier avait refusé, il tombait de haut. Mais il ne passa pas. Il n’avait pas bougé et était resté là, l’air pensif. Quand soudain, il dit qu’en fait, il voulait tenter le coup ! Ce coup-ci, le sourire du lionceau était sincère. Ils n’avaient pas traversé le château pour rien et pourrait enfin préparer une action plus grande, à deux.

Ouais voila, si on s’prépare bien, y’aura pas de problèmes !

L’esprit de Fred s’emballa. Il n’avait pas réellement pensé à un plan avant ce soir. Comme toujours, il était plutôt adepte du dernière minute et du ‘On voit sur place’. On approchait maintenant de la fin mars et le 1er Avril venait à grands pas. L’occasion ou jamais de se faire remarquer auprès des élèves du château. Mais William lui fit part de ses craintes, où les Carrows pourraient s’attaquer non seulement aux rebelles eux même mais aussi à leur famille. Et visiblement, le père du Gryffondor avait déjà souffert.

William, j’veux surtout pas qu’tu te sentes obligé. Si on continue ensemble, on f’ra tout pour pas que tu tombes, histoire que nos affaires nocturnes restent entre nous, okay ?

Ensuite, William lui demanda ce que le première année avait en tête. Fred prit s’adossa contre le pan de mur derrière lui et croisa les bras. Il nota avec plaisir que le roux prenait aussi ses aises. Il réfléchit. Bien sûr, ils pourraient toujours mettre des affiches, comme l’a toujours fait la Chronique. Mais Fred voulait quelque chose de plus, histoire que les Carrow se souviennent de ce premier avril ! Le lionceau ne voyait quoi faire de plus car il fallait qu’ils restent dans l’esprit de la Chronique. Quand soudain il se rappelait qu’il avait quelqu’un de bien plus expérimenté que lui question sortilèges et une idée germait dans son esprit.

Will, euh, tu permets que j’t’appelle Will ? ^^ J’avais une petite idée. Tu vois, on pourrait mettre des affiches comme l’a toujours fait la chronique, mais disons d’une façon plus, euh, spéciale. Ca pourrait être des affiches géantes qu’on mettrait dans les lieux de passages importants mais ce n’est pas tout ! Si tu connais le maléfice de la Glu Eternelle, ça peut être marrant !

Bon, c’est pas hyper original, mais avec les patrouilles, on peut pas risquer plus. Ca te tente pour un premier soir ?

Comme à son habitude, l’esprit du lionceau voletait dans tous les sens en s’imaginant toutes les possibilités envisageables avec les affiches et la Glu Perpétuelle. Il fallait absolument que les élèves du château aient un 1er avril mémorable ! Et ce coup-ci, Fred ne serait pas seul, il y aurait William avec lui et du coup, l’objectif serait plus facilement atteint. Mais le cinquième année l’interrompit dans ses pensées en lui disant qu’il ne connaissait pas le maléfice de la Glu Perpétuelle. Cela faisait encore une inconnue dans le plan. Mais heureusement celui-ci trouva immédiatement une solution, vestige de ses années passées dans les Brigades Rousses.

Raah, c’est cool ! Ils vont pouvoir s’amuser avec ça !

Il poussa tout de même un petit cri d’étonnement lorsqu’il s’aperçut qu’un simple « accio » pouvait faire traverser un objet dans le château entier. Il prit note pour ses prochaines actions. Mais venait maintenant le temps de l’écriture. Il entreprit une intense réflexion qu’il exposait à William au fur et à mesure. Il fallait que les textes soient plutôt drôles que polémiques pour toucher rapidement les élèves. Mais en même temps, il ne fallait pas tomber dans l’absurde pour que la Chronique garde tout de même une certaine image.

Mais avant tout, il fallait trouver une cible ! Les Carrow ? Pourquoi pas, mais ils avaient déjà été tellement pris pour cible que cela en devenait presque banal. Rogue ? Bof, on ne le voyait plus beaucoup, ce n’était pas le pire. La MP ? Ça pouvait être marrant, ils venaient d’arriver dans la lutte. Ils n’avaient pas encore trop ciblés, ils étaient encore tout frais.

En plus, on peut trouver des trucs marrants avec leurs initiales, nan ? Comme ça, à froid, Morveux Pitoyables ou Misérables Parasites (Ciel Ltd) . Et faire un p'tit texte avec! Ça te tente ?

Une fois penché sur une feuille, feutres en main, les idées venaient rapidement, et William en fit part à Fred avant de se lancer dans la rédaction des affiches ; les vieux réflexes acquis avec Page, du temps des BR, revenaient : déguiser son écriture, faire attention à l'orthographe pour éviter les fautes trop typiques, ensorceler le matériel pour que l'identité de l'auteur ne puisse être découverte par un sortilège... Les deux roux auraient pu écrire un guide à l'usage des apprentis trublions ; leur expérience leur avait permis d'établir tout un arsenal de règles de prudence, un véritable petit catéchisme qu'ils se répétaient en silence, à mesure qu'ils effectuaient les opérations. La clandestinité pour les nuls, tel aurait pu être le nom de l'ouvrage, songeait William tout en dessinant une grosse araignée velue dans le coin supérieur de son affiche – le thème fédérateur de la MP ayant été retenu à l'unanimité. Tous les conseils pour ne pas se faire choper tout en sachant très bien que ça finira très bien par arriver... L'adolescent secoua la tête pour chasser cette pensée, et mit la touche finale à son araignée. Un regard vicieux, un peu par en-dessous. Le rouquin n'était pas très doué en dessin, mais il maîtrisait certaines figures.

-Regarde, elle te plaît ? demanda-t-il en poussant la feuille vers Fred. Elle ressemble à notre bien-aimée préfète-en-chef avec sa tronche de psycho, non ?

En vitesse, quelques slogans furent ajoutés – “MP : Mangemorts en Puissance” et autres “Milice partout, justice nulle part” ; du classique, mais qui avait fait la preuve de son efficacité. Le tout en lettres d'imprimerie pour ne permettre aucune identification, écrit de couleurs criardes.

-Tiens, on avait découvert un petit sort sympa, du temps des BR... regarde, il est super facile, mais il fait son petit effet...

William donna un coup de baguette sur la feuille en murmurant une incantation, et les lettres qu'il venait de tracer se mirent à briller. Avec un sourire, le roux expliqua :

-Charme Phosphorescent... comme ça, même dans le noir, ça reste lisible... Ombrage devenait folle à cause de ça.

Peu à peu, sous l'effet de l'excitation, William oubliait sa peur d'être pris, et il retrouvait la fébrilité des actions des BR. L'enjeu était bien moindre à l'époque, les retenues avec la grosse dinde rose n'avaient rien à voir avec les séances en compagnie des Carrow, mais les deux roux s'étaient tout de même fait de belles frayeurs... sans compter que l'épisode BR avait valu à William sa première expérience du sortilège Doloris. Désormais, ce sort lui était familier, et sa main, s'il n'y prenait pas garde, tremblait légèrement à force de nervosité. Il parvint néanmoins à réaliser trois affiches, très concentré sur ce qu'il faisait, ne détournant les yeux que pour changer de feutre ou lancer un sort ; sans se parler beaucoup, les deux garçons écrivaient, le geste rageur, et en une demi-heure à peine, ils furent les heureux possesseurs de six affiches grand format – ils avaient estimé que le rouleau de Sorcier collant inamovible ne permettrait pas d'en fixer beaucoup plus. William roula soigneusement ses trois feuilles, rabattit sa capuche sur ses yeux et murmura, en vérifiant pour la douzième fois que le Sorcier collant était bien dans sa poche :

-C'est quand tu veux, Fred.

[Désolé Will', on est à la limite du foutage de gu**** mais j'avais des tas de blèmes avec mon PC :/]

Une fois d'accord, les deux lions se penchèrent sur les affiches vierges et commencèrent à les recouvrir soit de dessins soit de courtes phrases anti-milice. A défaut d'être le moment le plus excitant, c'était sans hésiter le plus marrant car sous couvert de la Chronique, on pouvait laisser libre cours à notre imagination tout en riant bien au vue des multiples tentatives de dessins de chacun. D'ailleurs, Fred en faisait parti, de ceux qui ne savait pas dessiner mais dans la propagande, on s'en fichait, il fallait juste que ça touche les personnes.

Alors qu'il rédigeait un très court pamphlet sur un des affiches, William lui montra sa représentation de Pénombre. Le première année répondit un simple: "Ouais, grande classe!" en voulait pas s'attarder sur le sujet Craft. Fred, malgré lui, avait conservé un lien fort avec la préfète-en-chef, un lien qui n'était partagé que par lui.

Mais lorsque William lui montra le sortilège des lettres fluorescantes, le Sang et Or sauta de joie. Le cinquième année avait de l'expérience dans le domaine et ça se voyait! Il essaya le sortilège sur ses propres affiches, au deuxième essai, elles brillaient de milles feux!

Fin bref, quelques dizaines de minutes plus tard, les affiches furent prêtes. Les deux conspirateurs mirent leurs capuches, prirent le Sorcier Collant et sortirent de la cachette. N'ayant pas décidé de leur emplacement d'affichage, Fred murmura un:

Devant la Grande Salle!

Le lionceau courut furtivement vers la Grande Salle espérant ne trouver aucune patrouille!

Hj : Désolé c'est pas de la grande écriture, mais j'espère bien vous botter le c** quand même.

Son blason de la milice semblait s’évaporer sous les reflets des flammes vacillantes. L’araignée appelée à régner voulait regagner sa tanière, retourner au trou d’où elle était sortie. Mais pour être sur d’avoir à manger à son réveil, il lui fallait tisser sa toile dans un endroit où elle était sur d’avoir un important passage de proie… Mais malgré ces tentatives d’avoir un espion infiltré dans la résistance, il était maintenant de source sure que les informations d’Alix s’étaient révélées totalement fausses. Et cette dernière nouvelle avait fait perdre à Eliad encore plus de sa légitimité envers les Carrow… A cause de l’absence de résultat, il avait maintenant l’impression de se trouver sur une simple planche, sur le point de se jeter à la mer devant une multitude de requins… Mais tant qu’il lui restait encore un peu de force, il voulait continuer autant que possible ses rondes nocturnes dans l’espoir de chasser quelques souris du château. Et si possible, accrocher dans le grand hall de Poudlard, les T shirts de ses victimes, ensanglanté ou non, témoignant comme simple trophée de la milice. Ca et le prochain scalp de *****, (nom caché pour garder le suspens). Une façon de signifier à tous ces brûleurs de livres, que s’ils n’arrêtaient pas leur massacre de l’école, ils se retrouveraient bientôt tous torse nu…

Il se retrouvait donc une nouvelle fois, à jouer les Rusard Nocturne, une torche à la main, dont les flammes brûlantes le rendait maladroit. Il n’aimait guère porter dans sa main un moyen de s’immoler lui-même. Mais allumer un lumos alors qu’il avait un tas de couloirs et d’escaliers à parcourir, le mettait assez mal à l’aise. Tout était tellement calme pourtant. On aurait pu entendre Peeves arriver sur des kilomètres. Au temps de la milice, quel camp avait-il choisi lui d’ailleurs ? Celui des farceurs sûrement, plutôt que le camp de l’ordre. On ne pouvait guère compter sur les morts pour faire le travail des vivants…

Tout en avançant lentement, il se demanda si le mieux pour chasser les élèves, n’était pas de se munir d’une batte et d’un cognard… Un simple lancer suivi d’un coup sec, aurait tôt fait de briser quelques dents et épaules, alors que le jeune milicien aurait pu en accuser le cognard… Le manque de châtiments corporels était pourtant l’un des défauts majeurs de la milice. Mis à part quelques élèves aimant jouer des coudes, il avait l’impression de se retrouver toujours bien seul lorsqu’il s’agissait de nuire…

Il cessa sa rêverie lorsqu’il cru apercevoir quelque chose… Mais ça devait être encore son imagination. Il ne se passait rien de bien dans ces couloirs et ce depuis plusieurs nuits. A part quelques rats errants. Mais un trait de lumière de couleur alors qu’il faisait vraiment sombre malgré les torches… Ca, ça l’intriguait assez… Il reposa sa torche contre un emplacement vide sur le mur. Il y voyait bien assez pour pouvoir se déplacer comme ça.

Il effleura les murs… Avant de stopper net car il avait bien entendu parler… Alors comme ça, ces sales fauteurs de troubles voulaient aller à la grande salle… Peu discret ces résistants, tout au plus ils s’étaient contentés de quelques graffitis ou affiches… Il attendit qu’ils se dispersent un peu dans les couloirs, le but étant de voir leur méfait et de pouvoir l’enlever… Il ricana un instant devant le portrait de Pénombre avant de lancer un incendio pour la brûler… Il aurait bien voulu la garder avec lui pour s’en resservir plus tard, mais la colle utilisé l’aurait empêché de la porter plus loin… Il s’élança ensuite à la poursuite de sa première cible. Il ne les avait pas reconnu sous leurs capuches, mais ça ne saurait tarder. Il n’allait pas s’annoncer aussi vite, non… Il voulait les attraper devant la grande salle, avant qu’ils rejoignent de possibles complices. Le but étant de les arrêter avant. Et qu’importe si son chemin devait croiser celui de deux ou même dix résistants. Il les vaincrait tous… Arrivé presque à hauteur de la grande salle, il lança un sortilège sur le résistant le plus proche de lui. La capuche en bougeant lui révéla des cheveux bruns, mais pas encore l’identité de la personne.

« Locomotor Mortis ! »

Alors que ce sortilège allait bloquer les jambes de la personne touchée, qu’allait donc faire le second résistant ? Essayer d’aider son ami, ou bien fuir comme un lâche en l’abandonnant piégé dans la toile du chasseur…

Finalement, ce n'était pas si compliqué... une fois les affiches réalisées, on entrait dans le vif du sujet ; c'était le moment le plus dangereux, celui où l'adrénaline montait en flèche. Aux côtés de Fred, William courait silencieusement, s'arrêtant par endroits pour écouter et surveiller les lieux. Personne en vue sous les torches vacillantes, on continuait ! La première affiche fut fixée en un instant sur un pan de mur particulièrement en vue, au sommet de l'escalier des cachots ; personne ne pourrait le rater, surtout pas les Serpentard qui passaient par cet endroit en montant de leur salle commune. Le rouquin eut un sourire mauvais en pensant à Pénombre Craft, attaquée personnellement sur l'affiche, et à la tête qu'elle ferait le lendemain matin en découvrant le poster à sa gloire. Il conservait une sourde rancune contre la préfète-en-chef qui l'avait fait chanter, quelques semaines plus tôt, pour faire de lui un instrument à son service ; bien sûr, elle lui avait octroyé, en guise de récompense, le droit de recevoir à nouveau du courrier, mais cela n'effaçait pas l'humiliation qu'il avait éprouvée en se voyant à sa merci.

Fred voulait aller vers la Grande Salle, et le rouquin lui emboîta le pas, redoublant d'attention. Cet endroit stratégique devait être l'un des plus surveillés du château, il convenait de faire preuve de la plus grande vigilance... Aucun milicien ne montrait le bout de son vilain museau, et, en y repensant, c'était quand même bizarre de n'avoir même pas croisé une patrouille. Les deux garçons n'avaient pas eu à se cacher une seule fois... William tenta de se raisonner.

*La chance, c'est la chance, voilà tout, pas la peine de psychoter...*

Ils s'engagèrent dans le dernier couloir avant le grand hall, à quelques pas de la Grande Salle où les murs avaient bien besoin d'un peu de décoration. C'était l'affaire de cinq minutes, maintenant... William prit la tête de la course vers la Grande Salle, et il remonta en silence le couloir... Jusqu'à ce qu'un bruit de chute, derrière lui, le stoppe net. Fred venait de tomber, probablement pas tout seul, mais l'obscurité du couloir ne permettait pas au roux de voir qui était responsable de sa chute. L'adolescent tira sa baguette magique de sa poche, le coeur battant la chamade, bien conscient que les choses se gâtaient salement. Car si la chute de Fred était bien due à une intervention extérieure, il fallait bien se douter que l'intervenant en question devait appartenir à une des nombreuses catégories de malfaisants présentes à Poudlard : milicien, préfet, prof, Rusard, la liste était longue. Autant dire que ça risquait fort d'être la fête des deux Gryffondor...
La raison conseillait de filer à toutes jambes, mais la loyauté imposait de se porter au secours de Fred. Assurant sa prise sur sa baguette, William fit donc quelques pas en direction de son camarade, sans voir qui l'avait attaqué ; très inquiet, l'adolescent s'agenouilla près de son camarade en murmurant :

-Fred, ça va ? Qu'est-ce qui s'est passé ? Finite incantatem, ajouta-t-il à tout hasard en pointant sa baguette vers son complice, sans savoir s'il y avait bien un sort à annuler. Une véritable panique lui avait coupé les jambes, et il jeta un regard affolé autour de lui, cherchant à apercevoir le troisième larron.

C’était presque trop facile… Surtout à la vue des cibles qu’il avait en face de lui. Il avait reconnut Fred lorsque celui-ci était tombé sous le coup de son sortilège de ligotage. Quand à l’autre… On aurait dit William. Décidément leurs chemins semblaient toujours les mener l’un à l’autre. Ils étaient venus cachés sous des capes à large capuche, mais leur identité n’avait pas tenu le choc face à la peur. A trop chercher la guerre, William allait finir le visage accroché en trophée sur la porte de la salle commune des Serpentards. A trop vouloir en faire… Il n’allait pas arrêter de subir.

Maintenant qu’ils étaient alertés de sa présence, il devait jouer plus finement. Il aurait du les frapper tout les deux dans le dos avant que l’un n’ait le temps de réagir. Oui, mais il aimait tellement jouer. Ca n’était pas tout le temps que deux résistants couraient vers la grande salle, sans même se rendre compte de sa présence. L’un deux après avoir repris du poil de la bête jeta ses affiches au sol et demanda à son complice de les brûler… Désirait-il mettre le feu aux escaliers pour empêcher la progression du milicien ou désiraient-ils juste brûler les preuves culpabilisantes en leur possession ?

« Je ne ferais pas ça si j’étais vous… Et puis même si vous faites ça… »

Il sortit de sa poche l’affiche qu’il avait déchiré et gardé sur lui.

« J’ai bien assez avec ça pour vous arrêter tout deux… Alors le mieux serait vraiment que vous me rendiez vos baguettes une à une, et que vous me suiviez bien gentiment dans le bureau des Carrow sans faire d’histoires… Sinon je serais obligé de dire à mes deux complices ici présent de vous lancer des sorts de stupefix pour vous immobiliser… Après nous allons devoir vous porter, un à un jusqu'à vos cellules, mais si on n’avait pas à se fatiguer le dos, j’apprécierais grandement… »

Une pointe d’humour envers les chassés. Tout comme le chat qui jouait avec ses proies avant de les dévorer. La métaphore était bonne, mais surtout, ce qui se cachait derrière son sourire, c’était la satisfaction de s’être inventé deux complices, alors qu’il agissait toujours seul d’habitude… Il avait su inspiré la crainte alors qu’il n’y avait qu’une baguette contre deux élèves… Et pour peu que l’un soit plus rapide que lui, il pouvait tout perdre. Mais il n’était pas là pour ça. Il se retint de s’asseoir sur une marche et hésita un petit moment à leur faire avaler leurs affiches une à une juste pour avoir le droit de plaisanter à nouveau. C’était tentant… Et s’il le faisait ?

« Je peux, peut-être me montrer conciliant avec vous deux… Vous avez l’air de vrais amateurs qui ne savent pas vous y prendre, et allez, disons le, une affiche collé sur un mur, ce n’est pas le délit le plus grave que j’ai pu voir ici… Moi et mes complices, nous pouvons vous laisser vous enfuir, et même faire comme si on ne vous avez jamais vu de la nuit… Il ne faudra faire qu’une chose… »

Son sourire revint, plus audacieux, plus large, dévoilant une rangée de dents, sous ses lèvres extrêmement fines.

« Il faudra manger vos affiches devant nous… »

Il se tenait toujours debout sur une marche, sa baguette toujours rivée sur le corps du jeune rouquin. Il ne voulait pas le lâcher, connaissant ses capacités de riposte.

« Bien sur, si vous ne le faîtes pas, je vous rappelle que les châtiments corporels sont parfaitement autorisés et totalement légaux… Et à la milice, on adore ça… Pas vrai les amis ? »

Encore une fois, il avait fait appel à ses complices imaginaires. Son sourire ne le quittait plus. Il fallait qu’ils le croient…

Eliad Midnell. Il devait être inscrit quelque part dans le Grand Livre Universel des Tuiles qu'Eliad Midnell était spécialement préposé à l'empoisonnement de l'existence de William. Le roux ne voyait pas très souvent le Serpentard en-dehors des heures de cours, mais à chaque fois, il semblait que ce fût pour devoir subir ses foudres. La rencontre n'était donc pas pour enchanter le Gryffondor, d'autant que le camarade milicien, plus âgé que lui, connaissait plus de sorts et était probablement mieux entraîné que lui au maniement de la baguette. Cela dit, un combat était-il la meilleure chose à faire ? Un milicien pouvait bien réduire un impur en carpaccio, il ne risquait guère de sanctions... alors que l'inverse était hautement risqué. Bien entendu, la simple sagesse recommandait de ne pas engager le combat ; de toute façon, ça se terminerait chez les Carrow... alors autant se rendre et ne pas commencer le cirque avant même d'être chez les horribles.... D'autant que Midnell parlait de ses deux acolytes. Trois miliciens pour deux résistants, ce n'était pas jouable. D'autant que William était le plus expérimenté des deux, mais qu'il se sentait singulièrement démuni pour l'heure.

Alors, se rendre, honteusement, donner les baguettes et attendre le bon plaisir d'Eliad et de ses chers amis ? Si encore ça pouvait donner des résultats... Mais le rouquin avait déjà une idée bien précise du scénario qui allait suivre. Les couloirs étaient déserts, l'insigne de la MP assurait l'impunité, les miliciens allaient sans doute s'amuser un peu. Leur réputation n'était pas usurpée... Et quand ils auraient assez joué, ils enverraient les deux Gryffondor affronter les Carrow. D'un mouvement vif, William se releva et fit un pas de côté, de manière à laisser à Fred la place d'en faire autant, et lança sur un ton méprisant :

-Je croyais que tu n'étais pas le petit toutou obéissant des Carrow, Midnell... C'est bien ça que tu m'avais dit l'autre fois ?

Il consulta Fred du regard, certain d'avance de sa réponse, et poursuivit :

-Tu nous laisserais partir ? Mais on sait très bien que les minables de la milice n'ont aucune parole... Pas question qu'on se prête à tes exigences. Puisque ces affiches ont tellement l'air de te plaire, tu n'as qu'à te les coller dans le... Incendio ! termina-t-il brusquement, en pointant sa baguette sur la pile de parchemins que Fred avait laissée au sol.

Profiter de ce que tout le monde attend une fin de phrase pour lancer un sort... William avait lu cette astuce quelque part, et il l'utilisait pour la première fois. Le plus difficile était de prononcer le début de sa phrase assez naturellement pour que cela n'éveille pas les soupçons...
Un joli petit feu s'éleva aussitôt et projeta de drôles de lueurs sur les visages des trois garçons présents. Maintenant, le sort en était jeté... William eut un instant de regrets en pensant qu'il avait entraîné Fred sans lui demander son avis – mais il se rendit compte dans la seconde que son camarade n'aurait jamais accepté le marchandage de Midnell. L'honneur, c'est tout ce qu'il reste quand on n'a plus rien. Le seul ennui était le très jeune âge de Fred, qui l'empêcherait de se défendre comme il se devait. Mais pour la détermination, il n'avait de leçons à recevoir de personne.

L’ambiance était électrique, pesante. A couper au couteau. Les miliciens fantômes jouaient à eux seuls une parfaite symphonie. Un carmina Burana hurlant dans la chaleur moite du hall d’entrée. Ses acolytes imaginaires répandaient dans leurs estomacs de jeune gamins, une terreur sourde et quelques frissons qui se distillaient comme un puissant alcool dans leurs faibles estomacs. Ils avaient peur et Eliad le sentait. Le reste s’annonçait facile, il allait leur faire dévorer toutes leurs affiches. Il allait s’amuser avant de les emmener vers les furieux Carrow. Ou pas. Il pouvait aussi choisir de respecter sa promesse. Parfois sa loyauté allait dérivant, surtout depuis qu’il était au courant des supplices que William avait subi, et il ne partageait pas leurs idées des châtiments corporels. Alors bien souvent il lui venait à l’envie de revenir sur sa décision… Voire même, quitter totalement la milice. Il ne savait pas encore ce qu’il en ferait, le temps passait si vite. Il voulait juste s’amuser pour l’instant. Juste, inspirer de la terreur facile…

« Je ne suis pas un de leurs chiens de garde, William… C’est vrai. Mais rien ne vous forçait à mettre ses affiches partout dans l’école. Il vous suffisait de rester étudier en silence et de ne pas vous en mêler. Bien d’autres se chargent de régler ce problème pour vous dehors, vous n’êtes que des élèves qui veulent jouer avec des flammèches, peu conscient d’amener la situation à devenir un grand incendie. Voilà pourquoi moi et les autres nous sommes là, pour empêcher les gens insouciants comme vous de mettre Poudlard en flamme… »

C’était son argument personnel… Et il comptait bien le mettre en pratique jusqu’au bout. Sans tenir compte de ses doutes envers la milice.

« Je vous laisserais part… Non, ça tu vas le regretter ! »

William venait de bruler toutes les affiches, sabotant toutes ses manœuvres. Il avait mis un terme prématurément à tout ce qu’il avait prévu, et comme si ça ne suffisait pas, le jeune Fred venait de montrer un courage imprévu du haut de sa petite taille…

« Il est tout seul les enfants, il vous fait une farceee ! »

La voix s’éloigna aussi vite qu’elle était venue. C’était cette saleté de Peeves qui avait décidé de jouer les redresseurs de torts à moins qu’il n’ait pas supporté qu’un autre fasse une farce à sa place et qu’elle ait même une chance de réussir. Tout venait de tomber à l’eau. La baguette tremblait dans sa main, il était en colère. Les yeux plein de flammes, il lança un incendio en direction du mur que Peeves venait de traverser. Une mince flammèche s’était allumée sur le mur, mais elle s’était aussitôt éteinte. Il avait perdu tout effet de surprise. Ainsi que tout ce qui pouvait leur donner peur. Il était soudainement moins sur de lui. Il s’y connaissait plus en sortilèges, mais ils étaient deux contre lui et la situation pouvait s’inverser à tout moment. Il suffisait qu’il rate un seul des sortilèges lancés contre lui et il pouvait perdre l’avantage. Il devait se préparer à se protéger avant qu’ils ne réagissent…

Hj : Possibilité qu’il rate le protégo lors du 2e sort

Eliad avait beau expliquer qu'il n'était pas un chien de garde des Carrow, William ne voyait pas la différence. Il arpentait les couloirs pour tâcher de prendre sur le fait les quelques têtes brûlées qui résistaient encore, c'était bien être au service des deux affreux, non ? Il pouvait bien se raconter ce qu'il voulait pout essayer de préserver sa bonne conscience, mais ça ne changeait rien à la situation. Il aurait pu choisir la neutralité (sans même parler de résistance), il avait préféré collaborer et se mettre à la botte des maîtres de Poudlard... Le regard étincelant de haine, William fit un geste pour indiquer à Eliad qu'il pouvait bien garder son sermon pour lui, et il lança sur un ton glacial :

-Tu pourrais au moins assumer au lieu de te chercher de fausses excuses, Midnell.

Fred, de son côté, se comportait avec tout le courage qu'on pouvait attendre d'un digne héritier de Godric. Entre les affiches en flammes et la question sur les deux acolytes cachés, la situation se corsait pour Eliad. D'un sourire, le rouquin félicita son camarade pour sa présence d'esprit, avant qu'un hurlement hystérique les fasse tous sursauter. Peeves, attiré comme à son habitude par l'agitation et la possibilité d'une bagarre, venait prêter main-forte aux deux Gryffondor, en glapissant à pleine poumons que le milicien était seul. On s'en doutait un peu, mais la confirmation était tout de même bonne à prendre... Le seul ennui était que la voix perçante de Peeves avait dû réveiller la moitié du château, et que d'ici peu, des renforts allaient sans doute arriver pour que ce pauvre Eliad ne soit plus seul... Il fallait trouver un moyen de filer en vitesse. Le roux adressa un regard entendu à son complice pour lui faire part de cette conclusion inattaquable ; visiblement, Fred en était arrivé à la même idée, et le regard qu'il rendit à son aîné était assez clair. Il est des moments où la parole est superflue ; William avait déjà connu ces instants particuliers avec Page, et le danger les lui faisait revivre avec Fred.

Agir vite... cela signifiait neutraliser Eliad, chose difficile. Il était redoutable baguette en main, le roux le savait pour l'avoir déjà vu à l'oeuvre ; mais il n'y avait pas le choix. Il avait apparemment choisi d'attaquer Peeves plutôt que les deux Gryffondor... très bien, cela leur donnait quelques précieuses secondes d'avance sur le milicien. En lançant leurs sorts en même temps, les deux lionceaux avaient leurs chances... D'un geste vif, William pointa sa baguette magique vers le milicien et lança un maléfice du saucisson, en espérant de toute ses forces que Fred ait saisi l'idée et en fasse autant. Ensuite, il n'y aurait plus qu'à partir en courant, en laissant Eliad aux prises avec Peeves qui encourageait les trois élèves à la bagarre en chantant à tue-tête un air de sa composition, tout empreint de poésie comme d'habitude.

-Peeves, faut arrêter les Carrow et les autres miliciens, hasarda William sans trop savoir s'il pouvait se fier à l'esprit frappeur.

L'affreux Peeves lui-même hésita un instant, puis fila en caquetant qu'il en faisait son affaire. Pour regagner la tour de Gryffondor, c'était maintenant ou jamais...

Comme par magie, ce qui était fort probable entre ces murs, la voix de Peeves, l’esprit frappeur du château retentit dans les couloirs. En temps normal, Fred aurait été exaspéré par le bruit que faisait le fantôme après les heures du couvre-feu mais là, il leur avait dit que les deux complices avaient maintenant la supériorité numérique. Ce qui ne semblait pas vraiment plaire à Eliad qui dans un geste de colère, tenta d’envoyer une flammèche sur Peeves.

William, avec les réflexes d’un rebelle endurci, lança immédiatement un sort sur le milicien. Fred décida d’en faire autant et dégaina sa baguette et… euh l’air stupide. Il se rendit compte qu’avec même pas deux années de sortilèges, il n’était pas capable de lancer un sort par reflexe mis à part les banaux Wingardium et autres… Mais en face, le serpentard avait aussi dû le remarquer aussi ce qui mettait le lionceau en danger !

Sous les cantiques de Peeves, il lança une série d’étincelles sur Eliad dans l’espoir de détourner son attention pour pouvoir fuir, euh non, effectuer une retraite stratégique. Un Lion avait beau être courageux et téméraire mais il savait aussi quand il ne faisait pas le poids ! D’un autre côté, il n’avait pas envie de montrer qu’il fuyait lâchement le combat et une dizaine de mètres plus loin, il se retourna, baguette pointée, pour montrer que si il y avait course poursuite, Fred ne serait pas une proie facile !