A la recherche d’une notice pour redorer les blasons [Fini]

Le vocabulaire est une arme diablement précise : un mot pour chaque chose, avec une signification et une connotation précise. Quand on est petit par exemple : on grandit. Avec le verbe grandir vient l’idée de croissance, d’épanouissement, de développement qui va permettre la découverte des choses de la vie et de tout un tas d’expériences passionnantes…
Ensuite, quand on a atteint son apogée, le verbe se fait remplacer par vieillir, apportant son lot de responsabilités collantes et d’obligations barbantes de grandes personnes sonnant le glas de l’insouciante jeunesse.

C’est exactement ce qui se passait avec Lucy Ann : avec la fin des études qui se rapprochait avec son entrée dans la vie active, certains petits mensonges de sa jeunesse devenaient nettement moins évidents à maintenir. Lorsqu’elle était jeune, mentir sur ses origines était venu de façon plus ou moins naturelle sous la pression de sa maison, idolâtrant les sang-pur. Passer pour les sales bourbeux rouquins de service n’enchantait les jumeaux pas le moins du monde à l’époque, ils s’étaient donc inventé des parents sorciers à la généalogie antérieure floue, mère au foyer, père travaillant de le commerce, rien que de très vague qu’ils avaient pu maintenir sans peine grâce à la coordination parfaite de leurs discours.

Seulement voilà, le temps avait passé, les jumeaux grandis, Poudlard terminé et Ryan disparu… Et il s’était avéré que les affabulations d’écoliers allaient être plus utiles que prévues, le climat ambiant étant ce qu’il était il ne faisait pas bon être née moldue dans les parages, surtout lorsqu’on briguait des postes administratifs comme celui de professeur, nécessitant un wagon de paperasse assez impressionnant.

Lucy Ann se retrouvait donc au pied du mur, obligée d’étayer sa version des faits et d’y apporter autant de pièces justificatives que possible. Seulement voilà, comment produire des preuves de quelque chose d’inexistant ? La jeune sorcière avait longuement réfléchi à la question, et il s’avérait que falsifier des documents officiels risquait de la mettre dans un sacré pétrin. En même temps, révéler son statut publiquement la mettrait également dans de beaux draps… Et à bien y réfléchir, il n’y avait que Manu qui était au courant, les risques de fuite étaient donc minimes si elle réussissait bien son coup. Cela valait donc le coup de tenter sa chance, il suffisait de s'appuyer au maximum sur des faits existants pour passer le plus inaperçu possible.

Mais comment s’y prendre ?

Après de longs instants de cogitation intensive, ça avait fait "tilt" : il y avait bien une personne qui pourrait l’aider, une personne qu’elle avait fréquenté pendant sept ans et qui avait un statut tout ce qu’il y a de plus officiellement intéressant : Suzie-Lou Lalys.

Cette demoiselle combinait en elle bon nombre d’avantages : de par son poste, elle avait accès à un nombre impressionnant de documents, et en plus les deux demoiselles avaient fait leur scolarité Poudlardienne ensemble : elles se connaissaient donc relativement bien, et leurs relations n’avaient jamais souffert de clash majeur. Il y avait bien eu quelques accroches entre elles lorsque Suzy avait été promue préfète, mais rien de bien méchant.

Même si elle n’avaient pas gardé contact au terme de la 7e année, Lucy Ann pensait que Suzie se souviendrait encore d’elle. Pour sa part, elle gardait un souvenir assez précis de la demoiselle et de ses mèches brunes : douce, gentille, diplomate, jamais un mot plus haut que l’autre malgré une fibre autoritaire qui s’était largement exprimée avec sa fonction de préfète, le tout cachant un intellect loin d’être négligeable. Une personne intelligente et avenante, quoi demander de mieux ?

L’étudiante avait donc pris le chemin de la bibliothèque, espérant bien mettre la main sur la femme de la situation.
Elle s’était tout d’abord sentie un peu perdue au milieu des grands rayonnages, comme si sa petite personne était écrasée par le poids de tout ce savoir. Mais pas question de se laisser démonter, elle avait un objectif précis à atteindre.
En parcourant les rayons, son regard passait au crible tous les visages qu’elle pouvait croiser, espérant que la demoiselle n’avait pas profité de tout ce temps pour effectuer un relooking trop radical. Elle finit par remarquer une jeune femme, qui semblait occupée à remettre certains ouvrages à leur place.
Elle s’approcha en se raclant la gorge, se demandant ce qu’elle allait bien pouvoir lui raconter.

Excusez-moi… Bonjour mademoiselle Lalys, je suis une de vos plus grande fan, j’ai suivi votre parcours depuis la première heure et je me demandais si par hasard je ne pourrais pas vous embêter un peu et solliciter votre aide, demanda-t-elle avec un grand regard faussement candide. Miser sur la carte de l’humour lui paraissait plus judicieux que celle du « hey, tu te souviens de moi ? Non, ha, c’est dommage… »

Suzie était en train de se dire que les téléfilms moldus, ben c’était de la m*rde. Le beau et grand prince charmant, accompagnant sa belle chez elle, des échanges de baisers fougueux et tout le tointoin. Mais la vraie vie était loin d’être ainsi. Malheureusement. Or, il était grand temps que la petite mangemorte trouve le grand amour. Mais bien entendu, ce n’était pas dans cette bibliothèque qu’elle allait le trouver. Soit, pour le moment en fait, elle n’avait pas trop le choix. Fallait qu’elle sorte, pour voir du monde, rencontrer, papoter, rigoler toussa toussa.
Pourtant, ça lui semblait impossible. Elle, d’ordinaire si calme, douce et gentille, même si elle était imprévisible, Suzie ne se voyait pas faire ça. Ouais enfin, comme d’habitude, son grand amour, et bien elle l’imaginait parmi les rayons. Et bien sûr. Avec des courbes féminines.

Bref, la brune était donc en train de ranger, comme d’habitude. Elle venait de papoter avec une vielle dame, bien sympathique. Elles avaient échangé, rigoler. Mais bon, c’était pas l’amour de sa vie, loin de là.
Puis elle s’en était retournée à ses magnifiques livres. Parce que finalement, y’a que ça de vrai inh. C’est tout gentil itout itout, pis surtout, ça ferme sa gue* le. Si Suzie était déprimée ? Noon ! Elle voulait juste se marier… Avec une femme. Avoir des enfants, une vie de famille, et une vraie vie sexuelle. Mais passons.

Cette journée avait commencé comme toutes les autres, sauf que là, maintenant, ça n’allait plus être tout à fait pareil.
En effet, la mangemorte n’avait pas vu une jeune femme s’approcher d’elle, elle n’avait pas fait gaffe, comme d’habitude. Sauf que ce n’était pas n’importe quelle jeune femme, attention ! Mais ça, la brune ne le vit qu’après. Elle entendit donc quelqu’un s’adresser à elle, elle s’était tournée délicatement, avant de voir un visage qui était loin de lui être inconnu. Une femme légèrement élancée, et surtout : rousse. La bibliothécaire n’en n’avait pas connu des centaines des rousses inh.
Lucy Ann Donovan.

Suzie se souvenait d’elle pour différentes raisons. Déjà, lorsqu’elles étaient à Poudlard, elles avaient été dans la même maison, dans le même dortoir et dans la même année durant sept ans. Ca en fait des moments tout de même ! Elle se souvenait d’elle aussi pour le couple qu’elle formait avec son frère jumeau. On appelait ça des « rebelles » dans le temps, maintenant, tout ceci était bien changé. Et enfin, elle se souvenait d’elle parce que c’était d’elle que la brune était tombée amoureuse pour la première fois. Enfin, c’était la première fille. Bizarrement, elle ne lui avait jamais annoncé. A Poudlard, les préjugés, les clichés, puis bon, elle était préfète. Comment avait-elle aimé son amie ? En silence, pourtant, elle n’avait pas souffert. Elle préférait rester seule et ne pas se faire envoyer paître. C’était beaucoup plus simple. Son côté lesbienne expliquait donc bien des choses. Le fait qu’elle n’eut jamais de petits copains. Ou du moins, pas des vrais. Certes, deux ou trois amoureux en première et seconde année, à part ça, le néant. Elle avait eu des amants ensuite, mais s’en grande éclate, si on pouvait dire ça comme ça. Non en fait, Suzie-Lou aimait les femmes, leurs courbes, leurs façon de voir et de regarder. Tout cela en même temps.

C’est ainsi que la mangemorte ouvrit grands les yeux quand elle reconnue son amie, qu’elle n’avait pas vu depuis des lustres. Son parcours. Bien évidemment.
La brune ne put s’empêcher de sourire, puis ensuite de rire. Mais finalement, elle se dit que si Lucy Ann était là, c’était juste pour de l’aide. Mais bon, c’était toujours mieux que rien.

« Désolée mademoiselle, je n’ai pas de plume à portée de main pour un autographe. Mais un bisou sur la joue suffira n’est-ce pas ? »

C’est exactement ce qu’elle fit. Elle se penchant vers la rouquine, et lui déposa un petit bisou sur le joue droite. N’est-ce pas meugnon tout plein tout ça ? Bien sûr que si. Mais tout cela était sans arrières pensées. En fait, Suzie était contente de voir une de ses anciennes connaissances quand même.
Puis ensuite, la bibliothécaire fronça légèrement les sourcils. Est-ce que Lucy Ann avait besoin d’aide pour trouver un livre ou quelque chose comme ça, ou c’était un truc un peu plus… spécial ? Etrange, étrange. Mais la mangemorte n’osa rien dire. Enfin si, elle posa juste la question.

« Alors chère Lucy Ann, que puis-je faire pour toi ? »

Lui trouver une chambre d’hôtel et l’accompagner durant toute une nuit, aucun problème . Un peu de sérieux ! Non, Suzie n’espérait pas quelque chose comme ça. En fait, elle voulait juste lui être utile, c’est tout. Puis bon, la rouquine devait être du coin, et devait faire ses études à l’UMA, quelque chose comme ça. Rien de bien extraordinaire.
Elle regarda alors la jeune femme, un petit sourire accroché aux lèvres. C’était sûrement le destin qui venait frapper à sa porte. Ui ui.

Une bise ? Je n’en demandais pas tant, mais maintenant je ne me laverais plus la joue ! répondit Lucy Ann sur un ton très « fangirl de 15 ans », en lui rendant son bisou sur la joue. La réaction décontractée de son ancienne camarade avait eu le don de faire disparaître les traces d’anxiété liée aux « retrouvailles », elle se sentait désormais beaucoup plus à l’aise. Heureusement pour elle, Suzy ne s’était pas métamorphosée en l’archétype de la bibliothécaire, vieille fille aussi desséchée que les pages de ses livres, les cheveux relevés en chignon et, détail très important, les lunettes demi-lune posées sur le bout du nez.

Ce que tu peux faire pour moi ? Ha, si tu savais… répondit-elle d’un air taquin. Non, plus sérieusement, j’aurais quelques recherches à mener et je ne sais pas du tout comment m’y prendre, je me suis dit que l’ex préfète brillante que tu étais devais être devenue une bibliothécaire non moins brillante, et donc tout à fait capable de venir en aide à une ex-cancre comme moi !

En effet, du temps où elles étaient toutes deux à Poudlard, Lucy Ann n’avait pas beaucoup fréquenté de livres, tout juste ses ouvrages scolaires, alors ceux de la bibliothèque n’en parlons pas… Depuis son entrée à l’UMA elle avait bien changé à ce niveau là, mais il est certaines lacunes qu’on ne comble malheureusement pas en un jour.

Je me suis rendu compte, au fil du temps, que l’école c’était pas si mal et j’ai décidé d’y retourner en tant que prof. Enfin, juste stagiaire jusqu’à présent, mais si je souhaite me faire titulariser un jour, j’aurais besoin de remplir un dossier tellement épais que je pourrais caler une armoire avec ! Enfin, je suppose que tu vois de quoi je veux parler, ta profession ne doit pas être mieux lotie niveau paperasse…
Enfin bref, dans ce dossier, il y a un certain nombre de pages dédiées à la généalogie, et c’est là que le bas blesse… Je peux remonter jusqu’à mes parents sans problème, mais pour mes grands-parents c’est une autre histoire : entre ma mère qui ne les a jamais vraiment connu et mon père qui s’est brouillé avec, tout ce que je sais d’eux est qu’ils sont soit très vieux, soit très mort, leur nom de famille et c’est tout. Même pas de prénom certains, les anciens étaient pas du genre à se faire appeler par le patronyme officiel de l’état civil, bref, le flou artistique total ! fit-elle en soupirant d’un air faussement - mais bien imité, désabusé.

C’était honteusement faux, sauf la partie sur le dossier à remplir… Elle connaissait parfaitement ses grands-parents, ses oncles et tantes ainsi que ses cousins, mais malheureusement ils ne constituaient pas des morceaux de choix pour se constituer un arbre généalogique sorcier. La meilleure solution qu’elle avait trouvé pour le moment était donc de mener des recherches afin de trouver d’autres familles de sorciers oubliées ayant le même nom, et de voir comment elle pourrait se débrouiller pour s’y affilier. Heureusement, les noms de famille de ses parents étaient relativement courants, sa recherche devrait donc pouvoir porter ses fruits, mais réussir sa greffe en tant que bourgeon allochtone ça, ça serait une autre paire de manche.

Voilà, je voudrais savoir où chercher pour trouver des pistes sur le lignage de ma famille… Mon rayon à moi c’est plutôt les bestioles et les plantes, mais pour tout ce qui touche à l’administratif et l’historique… Force m’est de constater que je suis toujours aussi nulle ! fit-elle en riant, avant de continuer sur un ton plus léger :

Bon, maintenant que je suis passée sur les trucs barbants, dis-moi un peu, qu’est ce que tu deviens depuis le temps ?
C’est vrai après tout, elle avait beau être là dans un but précis et tout à fait sérieux, ça ne l’empêchait pas d’être curieuse et de se demander ce qu’avait bien pu faire la demoiselle pendant toutes ces années…

Ha, si elle savait. Et bien ? Mais non, l’air taquin n’avait pas du tout déstabilisait Suzie. Sa vieille amie allait se mettre à parler, et la mangemorte allait tout faire pour l’aider. Dans les limites du raisonnable.
Au paroles de Lucy Ann, la brune rit légèrement, oui, c’est vrai, c’était une ex préfète, et la rouquine en face d’elle, une ex-cancre. Telle était la grande différence entre les deux jeunes filles. Pourtant, cela ne les empêchaient pas le moins du monde de bien s’entendre, la preuve. Par contre, quelque chose perturba la jeune femme. Des recherches, ça ne devait pas être de simples recherches, sinon, l’étudiante se serait adressée à quelqu’un d’autre, ou pas obligatoirement à elle. Alors oui, Suzie se dit que son amie avait besoin de discrétion ou alors de quelqu’un qui la connaissait au moins un petit peu. Or, avec la bibliothécaire, c’était tout à fait le cas.

Lucy Ann, aimait l’école ? Non, tout cela n’était qu’une vaste blague, vraiment. Etre professeur ? C’était si surprenant. La mangemorte ne put se retenir de rire quelques secondes. Elle l’imaginait tient bien, en tant que professeur, elle allait tout déchirer.
C’était donc ça qu’elle avait besoin, de l’aide pour des papiers. Mais Suzie ne voyait toujours pas le but ultime de l’étudiante. Voulait-elle refaire son arbre généalogique entièrement, au moins avec les grands-parents.
A bibliothécaire ne dit rien, mais elle commençait doucement à réfléchir. Où est-ce qu’elle devait chercher, et bien, c’était relativement simple.

« Mmm. Ce n’est pas à la bibliothèque nationale que tu trouveras ce que tu cherches. A moins que tes parents ou grands parents aient fait des découvertes qui ont changé le monde magique… ? Sans te vexer, j’en doute. Le seul endroit qui me vient à l’esprit là… c’est le ministère de la magie. Je peux t’aider à y aller, prétextant y faire une recherche, étant donné que je suis historienne de la magie, je peux y accéder assez facilement en fait. Dans les archives, tu trouveras tout ce qu’il te faudra. Maintenant… Si tu me caches des choses… »

Suzie marqua une pause, elle venait en effet de penser à quelque chose.

« Il y a un problème. Pourquoi moi ? Tu ne connais personne au ministère ? Enfin, je veux dire, qu’il y a forcément une raison. Entrer dans les archives est quelque chose de dangereux, et surtout de confidentiel. Alors si vraiment ce n’est pas pour savoir qui sont exactement tes pépés et mémés, ça va poser problème. Maintenant, si c’est vrai, je t’emmène avec moi quand tu veux. Il n’y a aucun souci I love you

»

La mangemorte avait peur d’avoir vexé l’étudiante. Mais elle était on ne peut plus sérieuse. Elle se protégeait elle-même en même temps. Les archives du ministère étaient déjà, assez conséquentes, mais si des bêtises étaient faites là-bas, ça allait barder. Surtout, elle ne comprenait pas très bien, et les parents de Lucy Ann, étaient-ils morts ? C’était fort possible, avec les temps qui couraient, on ne comptait plus les disparus, enfin presque.
Elle regarda alors son amie. C’était elle son premier amour, ces si beaux cheveux roux, cet air un peu rebelle. Elle secoua légèrement la tête et ça chevelure.
Ce qu’elle devenait depuis le temps ? Et bien, ce n’était pas très difficile.

« Comme tu le vois, je suis bibliothécaire depuis à peu près un an. J’espère bien devenir directrice de ce bâtiment dans quelques années mais bon et comme je te l’ai dit, je suis historienne. Oui, je suis fière de ce statut. Et toi, à l’UMA toujours ? Tu as parlé de plante et animaux. Magicosoins n’est-ce pas ? Pourquoi cette filière ? »

Oui, elle posait des questions simples, pas trop indiscrètes. Elle n’avait pas parlé du fait qu’elle était mangemorte. Non, elle ne pouvait pas le crier sur tous les toits. Même si aujourd’hui les mangemorts étaient partout et tout le monde le savait. Même à Poudlard sûrement. La poisse. En aucun cas la brune aurait souhaité être professeur à Poudlard. Ou peut-être que si. Mais dans de bien nombreuses années, du moins elle l’espérait. Pour le moment, la bibliothèque lui offrait un très bon salaire, et une vie quasiment parfaite. Oui, en fait, en réfléchissant ainsi, Suzie-Lou était bien heureuse.
Elle fixa alors son amie, un petit sourire sur ses lèvres rosées. Elle attendait que celle-ci prenne la parole.

Les paroles de la bibliothécaire firent sourire l’étudiante. Rechercher ses grands-parents parmi d’illustres figures de la magie ? Mais bien sur, pourquoi pas se mettre une cible sur la tête pendant qu’elle y était ?
Cependant, l’historienne venait de soulever un point sensible, ce qui ne lui plaisait pas outre mesure. Que se passerait-il, si elle la soupçonnait déjà de cacher quelque chose au bout de 10 minutes ?
Elle décida alors de détourner la conversation un moment, histoire de revenir à des choses plus légères.

He beh, félicitations, je ne savais pas que tu avais autant de cordes à ton arc… Historienne et bibliothécaire en passe de devenir directrice, à ton âge… Ralentis un peu, sinon tu vas arriver aux derniers barreaux de l’échelle trop vite, tu vas t’ennuyer plus tard ! fit-elle en souriant. Elle n’avait jamais douté que la brunette aurait une carrière aussi brillante que sa scolarité, et qu’elle irait loin. Ce qui était déjà le cas visiblement, si elle avait ses droits d’entrée au ministère…
Exact, je fais ma dernière année de magicosoins, section magiebiologie. Pourquoi cette filière ? J’avais envie de faire quelque chose d’utile de ma vie, de venir en aide aux autres, c’est pourquoi je me suis dirigée vers cette filière. Ensuite, je me suis rendu compte que les créatures magiques étaient beaucoup plus intrigantes, notamment celles dites « supérieures », avec lesquelles on peut communiquer… Les loups-garous par exemple, humains ? Créatures magiques ? Tu vois, c’est sur ce genre de choses que j’aime bien me questionner, raconta Lucy Ann, contente de papoter ainsi avec une vieille connaissance. Pour elle qui avait subit un déracinement violent à la mort de son frère, retrouver quelques morceaux de son passé lui faisait toujours plaisir, même si elle ressentait toujours un vague pincement au cœur. Il y a des deuils qu’on ne digère jamais totalement.

Bon, maintenant était venu le temps d’attaquer le morceau déplaisant, mais pour lequel elle était tout de même venue. L’étudiante pris le soin de peser ses mots, il ne fallait pas que son discours fasse le moindre pli.

Et pour revenir à ce que tu disais sur mes recherches, tu ne me vexes pas le moins du monde, je doute fort qu’un membre de ma famille aie été un jour l’auteur de faits dignes d’être signalés dans les ouvrages historiques ! Je pense que le côté « cancre » a un petit quelque chose de génétique, fit-elle sur le plan de la plaisanterie afin de détendre l'atmosphère.

A vrai dire les histoires de filiation et de généalogie, ce n’est pas mon truc du tout, je ne sais même pas où chercher, c’est pour ça que je suis venue te voir. Tu vois, je vivais ma vie tranquillement, et du jour au lendemain on vient me casser les pieds avec des histoires de paperasse, comme quoi je dois apporter des pièces justificatives sur au moins deux générations ascendantes si je veux pouvoir être titularisée un jour, blablabla…
Qu’est ce que j’en sais moi, où trouver ces fichus papiers, s’ils sont gardés dans les archives de la bibliothèque, ou du ministère ou je ne sais quoi… Ma famille et moi tu sais, ça n’a jamais été très… Comment dire… Enfin on n’a jamais vraiment été très proches, si tu vois ce que je veux dire... fit-elle d'un ton maussade. Non, elle n'avait jamais eu de gros problèmes familiaux, si ce n'était cette querelle perpétuelle avec ses parents au sujet de la sorcellerie, qui s'accentuait d'années en années, à mesure qu'ils comprenaient que leur fille ne tournerait pas le dos à ce monde qui avait causé la perte de son frère... En quelque sorte, ce qu'elle racontait n'était pas si éloigné de la vérité.

Alors quand on m’a demandé de ressortir mon historique familial comme ça, de nulle part, ça m’a planté une sacrée épine dans le pied, et comme dans mes connaissances j’ai plus de médicomages et de naturalistes que de langues de plomb… Tu étais à mes yeux la femme de la situation ! Maintenant… Je ne comprends pas pourquoi ils m’enquiquinent avec ces pièces justificatives, si c’est aussi compliqué pour les obtenir que tu le dis… Peut-être qu’ils ne veulent pas de moi comme prof, et que c’est la seule méthode pour me jeter qu’ils ont trouvé ! fit-elle en souriant d’un air un peu mélancolique. C’était vrai au fond, c’était totalement injuste, pourquoi devrait-elle voir sa carrière compromise par ses origines, alors qu’elle avait toutes les compétences requises ?
Mais ce n’était pas le moment de se mettre à bouillir de l’intérieur, il fallait garder le self-control.

*Abysse, pense abysse…*

Enfin voilà, tu sais tout, je serais ravie que tu m’apportes ton aide, maintenant je ne voudrais pas te causer d’ennuis…
L’étudiante était sincère. Si elle était capable de faire des choses peu recommandables pour ses petites affaires, ce n’était pas son style d’embarquer les autres dans ses histoires. Si elle l’avait pour Manu en l’abandonnant l’année dernière, ce n’était certainement pas pour causer ce genre d’ennuis à Suzy-Lou qui semblait tant tenir à son brillant avenir…

En passe de devenir directrice. C’était peut-être trop dire. A vingt-deux ans, tout de même. Mais lorsqu’elle approcherait la trentaine, ou la quarantaine, ce sera sûrement possible. Si elle est encore vivante, bien évidemment. Oui, aujourd’hui, il était rare de pouvoir se projeter vers un avenir sûr et heureux.
Mais Lucy Ann n’avait pas à s’inquiéter, Suzie ne pourrait sûrement jamais s’ennuyer, surtout pas avec son activité de mangemort qui lui prenait bien plus de temps que prévu, mais que voulez vous.

Alors, comme la bibliothécaire l’avait si bien deviné, son amie était en étude de magicosoins. Mais plus penchée vers les créatures magiques. La brune sourit. Apparemment, tout allait bien pour tout le monde. Elle hocha la tête mais ne dit rien. Non pas que la question des loups-garous ne la tenait pas à cœur, mais elle ne se sentait pas du tout concerné par cette question, n’ayant pas du tout étudiait les créatures magiques. Soit.
La rouquine avait alors enchaîné sur son problème de papier. La concentration de Suzie redoubla. Si elle pouvait aider l’étudiante, ce serait tant mieux. Elle fronça alors doucement les sourcils, écoutant Lucy Ann parler de sa famille et de ses paperasses.

La mangemorte l’écouta attentivement, mais ne retint que des mots « clés », comme « du jour au lendemain ». Il est vrai, tout avait changé bien trop vite dans le monde des sorciers. Avec le Seigneur des Ténèbres, la mort du directeur de Poudlard et du Ministre. Suzie ne savait pas si l’étudiante se doutait de ce qui pouvait bien se passer derrière tous les articles de journaux. La prise de contrôle du Lord, etc… Même si l’historienne n’était pas une mangemorte haut gradée, elle savait bien des choses.

« Tu ne m’apporteras pas d’ennuis. »

** Mensonge. Les ennuis, Suzie, t'es en plein dedans ..**

C’était la stricte vérité. Elle s’apprêtait à aider quelqu’un sous prétexte qu’elle l’appréciait. C’était déjà trop, surtout à la bibliothèque. Mais bon, apparemment, ce bâtiment était là pour lui faire rappeler qui elle était réellement.
Un soir comme ça, elle avoue à Alix qu’elle est mangemorte. Un autre jour un mangemort vint lui demander de l’aide pour une recherche. Et voilà que cette fois-ci c’était elle qui mettait en avant son statut pour aider une étudiante. Bon, pas de quoi s’inquiéter, mais si Lucy Ann était une infiltrée, et bien elle était mal.
Oui, elle n’avait pas pensé à ça. Si Suzie, à ce moment même elle était espionnée, on cherchait à lui faire dire qu’elle était mangemorte pour l’emprisonner. Non, tout de même pas. Enfin, une amie de Poudlard n’oserait pas. C’est d’ailleurs à cet instant que la brune se mit à désirer les mangemorts sans cœur et sans pitié. Car oui, même si l’historienne était une partisante de Vous-Savez-Qui, elle avait un cœur et de l’amour à donner, surprenant oui.

La bibliothécaire baissa doucement la tête. Elle venait de comprendre pourquoi exactement ces problèmes de papiers existaient à présent. Et surtout, pourquoi ils existaient maintenant. Ainsi, Lucy Ann devait remplir toute cette paperasse pour…

« C’est pour vérifier la pureté de ton sang. »

Suzie avait dit ça d’une voix basse, elle ne savait si l’étudiante l’avait entendu, toujours est-il qu’elle venait de penser à voix haute, et c’était mauvais.

« .. Ce n’est pas parce que tu n’es pas qualifiée pour le poste tu sais. Ils veulent juste que… tu le sois réellement en prouvant que tu… enfin… il ne faut pas qu’il y … ait de moldus. Dans ta famille je parle. Deux générations au dessus de toi. »

Toujours d’une voix basse mais tout de même audible. Du moins pour Lucy Ann. Personne autour n’aurait pu entendre cela.
L’instant d’après, l’historienne regretta ses paroles. Elle savait ce qu’il se préparer pour les mois qui arrivaient. Elle en savait bien trop. Même elle, en tant que sang-mêlée, elle était peut-être menacée finalement, voire sa mère. Suzie ferma les yeux. Le Lord était en train de prendre le contrôle, or la jeune Lalys était entièrement de son côté. Non, elle ne pouvait pas sauver tous ses amis tout simplement parce que ce sont… ses amis. Alix, Lucy Ann. Bon, deux personnes pour le moment, ça allait encore. Mais il ne fallait absolument que la liste s’agrandisse d’avantage.

« Si… tu… peux prouver que les personnes de ta famille sont des sorciers, alors tu auras ton poste… dans le cas contraire… soit tu ne l’auras pas… soit… Enfin. »

A vrai dire, en ce mois de juillet, Suzie n’était pas capable de répondre totalement. Elle ne savait pas ce qui pourrait se passer pour les nés-moldus ensuite. Mis à mort ? Non, tout de même pas. Torturé ? Certainement. En tout cas, une chose est sûre. C’est qu’ils ne seront pas laissés tranquilles.
La bibliothécaire se fit alors intérieurement, la promesse de protéger Lucy Ann si sa famille se révélait pas si sorcière que ça. Parce que oui, ne les connaissant pas vraiment, l’étudiante aurait peut-être des surprises. Enfin, ça, Suzie l’ignorait complètement. Maintenant, si la rouquine était une sang-pur, une vraie, et bien, tout irait bien, il n’y avait pas de raison.

« Je t’emmènerais dans la salle des archives. Mais ne le dit à personne. »

C’est à ce moment-là que la brune releva la tête et fixa son interlocutrice. C’était une sorte de secret. Elle haussa son sourcil gauche, une sorte d’interrogation finalement.

L’étudiante sourit au ton avenant de son ex-camarade. Elle ne lui apporterait pas d’ennuis ? Parfait alors, tout se déroulerait pour le mieux dans le meilleur des mondes, elle aurait ses papiers sans trop de problèmes et…

Et la suite sonna à ses oreilles comme le bruit d’ongles que l’on fait crisser sur un tableau noir. Toujours cette foutue histoire de pureté du sang. Ainsi donc sa camarade pensait comme tous ces abrutis? Serpentard un jour, serpentard toujours, songea-t-elle amèrement. Elle était déçue, elle pensait que Suzy-Lou devait être différente, mais non, il ne faut jamais trop attendre des gens, on finit immanquablement déçue.

Malgré tout le self-control dont elle savait faire preuve, surtout lorsqu’on abordait le sujet délicat des sorciers nés-moldus, elle ne put s’empêcher de grincer, un sourire amer aux lèvres :
Alors selon toi, si jamais il s’avère qu’un de mes grands-parents était moldu, ça changerait radicalement ce que je suis ? De professeur compétent je serais immédiatement recalée à charlatan sans envergure ? C’est rassurant, de voir la valeur que l’on accorde au travail et à l’accomplissement personnel par rapport à de stupides histoires de filiations !

Elle se sentait doublement vexée, non seulement en tant que fille de moldus, qui avait du travailler aussi dur que les autres pour en arriver là où elle en était, mais aussi en tant que sœur, qui avait perdu son frère à cause de ce genre de considérations racistes. Elle n’essayait même pas de devenir un grand ponte des mangemorts, juste une humble aspirante professeur, et même pour ça elle allait se heurter, triste ironie du sort, à la même barrière que son jumeau. Ne restait plus qu’à espérer que les retombés soient moins dramatiques.

L’étudiante respira un grand coup, il fallait qu’elle se calme, envoyer la bibliothécaire sur les roses ne servirait à rien, pis, cela serait doublement idiot : non seulement elle perdrait son seul sauveconduit, mais en plus elle risquait de se dévoiler au grand jour. Très mauvaise idée.

Excuse-moi, je ne voulais pas me montrer désagréable, c’est juste que… Enfin mets-toi à ma place, tu aimerais que ton avenir tout entier soit suspendu à ce qui est marqué sur de vulgaires bouts de papiers ? Que tu sois condamnée à être considérée et jugée en fonction de ce qu’étaient des gens que tu n’as jamais connu ? Tu n’as pas idée de ce que ça peut être frustrant… fit-elle en jetant un regard dépité à Suzy-Lou, qui pour le coup était totalement sincère.

Elle s’adossa à une étagère, son regard toujours posé sur la brunette, avant de continuer :
C’est entendu, je ne le dirais à personne. Quelque soient mes origines, je ne suis pas assez bête pour nous faire courir le moindre risque inutilement, fit-elle en esquissant un sourire taquin, histoire de dédramatiser. Après tout, la jeune femme se donnait la peine de l’aider, elle allait même violer un règlement pour elle… Pouvait-elle vraiment lui en vouloir pour un mode de pensée qu’on lui avait sûrement instillé depuis toute petite ?

La bibliothécaire regarda autour d’elle, non, vraiment personne pour les entendre. Elle ne savait pas pourquoi elle désirait tant aider son amie. Parce que c’était elle qui lui avait fait prendre compte qu’elle n’aimait pas tellement les hommes que ça ? Quelque part oui, il y avait quelque chose comme ça. Mais aussi parce qu’elle comprenait plus que bien la frustration de la rouquine. Sa mère moldue lui avait obligée à faire semblant de haïr ses origines et avoir honte de son sang. Même si ce n’était pas totalement faux, Suzie aimait sa mère plus que tout. Et elle ne voulait en aucun cas que son sang lui empêche de mener sa fonction de mangemorte à bien. Bref, revenons à nos papiers.
Suzie regarda Lucy Ann s’énervait doucement. Elle comprenait ce qu’elle ressentait pourtant. Mais apparemment, l’étudiante était persuadée que la mangemorte était d’accord avec le fait de « punir » les nés-moldus. Ce qui n’était évidemment pas le cas. Mais la brune ne dit rien.
Elle regarda son amie d’un œil assez amère. Certes elle était une ancienne Serpentard, et aussi une mangemorte. Mais elle n’était pas forcément pour ce que le mal peut faire, bien au contraire.

La bibliothécaire sourit.

« Imbécile. Si je te dis tout ça ce n’est pas pour défendre mes idées ! C’est pour te prévenir de ce qu’il peut t’arriver. Je n’ai jamais été d’accord avec cela. Ton sang ne fait pas ta personnalité Lucy, tu le sais. Et moi aussi, d’autant plus que ma mère est moldue, je sais de quoi je parle quand même. Mais ne t’énerve pas sur moi. Tu feras ta rebelle plus tard, tu veux ? »

A vrai dire, Suzie ne pensait pas que les parents de la rouquine étaient des moldus, mais elle n’en savait rien, et ne pouvait donc pas s’orienter vers le sujet. Cela restait étrange quand même, une née-moldu à Serpentard ? Bref. L’historienne cligna des yeux plusieurs fois. Il fallait un moyen pour accéder aux archives rapidement, au moins pour vérifier les origines de son ancienne camarade.
La brune savait qu’elle était en train de fourrer dans les ennuis pire que jamais, si quelqu’un l’apprenait. Ce serait mauvais. De plus, elle savait qu’elle pouvait sauver le monde. Surtout depuis qu’elle était devenue mangemorte. Mais si quelques connaissances à elle pouvaient échapper au pouvoir absolu qui commençait à s’installer tout doucement, ce serait pas plus mal.

Elle secoua la tête une fois. Et regarda Lucy Ann. Non, elle n’avait pas l’air de quelqu’un élevé par des moldus, c’était le principal. Parce que si les deux jeunes filles se faisaient remarquer au ministère par des mangemorts, elles étaient mal, vraiment. Va falloir faire ça discrétos.

« Ecoute. Demain. On va se rendre à deux au ministère. T’as rien de prévu ? J’espère en tout cas. On se rejoint à onze heures près de la fontaine, tu vois ? Onze heures parce que c’est dans les environ de la pause. On entrera comme simples visiteuses dans la salle des archives. S’il s’avère que tu es une sang-pure, voire même une sang-mêlée, tout ira bien. Sinon… La tâche serait sûrement plus difficile. Falsifier des documents ce n’est pas réellement ma tasse de thé, mais soit, on improvisera. »

A son grand étonnement, la brune se surpris à sourire à la rouquine. Un peu de piment dans sa vie était finalement le bien venu. Oui, tout le monde a son côté aventurier. Et bien Suzie venait tout juste de le découvrir apparemment.

Le fait que la brunette la remette à sa place fit sourire Lucy Ann. Non pas qu’elle aimait qu’on lui parle rudement, mais elle avait l’impression d’être de retour plusieurs années en arrières, lorsqu’elle était une sale gosse intenable et Suzy-Lou une préfète exaspérée de la voir ainsi perdre les points qui avaient été si durement gagnés par la maison. Comme quoi, sous ses airs doux se cachait une vraie autoritaire.

Bien m’dame, s’cusez-moi m’dame, j’le r’ferais plus. Promis ! fit-elle en prenant des airs de gamine en pleine repentance.

Elle se sentait aussi touchée par la confession de sa camarade sur les origines de sa mère. Pendant toutes les années qu’elles avaient passé à Poudlard, elle ne l’avait jamais mentionné, et elle était sans doute la personne la mieux placée pour comprendre ses raisons de ne pas le faire.

Le plan énoncé par la bibliothécaire ne manqua pas de la surprendre. Elle l’avait toujours considérée comme quelqu’un de très à cheval sur le règlement, du genre à suivre le protocole à la virgule près, sans doute à cause de son statut de préfète. Et là, elle découvrait que la jeune femme était prête non seulement à prendre des risques en la faisant pénétrer dans un endroit auquel elle ne serait pas censée avoir accès, mais aussi, et plus surprenant encore, à falsifier des documents pour elle ?
Il lui semblait avoir manqué un épisode quelque part. Elle était venue ici uniquement dans le but de se renseigner, et la voilà maintenant avec un sésame pour la salle des archives, et une possible complice pour la fraude ?! Alors qu’elle n’avait même pas évoqué le sujet, la solution lui était quasiment servie sur un plateau d’argent ?
Gosh, c’était trop beau pour être vrai.

L’étudiante fixait sa futur complice, l’air incrédule
Heu, oui oui, onze heures, pas de problèmes, je serais là… Et heu… Merci pour tout, franchement je ne sais pas ce que j’aurais fait sans toi, ton aide m’est précieuse à un point que tu n’imagines pas je… Merci. Franchement, je ne sais pas comment je ferais pour t’être redevable mais je trouverais. Promis.

S’il y avait un Dieu quelque part, il devait avoir placé cet ange gardien sur sa route. Tout cela était trop soudain pour elle, tout lui était tombé dessus d’un coup pour qu’elle puisse tout analyser mais elle était sure d’une chose : elle avait de la chance. Et si Suzy-Lou s’avérait être une complice aussi prometteuse que ce qu’elle sous-entendait, il y avait des chances pour qu’elle érige une statue en son honneur, avec en prime sa reconnaissance éternelle et une gratitude sans borne.
Cependant, une petite voix dans la tête de l’étudiante faisait clignoter un warning : attention, il s’agissait d’une historienne, de quelqu’un dans la fonction publique et donc partiellement affiliée au ministère. Et s’il ne s’agissait que d’un vaste piège pour causer sa perte ? Un traquenard tendue à une pauvre sang-de-bourbe pour briller auprès de ses supérieurs et obtenir une promotion ?

Non, elle ne pouvait pas imaginer que quelque chose d’aussi moche pouvait se cacher derrière les yeux si doux et le joli sourire de sa camarade. Etait-ce sa faute si elle avait toujours eu tendance à flancher devant les jolies filles ?
Peu importe, le temps n’était pas au badinage, il fallait reprendre son sérieux. Elle était tout de même sur le point de jouer gros : soit elle perdait tout dans cette affaire, soit elle gagnait son passeport pour une vie de non pestiférée. Les enjeux n’étaient pas moindres.

Bon he bien… Je pense que j’ai assez embêté pour aujourd’hui, alors je vais te laisser tranquille jusqu’à demain, onze heures ?

Elle s’approcha de la bibliothécaire pour lui déposer une grosse bise sur la joue et lui glisser à l’oreille « Et encore merci ».

Se dirigeant ensuite vers le bout de l’allée pour sortir, elle se retourna au dernier moment pour lancer :
En fait, la plus rebelle des deux n’est pas celle qu’on croit ! Avant de se couvrir la bouche d’un air gêné devant le mauvais regard de certains lecteurs. Dans un tel lieu, le silence était de mise.

*Tu perds pas une occasion de te la fermer, décidément.*

Un dernier salut de la main, et Lucy Ann repartit d’où elle était venue, plongée dans un état de fébrilité certain quant à la suite des évènements.