Lynn avait investit la bibliothèque dès son ouverture. Installée dans un coin de la pièce, la jeune fille feuilletait un ouvrage parmi la tonne de livre eparpillés sur sa table.

Contrairement à la plupart des élèves qui fréquentaient ce lieu, Lynn n'avait pas un devoir particulièrement compliqué à rendre ou un exposé à préparer.

Non, Lynn faisait une recherche personnelle.
Depuis quelques temps sa vie ressemblait à un veritable champ de bataille. Elle se savait de moins en moins en sécurité alors que les jours passaient, la promesse de son frère aîné planant sur sa tête comme une épée de Damoclès. Elle se savait impuissante face à cela, mais rester inactive la rendait folle. Elle avait donc décidé de faire quelque chose, même si au final, cela ne l'aiderait probablement pas... Mais lorsqu'elle travaillait, au moins n'avait-elle pas l'impression d'être totalement inutile...

La jolie gryffondor s'était donc mise en tête de fabriquer une amulette de protection. Elle avait appris leur existance lors d'un cours très interessant de Sortilège. Elles se faisaient très rares car leur efficacité était limitées -voir inexistante- et qu'elles étaient particulièrement complexe à réaliser pour le résultat...

Néanmoins, cela n'avait pas découragé Lynn... L'illusion de ne pas attendre sagement qu'on vienne lui voler sa vie était tout ce qu'elle demandait... agir, même en vain, était quelque peu rassurant...

Cela faisait donc déjà plusieurs jours que Lynn mettait au point la liste des choses dont elle aurait besoin. La formule n'était pas très compliqué et elle avait déjà obtenu les deux cercles de bois taillés et incrusté chacun d'une pierre dont elle se servirait... Non, la partie la plus perilleuse residait dans la confection d'une potion de laquelle devrait être imbibés les deux amulettes.

La rouge et or referma le dernier livre et rangea ses affaires, enfouissant le morceau de parchemin qui contenait sa liste dans une poche. Maintenant arrivait le moment le plus compliqué... la liste des ingrédients était assez conséquente, et la majorité ne se trouvaient pas dans l'habituel kit de potion des élèves... Lynn allait donc devoir se servir dans la reserve personnelle de Rogue...

Elle avait attendu l'heure du repas et s'était dirigée vers les cachots alors que ses camarades se ruaient dans la grande salle. Le plan était simple. Pénétrer dans la salle de potion -elle y avait laissé son livre comme excuse si quelqu'un venait à la trouver- et fouiller dans l'amoire à ingrédients.

Maintenant, il fallait simplement esperer qu'elle ne croiserait personne...

Alors qu'elle arrivait dans le couloir qui menait à la salle de potion, elle entendit du bruit et se figea. Quelqu'un était en train de... chanter ?

Lynn fronça les sourcils et ralentit. Elle se cacha derrière une armure qui gardait l'intersection du couloir et se pencha pour mieux voir. Mais Peeves choisit cet instant précis pour faire son entrée et lancer un pétard, faisant un vacarme de tous les diables.

"Lynnette la crevette a choisit une mauvaise cachette ! Cours cours petite fillette, ou peeves viendra te tirer les couettes !"

La suite étant bien plus grossière, Lynn lui lança un regard meurtrier et sortit sa baguette mais le fantôme avait déjà disparu.

La jeune fille soupira et entendit quelqu'un demander qui était là.

Elle s'avança vers la voix et reconnu la blondinette. Elle ne la connaissait pas personnellement, mais il lui semblait qu'elle jouait au Quidditch... pour les Serdaigles visiblement...

- Je m'appelle Lynn... se présenta-t-elle devant l'air un peu effrayé de la fillette. Désolée de t'avoir fait peur...

Elle haussa les épaules, légèrement embarassée et ajouta:

- Je ne m'attendais pas à trouver quelqu'un ici... je pensais que tout le monde était à la grande salle...

D'ailleurs que faisait-elle là ? Elle avait l'air d'avoir été sur le point de pleurer... Peut-être avait-elle été malmené par un serpent ? Ou bien s'était-elle perdue comme cela était souvent arrivé à Lynn ?

- Tu as besoin d'aide ? Demanda-t-elle à tout hasard.

[Bon mea culpa c'est nul XD]

*C’est quoi ce délire, c’est quoi ce délire, c’est quoi ce d….*

Emilien fut interrompu dans ses pensées par la vision d’une chaussure qui traînait sur sa table de nuit. Perplexe, il tendit sa main vers l’objet en question, qu’il examina rapidement. Ah, non, ce n’était certainement pas la sienne. De toute façon, ce n’était pas sa pointure. Il était fréquent de retrouver des objets appartenant à quelqu’un d’autre dans ses affaires, dans le dortoir des deuxième année, mais Emilien devait avouer que c’était la première fois qu’une chaussure venait à se trouver sur sa table. S’il avait été d’une meilleure humeur, peut-être aurait-il approfondi la question du pourquoi et comment la chaussure avait pu se retrouver là, peut-être même aurait-il cherché à connaître le propriétaire. Mais là, dans le dortoir vide, il n’avait qu’une envie, c’était d’envoyer tout balader.

- Ils peuvent pas ranger leurs affaires, non !

Et il balança la chaussure à l’autre bout de la pièce, avant d’en revenir à ce qui le préoccupait, en ce début d’après-midi. Cela faisait bien une heure qu’il était allongé sur son lit, sur le ventre, la tête posée sur ses bras croisés. La veille au soir, il avait reçu une nouvelle lettre de sa mère – pas une beuglante, fort heureusement – mais il ne l’avait ouverte que ce matin, à son réveil. Après un bon quart d’heure passé à essayer de comprendre le contenu – le fait qu’il n’ait pas été très bien réveillé avait dû jouer un peu – Emilien était parti faire un tour. Histoire de se calmer un peu, d’essayer de réfléchir. Ça n’avait pas très bien marché, il faut le croire. D’un autre côté, était-ce de sa faute si sa mère ne comprenait rien à rien ? Il n’avait pas envie de la revoir ! Certes, pour approcher son frère, il n’aurait pas le choix, mais … Pas déjà ! Pas si tôt ! Car la mère du Serpentard lui demandait de revenir pour les vacances de Noël. Emilien hésitait fortement, à vrai dire : s’il allait en Italie pour la fin du mois de décembre, il verrait son frère, passerait Noël « en famille ». Mais … Si jamais sa mère refusait qu’il reparte ? Etait-ce possible ? Serait-elle capable de l’empêcher de retourner à Poudlard ? Dans ce cas, le directeur interviendrait, non ? Elle n’avait pas le droit de faire ça. A force de réfléchir, Emilien s’était rassuré intérieurement.

Peut-être était-il temps de mettre le nez dehors ? Le repas devait être presque fini, dans la Grande Salle, s’il voulait réellement manger, c’était le moment ou jamais ! Il n’était pas sûr d’avoir faim, de toute façon. Bon, il n’allait pas passer la journée dans le dortoir, surtout que ni Samael ni Isaac n’étaient là, autant partir à la recherche de quelque connaissance … Au pire il irait dehors. C’était ce qu’il se disait, jusqu’à ce qu’il sorte de la salle commune. On avait beau être dans les cachots, on entendait déjà le martèlement de la pluie, au-dehors. Mieux valait rester à l’intérieur, tout compte fait.

Emilien avançait donc dans les cachots, songeur. La lettre de sa mère n’était pas claire. « Quelqu’un viendra te chercher à la gare. » Elle lui donnait ensuite un nom qui lui était totalement inconnu. Une vague description d’un grand type brun. Bref, elle lui demandait de faire confiance au premier venu, ou quoi ? Le Serpentard releva brusquement la tête : il ne reconnaissait pas cette partie des cachots. Autant le côté de la salle commune, du cours de potions, ça oui, il connaissait par cœur. Mais là … Il se rappela le jour où il s’y était perdu, avec Mariana. Parce qu’en sortant de la volière, Rusard les avait pris pour des élèves qu’il poursuivait juste avant, alors ils avaient couru, Mariana avait mordu le concierge, et ils avaient pris un passage secret. Malheureusement, ils avaient eu quelques … problèmes … et s’étaient retrouvés dans une partie étrange des cachots. Impossible de savoir exactement où. Finalement, ils s’en étaient sortis, bien sûr, mais pas sans peine. Sains et saufs, ou presque. Emilien s’était juré de ne plus jamais avoir affaire à la Gryffondor jusqu’à la fin de sa scolarité, ce qui avait bien entendu échoué …

Tiens, des voix ! On parlait, un peu plus loin devant, après l’angle sûrement. Emilien n’entendit que la fin d’une phrase, mais il connaissait cette voix. C’était notre ami Porthos ! Ou Sammy. Au choix. Emilien arriva alors juste derrière deux filles, qui étaient tournées vers Samael, de l’autre côté. Comme si elles n’étaient absolument pas présentes, Emilien s’adressa à son condisciple :

- Ah, Sam, tu tombes bien, j’voulais te poser une question. Tu sais qui est-ce qui part pour les vacances de Noël ? J’ai pas envie de me …

… retrouver tout seul dans le train. Mais il avait reconnu l’une des deux filles, celle aux cheveux blond clair, qui n’était autre que Lucy ! Que faisait-elle dans les cachots, un jour où il n’y avait pas cours, et donc rien à faire dans ce coin, pour une Serdaigle ? Quant à l’autre, il l’avait peut-être déjà vue. Elle n’avait pas l’air beaucoup plus âgée. S’il avait jamais connu son nom, il lui échappait totalement. Emilien n’aimait pas vraiment la position dans laquelle il se trouvait … Faire un choix entre ses amis de Serpentard et les autres n’avait jamais été prévu au programme. Bien sûr, personne ne lui parlait de faire un choix, dans la situation présente. Mais il l’avait entendu, Samael, il avait entendu sa façon de parler aux deux filles. Pour le moment, il n’avait pas encore trop à réfléchir.

- Tiens, Lucy, ça va ?

C'était le craquement du pétard qui avait fait faire un bond de quinze mètres à Lucy, mais elle avait été tellement surprise... Son coeur battait à cent mille à l'heure, comme celui d'un lapin qu'on aurait oublié dans un confessional pendant toute une journée. Elle inspira une grande bouffée d'air afin de se calmer. Un peu de sang-froid que diable ! Lorsqu'elle se retourna, une Gryffondor d'environ un ans plus âgé qu'elle lui faisait face. A ce stade, elle avait le choix. Ne connaissant qu'une seule Rouge et Or en troisième année, elle ne pouvait que se demander si le cas de Mariana était généralisé à tout ses camarades. Donc elle pouvait s'enfuir en courant avant qu'un mur ne lui tombe sur la tête, où la laisser lui venir en aide. L'Aiglonne nageait en plein dilemne. Il fallait dire qu'elle n'avait cette fois, pas l'humeur de se faire traiter de shtroumph, et de finir morte à trouver un moyen de sortir du couloir de la mort.

Ce fut l'instant que choisit la Lionne pour se présenter. Lynn... LYNN BOWER ?!! La Serdaigle avait entendu parler de la famille Bower, ses parents en parlaient comme l'une des pires qui ait jamais existée. Personne ne pouvait véritablement les accuser de pratiquer la magie noire et d'être mangemorts, semblables à la famille Malefoy, ils savient protéger leurs secrets... et leurs relations. Mais il n'y avait pas qu'au-dehors de Poudlard qu'on entendait prononcer ce nom. Notre blondinette avait déjà croisé Aïlin dans la salle commune des Bleus et Bronzes. Il n'avait pas l'air agressif ou méchant, mais semblait particulièrement renfermé la dernière fois qu'elle l'avait vu. Quant à Lynn, on disait qu'elle avait fui le domicile familial. Autrement dit, la connaître ne pouvait que lui attirer des ennuis. Lucy eut un grand sourire. Il semblait qu'elle-même, ne puisse s'éloigner longtemps de la malchance. Tant pis. Au moins, la vie était plus surprenante ainsi !

- Et moi c'est Lucy, répondit-elle, avant d'ajouter; c'est rien, c'est juste que c'était tellement silencieux qu'entendre tout ce bruit d'un coup m'a surpris.

Lynn expliqua qu'elle ne s'attendait pas à trouver quelqu'un à cette heure de la journée. Généralement, tout le monde était dans la Grande Salle... A qui le disait-elle ! Quitte à être perdue, notre Minipousse aurait préféré l'être dans un autre endroit que dans l'endroit le plus glauque du chateau. Elle n'avait rien contre les rats et les souris, se moquait bien des chauves-souris, et ne craignait aucune araignée tant qu'elle ne tentait pas de l'escalader. Mais ce silence, cette atmosphère humide... D'ordinaire, elle aurait été loin de se décourager si vite. Elle aurait du dormir cette nuit. Dès qu'elle manquait de sommeil, elle était d'une humeur boudeuse et déprimait lorsqu'elle était seule dans son coin. Heureusement pour elle, la présence de la Rouge et Or lui donnait un regain d'entrain et de bonne humeur. La deuxième année haussa les épaules avec un air d'indifférence total. Ne surtout pas montrer à quel point elle aurait voulu être en haut, dans un endroit avec tout plein de vies humaines. Une c'était déjà tellement bien !

- Ah bah ça, l'appel du ventre... vers midi c'est plus la Grande Salle c'est la jungle, constata-t-elle avec un sourire.

L'image d'une Big Mama enfournant un sandwich dans sa bouche par une belle nuit, dans la tour d'astronomie venait de lui revenir en tête. A cet instant, elle devait être en train de se goinfrer à la table des Gryffondor. Un des aspects attachants d'Obé était de la voir se précipiter sur tout ce qui se mangeait avec un enthousiasme que rien ne semblait pouvoir freiner.
Lynn lui demanda si elle avait besoin d'aide. Oh. Ca se voyait tellement ? Lucy s'apprêtait à déclarer d'un ton piteux "Me suis perdue. Encore", quant un Serpentard surgit brusquement. Il demanda avec un sourire légèrement moqueur si elles cherchaient à se tirer du labyrinthe que formaient les cachots, ou bien à dénicher sa salle commune. Maintenant, il était hors de question qu'elle avoue quoi que ce soit. Le Serpy serait trop heureux. Elle n'avait rien non plus contre les Serpents, mais ne supportait pas de se faire mordre par ces derniers.

- C'est toi qu'on cherchait bien sûr, quoi d'autre ?! répondit-elle du tac-au-tac, sur le même ton, avec un sourire éclatant.

A nouveau, quelqu'un intervint. Une voix, qu'elle identifia vite comme celle d'Emilien s'adressa à l'autre Serpentard. Il semblait faire comme si elles n'existaient pas. L'Aiglonne ignora cette attitude. Elle savait parfaitement à quel point son ami pouvait être très agréable par moments. Lorsqu'un éclair de compréhension passa sur se visage au moment où il la reconnut, il parut mal à l'aise. Pourquoi, ça c'était un mystère. Mais il finit par la saluer, comme quoi, tout finit par arriver. Il lui demandait même comment ça allait. Malgré tout, Pinpin ne fit pas de leçon de politesse à Milou. D'abord parce qu'elle n'avait pas que ça à faire, ensuite parce qu'elle savait que ça ne servirait strictement à rien.

- Super, et toi ? J'te présente Lynn... Lynn, Emilien.

Lucy tourna son regard vers le dénommé "Sam".

- Eh, tu nous présentes pas ton ami ? dit-elle avec un nouveau petit sourire, sans lâcher ce dernier des yeux.

La jeune fille sembla tiquer lorsque Lynn se présenta et la jolie lionne comprit que la blondinette avait fait l'association au nom Bower.

Pour ce qu'elle en savait, la plupart des familles sorcière connaissaient son Père. Il était influent et bien qu'il sache se montrer particulièrement courtois et gentleman, beaucoup spéculaient -à juste titre- sur son appartenance aux serviteurs du Seigneur des Ténèbres. Le fait d'avoir épousé un moldue lui avait fait bénéficier d'une certaine immunité mais à présent que Bronach était morte et qu'il était en passe de devenir Ministère du Contrôle et de la Régulation des Créatures Magiques, il revenait sur le devant de la scène.

Ou alors, ce qui était tout aussi bien possible, la serdaigle avait un jour croisé le chemin d'Ultan, ou plus probablement d'Aïlin puisqu'ils fréquentaient la même maison. Quelle qu'en soit la raison, vu le comportement parfois violent du premier, et celui quelque peu lunatique du second, Lynn comprenait parfaitement qu'on ne veuille pas se frotter de trop près à elle.
Cependant, la jeune fille sourit et se présenta à son tour. Lorsque Lynn s'excusa et lui expliqua qu'elle ne pensait trouver personne, Lucy, puisque tel était son nom, eut l'air compréhensive en arguant qu'à cette heure-ci le réfectoire devait ressembler à un champ de bataille.

Lynn se mit à rire et acquiesça. Il suffisait de voir certains spécimens de Gryffondor pour savoir qu'il valait mieux ne pas laisser traîner sa main trop près d'un plat, au risque de se retrouver avec une fourchette plantée dans la peau !

Compatissante, devant l'air quelque peu perdu de la bleu et bronze, Lynn lui demanda si elle avait besoin d'aide, mais avant qu'elle n'ait pu obtenir une réponse, une voix de garçon s'éleva. La gryffondor tourna la tête pour apercevoir un Serpentard trempé de la tête au pied.

La jolie lionne allait répondre quelque chose mais Lucy fut plus rapide. Lynn leva les yeux au ciel, un sourire à la fois amusé et exaspéré sur les lèvres. Elle s'était beaucoup perdue autrefois dans les cachots, mais cette époque était révolue. Elle savait exactement où elle était et comment s’en sortir. Néanmoins il valait mieux que la raison de sa présence ici reste secrète. Et dire qu'elle avait espéré pouvoir être tranquille pendant l'heure du déjeuner et qu'après une aiglonne égarée, elle rencontrait un serpent illuminé. Quant à la salle commune des vert et argent, si elle ignorait le mot de passe pour y pénétrer, elle en connaissait l’entrée. C’était l’un des endroits qu’elle évitait soigneusement afin de ne pas risquer de croiser son frère ou l’une de ses charmantes vipères qui finissaient toujours par lui attirer des ennuis. Il suffisait d’entendre le ton suffisant sur lequel l’écailleux leur avait parlé. Pourquoi, par Merlin, se sentaient-ils toujours supérieur ? C’était d’un exaspérant !

- Vu l’état dans lequel tu es, je ne crois pas que tu sois en position de te vanter. Fit remarquer Lynn en observant d’un œil critique les vêtements dégoulinant d’eau du Serpent.

Alors qu’elle s’apprêtait à prendre congé de cet énergumène, quelqu’un arriva derrière elles et s’adressa au vert et argent trempé, comme si les deux jeunes filles n’étaient pas là.

Il s’interrompit, semblant enfin les remarquer et salua la blondinette qui lui rendit son bonjour et la présenta à Lynn. Lynn n’arrivait pas à croire à sa malchance. Comment pouvait-elle croiser autant de monde dans ce coin des cachots, à cette heure-ci, un samedi ? C’était totalement injuste !

Alors que Lucy demandait à ce qu’Emilien lui présente la quatrième inconnue de leur équation, Lynn se rendit compte qu’elle avait toujours sa baguette à la main.
Elle regarda le garçon mouillé et soupira. A cette allure, ca allait durer des heures et il devait être frigorifié. Elle était vraiment trop gentille :

- C’est ton jour de chance. Dit-elle en pointant sa baguette sur lui. Caldoventis !

Une bourrasque de vent chaud entoura le Serpentard pendant quelques instants et lorsque Lynn abaissa sa baguette, il était presque entièrement sec, seules quelques gouttes s’échappant encore de ses cheveux. La gryffondor eut l’air satisfaite. C’était la première fois qu’elle réutilisait ce sort depuis que Kael le lui avait appris et le résultat était plus que convenable, d’autant plus qu’il n’était pas au programme des troisièmes années. Même si elle aurait préféré l’utiliser sur quelqu’un d’autre, il ne fallait négliger aucune occasion de s’entraîner.

Toutes mes excuses pour ce retard...

« Quand on me cherche, on me trouve. »Répondit-il immédiatement à la Blonde avec un sourire faussement aimable, jouant sur les mots.

Et alors que Samaël abordait des plus poliment les deux demoiselles qui se baladaient dans les couloirs, Athos arriva, devant lui, et, ignorant les deux autres, lui demanda s’il savait lesquels de leurs condisciples prenaient le train. Il fut cependant coupé dans son élan alors qu’il reconnaissait une des deux jeunes filles, et la salua. Sans relever le fait qu’ils se connaissent, Samaël répondit à son camarade de dortoir comme s’il ne s’était pas interrompu.

« Désolé, je n’en sais pas plus que toi. Moi, je reste ici. »Dit-il, joyeusement, ignorant royalement les deux jeunes filles peu appréciatives de son aimable arrivée et qui le lui avait bien fait comprendre par quelque réplique.

Le Vert et Argent était en effet des plus ravi de passer noël ici plutôt que dans cet endroit tristement moldu où il aurait dû se priver de l’usage de la magie pour deux longue semaines. Il en avait fait l’expérience durant les grandes vacances, et, après avoir gouté au pouvoir de la magie, quand bien même on avait vécu onze années sans même soupçonner son existence, il était difficile de voir s’en passer, de ne pouvoir en discuter avec personne. De se comporter comme un véritable moldu, en fait.

La petite Bonde de Serdaigle leur présenta, ou plutôt présenta à Emilien, l’autre demoiselle répondant au nom de Lynn, que Samaël ne connaissait qu’assez pour lui associer le nom de famille de Bower et la maison de Griffondor. Ce nom lui disait cependant autre chose, certain de l’avoir entend dans un autre contexte que celui concernant la demoiselle Rouge et Or. N’y avait-il pas, dans leur noble maison de psychopathes, un aîné qui répondait à ce même nom ? Etait-ce un frère ou cousin ? Le Vert et Argent, naïvement peut-être, penchait plus pour le lien de cousin puisqu’il lui semblait étrange que deux frère et sœur puissent être si diffèrent qu’ils soient répartis dans des maisons opposées, ennemis de surcroit. La dite Lucy réclama ensuite à Athos le prénom du Vert et Argent, et avant qu’Emilien puisse répondre, Samaël prit la parole.

« Je suis encore capable de me présenter moi-même, si tu n’y vois pas d’inconvénient. »Fixant à son tour la demoiselle, sans gêne aucune. « Je m’appelle Samaël Läus, Serpentard de deuxième année. »

Un fin sourire étira alors ses lèvres, comme si rien ne pouvait lui faire plus plaisir que cette rencontre importune, trempé comme il l’était, alors que ses yeux brillaient d’un tout autre sentiment. D’habitude méfiant, le fait de s’être laissé surprendre par la pluie l’avait rendu maussade et d’humeur plus associable encore, comme les deux jeunes filles l’avaient pu constater. Un frisson lui traversa le dos, suivant de près le chemin de sa colonne vertébrale, tirant au Vert et Argent une discrète grimace agacée, qui ne dut pas passer inaperçue aux yeux de la griffondor puisqu’elle pointa sa baguette vers lui. Son premier reflexe fut de reculer d’un pas, comme si cela pouvait le protéger, et avant qu’il ne pense à fouiller dans sa poche pour retrouver sa baguette, Lynn avait dé jà lancé son sort. Mais il ne s’agissait ni d’un sort mortel, ni d’un enchantement douloureux qui l’aurait mené à l’agonie – en temps que Serpentard, Sam pouvait avoir un gout prononcé pour la dramatisation – mais d’un vent chaud qui l’enveloppa l’espace de quelques secondes pour ne disparaitre que lorsqu’il fut complètement sec. Ou presque.

Seules quelques gouttes d’eau maintenant tiède s’accrochaient encore à ses cheveux sombres, tombant devant le visage étonné du garçon. Merveilleux et pratique sort que celui-ci ! Il fallait qu’il l’apprenne ! Qu’avait-elle dit déjà ? Calmovendis ? Quelque chose du genre, pensait-il. Samaël effaça ensuite son air étonné pour adresser à la demoiselle un discret sourire de remerciement, accompagné d’un signe imperceptible de la tête.

« Je n’aurais pas dit cela comme ça » Argua-t-il, en réponse à la réplique de la demoiselle sur son jour de chance, puis plus sobrement : « Mais je te remercie. »

Le fait de s’être si rapidement réchauffé avait légèrement influencé son humeur, et s’il n’irait pas sauter dans les bras de la Griffondor en guise de remerciement, merci Merlin, même d’humeur charmante, ce ne serait jamais quelque chose qui lui viendrait à l’idée, le Vert et Argent s’était imperceptiblement détendu, alors qu’il se tournanit vers son camarade Mousquetaire, reprenant très naturellement le fil de leur conversation à peine entamée, comme si rien ne les avait interrompu.

« Tu restes aussi à Poudlard, ou bien rentres-tu chez toi ? »

Samaël ne savait ce qu’était le « chez lui » d’Emilien, les vacances qu’il prévoyait peut-être, ses relations familiales… Les Trois Mousquetaires avaient toujours fait preuve d’une immense discrétion entre à ce sujet là, comme si cela n’avait aucune importance.

Pourquoi ce malaise alors qu’il se retrouvait à la fois face à Lucy, et face à Samael ? C’était à cause d’une discussion récente entre les trois mousquetaires [certes qui n’a pas encore eu lieu, mais ça va pas tarder normalement] pendant laquelle Emilien avait été trop catégorique, alors qu’on parlait de Lucy. Sur le moment, ça lui avait paru évident … Depuis, il s’était surpris à penser qu’il aurait pu accepter. Surtout quand il se retrouvait en cours avec les autres Serpentard, et que son amie était là aussi, qu’elle prenait la parole, qu’elle se faisait remarquer d’une façon ou d’une autre. Dans ces moments-là, tout ce qu’il souhaitait, c’était qu’on ne lui pose pas de question. Qu’on ne lui demande pas pourquoi c’était son amie, pourquoi il avait refusé, mais Isaac et Samael n’étaient pas de ce genre, n’est-ce pas ? Emilien jeta un coup d’œil à Porthos. Qu’il ne fasse aucun commentaire à ce sujet, par pitié. Est-ce que ça voulait dire que quelque part, il avait honte d’être ami avec Lucy ? Parfois, il se le demandait. Avait-il de quoi avoir honte ? Ce n’était pas comme si Lucy avait été à Poufsouffle, Serdaigle était sans doute la seule maison considérée comme « acceptable » par les Serpentard, et pourtant … Si lui savait pertinemment que son amie n’était pas bête, ce n’était pas toujours ce qu’on pouvait penser en la voyant.

Samael lui répondit qu’il ne savait pas qui partait pour les vacances, et que pour sa part, il restait à Poudlard. Il en avait l’air plutôt heureux, fait qui tendait à confirmer l’hypothèse d’Emilien selon laquelle Porthos avait une famille moldue. D’un autre côté, on pouvait être heureux de rester au château même en ayant une famille sorcière, il suffit que la famille soit désagréable, comme celle d’Emilien l’était en première année. Cette fois, il rentrait à la « maison ». Quoi qu’il arrive, sa mère ne l’empêcherait pas de revenir à Poudlard, elle n’en avait pas les moyens. Pensif, Emilien répondit :

- Bon, je demanderai à Isaac, il en saura peut-être plus …

Isaac, le dernier élément du trio, le troisième mousquetaire. Emilien n’avait aucune envie de passer tout le voyage de Poudlard à Londres seul dans le train, à ressasser des pensées moroses, l’œil fixé sur un paysage pas beaucoup plus joyeux. L’idée de revoir son frère n’aiderait pas. Isolé, il ne pourrait rien faire pour chasser ses idées pessimistes qui lui pourriraient la moitié de la journée. Sans parler du stress. En effet sa mère lui avait précisé que ce ne serait pas elle, qui viendrait le chercher à la gare, mais un cousin éloigné, qu’Emilien n’avait jamais vu. Comment le reconnaîtrait-il ? Il allait prendre l’avion avec un inconnu ? Emilien espérait qu’il ne serait pas à King’s Cross avec une pancarte énorme du genre « Hello Emilien ! » parce que sinon, il se sentait capable de l’ignorer et d’aller se promener dans Londres tout seul …

Emilien n’avait pas spécialement eu l’impression de faire une gaffe lorsqu’il s’était rendu compte que la fille aux cheveux blonds était Lucy. Après tout, elle lui tournait le dos, et n’était pas la seule blonde de l’école ! Aussi n’aurait-il pas compris, si elle lui en avait voulu. Oui, il lui était déjà arrivé de l’ignorer, mais c’était pour une raison précise, or il n’en avait pas, à l’instant. Certes, l’année précédente, il l’avait ignorée un matin, alors qu’ils sortaient de la Grande Salle. Mais c’était particulier … Premièrement, Lucy venait de faire la même chose, pour courir après Michel, en plus ! Qui lui aussi avait ignoré la Serdaigle, en passant, et prétendait dans son sujet avec Liliana que cette dernière était la première personne intéressante qu’il rencontrait à Poudlard. A la place de Lucy, Emilien aurait été horriblement vexé, mais bien entendu, elle n’en saurait jamais rien. Quel dommage … Bon et en plus, il s’était excusé, pour la scène de l’année précédente. Il restait le problème du début de la deuxième année, période pendant laquelle il n’avait pas été franchement sympathique, avec tout le monde d’ailleurs, sauf … Isaac et Samael. Les seuls qu’il avait pu supporter. Parce qu’ils étaient les seuls à ne jamais lui poser de question sur sa famille, c’était un sujet qu’on abordait jamais parmi les mousquetaires. Lucy lui avait répondu qu’elle allait bien, lui retournait sa question, tout naturellement.

- Bien, très bien.

Puis elle lui demanda de lui présenter son ami. Là encore, Emilien aurait hésité si Samael n’avait pas pris la parole, prétendant qu’il pouvait encore se présenter tout seul. Alors que l’année passée, il avait méprisé une partie des Serpentard et des caractéristiques de sa maison, l’avait – presque – clamé haut et fort – en tout cas Lucy le savait – voilà qu’à présent, il passait plus de temps avec deux de ses camarades de dortoirs, qu’avec ses autres amis ? Il se rappelait le jour de sa première dispute avec Lucy, à Noël. « Et pour ne rien arranger, il est à Serpentard. » En réalité, Michel n’avait absolument rien à faire dans cette maison, il aurait mieux été à Poufsouffle, si cette maison en avait voulu. Le Choixpeau devait parfois avoir vraiment du mal à prendre ses décisions … Voyons, à quelle maison vais-je infliger une telle douleur ? Ça devait changer selon les années. Cette fois c’était tombé sur Serpentard, pas de chance.

Lynn, la fille que Lucy lui avait brièvement présentée – Emilien l’avait déjà vue, elle était à Gryffondor en troisième année … et donc camarade de dortoir de Mariana ! Il n’osait pas imaginer les catastrophes qui devaient se produire chaque jour – pointa sa baguette vers Samael pour lancer un sortilège qui sécha presque complètement le Serpentard. Alors qu’Emilien se demandait pourquoi elle l’avait fait – la pure gentillesse ? Il ne connaissait pas – et que Samael l’avait tout juste remrciée, ce dernier lui demanda ce qu’il faisait pour les vacances. S’il rentrait chez lui. Emilien pouvait se contenter d’un « Je vais passer Noël avec ma famille », ça aurait largement suffi, avec ses amis de Serpentard. Mais il ne voulait pas prendre le risque que Lucy demande des détails, elle qui connaissait sa situation familiale mieux que personne, au château. Comment le lui faire comprendre ? Emilien pouvait toujours compter sur sa capacité à raisonner logiquement, mais … Bah, de toute façon, il y en aurait, des questions ! Peut-être pas tout de suite, peut-être pas devant les deux autres élèves, mais il y en aurait. Après la discussion qu’ils avaient eue dans la salle de bains, c’était obligé. Il répondit donc à Samael avec une nonchalance appliquée :

- Non je reste pas, je pars dans ma famille, en Italie. Après tout, Noël est une fête familiale …