It's Pancake Day ! [James]

« Le maître souhaite-t-il une nouvelle tasse de café ? » proposa respectueusement une petite créature au long nez crochu.

Le maître en question hocha la tête affirmativement, sans prendre la peine de regarder l'insignifiant domestique, qui s'exécuta pourtant immédiatement après s'être incliné, sans s'offusquer de la manière dont il avait été ignoré ; il était habitué, forcément. Xenophius avait continué son petit-déjeuner, tout en lisant un tract du Ministère de la Magie qu'il avait découvert la veille sur son bureau : un tissu d'inepties ! Cette stupide idée de vouloir lever la loi sur le secret magique mettait le directeur de la coopération magique hors de lui. Agacé, il déchira le tract en plusieurs morceaux et les jeta sur le côté. Il planta alors avec colère sa fourchette dans son pancake, tout en balançant la tête avec consternation. Ce pays fonçait droit vers la catastrophe sous la direction de Shacklebolt, et Xenophius comptait à présent sur les pays étrangers, et espérait qu'ils seraient plus intelligents.

Des éclats de voix retentissant dans le hall d'entrée captèrent l'attention de l'illustre sorcier, qui figea l'espace de quelques secondes son regard vers la porte fenêtre. En peu de temps, il reconnut le propriétaire de cette voix si familière. Xenophius resta toutefois assis à sa table, laissant aux elfes le soin de guider James dans le petit salon, comme d'habitude.

La porte s'ouvrit doucement, laissant apparaître le minuscule elfe chargé d'un plateau d'argent, suivit de près par Alix et James. Xenophius arqua un sourcil étonné lorsqu'il vit son frère, mais il continua son petit-déjeuner, invitant d'un geste de la main ses deux convives à s'installer avec lui. Passant outre les formules de politesse, il interrogea immédiatement son frère aîné du regard. Alix jeta un regard en biais au jeune Kirkby, puis se lança finalement :

« Tu ne devrais pas être ici Xenophius. Tu devrais être à son chevet, auprès d'elle. »

Le regard de l'aîné des seigneurs McGregor était dur, et Xenophius y lisait clairement tous les reproches qu'il brûlait d'envie de lui cracher. Mais Alix était un homme trop digne, qui avait une bien trop haute estime de l'honneur pour ne serait-ce qu'envisager injurier devant quelqu'un son frère. Pourtant, et le maître des lieux le savait fort bien, son frère avait une furieuse envie de l'accuser de tous les maux des cette famille, de lui reprocher l'état de Megan... Et comme à son habitude, lorsqu'il était ainsi mis au pied du mur, Xenophius ignorait son frère. Il demeura silencieux, et s'empara enfin de la tasse de café que l'elfe portait sur son plateau. Il la posa délicatement devant lui, et se mit à remuer doucement son café, après y avoir fait glisser deux carrés de sucre. Il sucrait toujours son café lorsqu'il était énervé.

« J'espère sincèrement que tu n'auras pas à regretter le temps que tu aurais pu passer à ses côtés, mais que tu as préféré passer avec tes affaires... Pas pour toi, mais pour elle. »

Même s'il se contrôlait, il n'était pas difficile de deviner la fureur de Alix, lorsque ce dernier se leva sèchement, et se dirigea vers la porte, après avoir adressé un regard méprisant à son cadet. Xenophius mangeait toujours d'ailleurs, lorsque l'autre sorcier claqua la porte. D'un ton tout naturel, il suggéra à son filleul :

« Des pancakes ? Ils sont délicieux ! Sers-toi mon garçon -il poussa vers James le plat dans lequel ils se trouvaient- Hermès ? Va donc chercher une tasse à café pour James. »

Xenophius se doutait bien que James savait de quoi son frère voulait parler. Au manoir, tout le monde en parlait. L'état presque mourant de Megan était le sujet de discussion principal chez les McGregor, et tous avaient des avis bien différents à ce sujet... Il y avait un Hector plus espérant que jamais, qui devait probablement prier chaque soir avant de s'endormir, implorer les terribles Parques pour qu'elles emportent l'héritière gênante. Il y avait une Katelynn qui tentait grotesquement de jouer la comédie de la mère dévastée. Il y avait une Coleen jalouse de la proximité intime qu'entretenait Megan avec la Mort. Il y avait un Dylan plus dévasté que jamais, un Alix consterné et sincèrement désolé, ou même encore une Narcissa qui ne cessait de pleurer et de prier pour l'âme de la jeune fille. Et puis il y avait lui dont nul ne percevait les sentiments. Il demeurait calme et imperturbable, et continuait son business comme si de rien n'était, ce qui avait le don de mettre hors de lui son frère aîné.

« Bon, alors, tu as mon paquet ? »

La vodka était réellement une invention du démon, James n'en démordait pas. Mis à part pour détartrer les toilettes ou désinfecter les poignées de portes en période d'épidémie de gastro-entérite, ce liquide infâme ne pouvait pas avoir une utilisation par l'être humain, ce n'était pas possible... Et pourtant, Vlad Kosloff, le vieil ami de Xenophius, avait insisté pour que ses hôtes en prennent une rasade, juste après un thé fort et juste avant le départ de leur Portoloin. Jason et Brad avaient avalé le breuvage sans sourciller, mais James avait dû se forcer pour ne pas grimacer. Il fallait être Russe, ou avoir le gosier en acier, pour descendre ainsi de la vodka... Il avait refusé le second verre s'attirant un regard un peu déçu de Kosloff. Ses deux acolytes, en revanche, avaient accepté cette seconde rasade de vodka ; le Russe les avait servis lui-même, un large sourire aux lèvres. De toute évidence, il fallait être un solide buveur de vodka pour gagner son estime... Mais à jeun, juste avant de prendre un Portoloin, c'était trop demander à James. D'autant qu'il avait une entrevue avec Xenophius quelques minutes plus tard – pas comme les deux soûlauds qui allaient certainement retourner se coucher – et qu'il valait mieux ne pas arriver complètement bourré à ce genre de rendez-vous.

Comme prévu, le voyage en Portoloin ne fut pas des plus agréables. La vodka en guise de petit déjeuner avait suscité la colère de l'estomac de James, et lorsqu'il posa le pied sur le sol humide de l'Angleterre, une terrible envie de vomir s'était emparée de lui. Elle se dissipa tandis qu'il remontait à grandes enjambées la majestueuse allée qui menait au manoir McGregor ; l'air frais du matin se chargea de le remettre d'aplomb – et tant mieux, car dès son entrée dans la demeure, il rencontra Alix McGregor, qui sembla très mécontent de le trouver là.

-Qu'est-ce que tu fiches ici, toi ? demanda le vieux sorcier d'un ton impérieux.

Lorsque James expliqua qu'il était attendu par Xenophius, il se fit littéralement incendier, sans vraiment comprendre pourquoi. Toute la maison avait dû entendre le coup de gueule de l'aîné des McGregor – d'ailleurs, un elfe de maison vint presque aussitôt chercher le visiteur, et Alix lui emboîta le pas, l'air décidé.

Xenophius était attablé dans le petit salon, prenant tranquillement son petit déjeuner. Sur un signe de son parrain, James, après le salut d'usage, s'assit à sa place habituelle, à sa gauche, tandis qu'Alix s'installait face à son frère ; il était évident qu'une petite altercation allait avoir lieu, tant le vieux McGregor semblait furieux. Xenophius, sans cesser de manger, invita son frère aîné à parler ; James eut une moue de désapprobation lorsqu'Alix expliqua ce qui le chiffonnait. En quoi la présence de Xenophius aurait-elle aidé Megan à aller mieux ? L'état de santé de la jeune fille inquiétait sincèrement James, mais il n'était pas d'accord avec Alix. Megan avait été confiée à des gens compétents, et la place de Xenophius était à la tête des affaires du clan.

Furibard, Alix quitta la table, manquant d'emporter la nappe au passage, et sortit en claquant la porte. Un instant, James eut envie de demander des nouvelles de Megan – mais il n'osa pas le faire, jugeant que ce serait déplacé. Il garda le silence tandis que l'elfe apportait pour lui un couvert et une tasse de café, dans laquelle il trempa les lèvres avec soulagement ; l'odeur délicieuse des pancakes chauds lui avait ouvert l'appétit, et il se servit tout en répondant à la question de Xenophius :

-Oui, j'ai votre paquet, Parrain. Et Monsieur Kosloff me charge de vous transmettre ses amitiés, ajouta-t-il en tirant de la poche intérieure de son veston un petit paquet emballé de papier kraft.

Les pancakes, comme tout ce que l'on mangeait au manoir McGregor, étaient excellents. James en dévora un en deux bouchées à peine – il n'y avait pas à discuter, c'était bien meilleur que l'alcool à brûler de Kosloff. Le jeune homme se permit d'ailleurs de se resservir, et reprit, tout en tartinant son pancake de sirop d'érable :

-Par où commençons-nous, monsieur ? Je dois vous avouer que les sous-entendus de votre lettre m'ont intrigué, et que j'ai hâte de connaître vos nouveaux projets.

Il prenait de plus en plus d'intérêt aux affaires du clan, et sa curiosité était sincère. Les projets de Xenophius l'effrayaient parfois, par leur ampleur, mais leur mise en œuvre était toujours stimulante – même si le chef de clan s'attribuait tous les succès, et faisait endosser tous les échecs à ses subalternes...

A peine James avait-il ouvert la bouche qu'une odeur que Xenophius connaissait bien lui envahit les narines. Un sourire amusé se profila sur les lèvres de l'illustre sorcier. Ah, ce vieux Vlad ne changerait donc jamais et la vodka semblait être essentielle à sa survie. Le vieil homme riait intérieurement en imaginant la réaction de son malheureux filleul qui avait du être drôlement surpris par ce petit-déjeuner plutôt singulier. Il acquiesça paisiblement et s'empara scrupuleusement du précieux petit paquet que lui tendait James, tout en portant un intérêt soudain captivé au présent de son cher ami. Il releva à peine quelques secondes le menton vers le jeune Kirkby pour le remercier à demi-voix, puis n'écouta que d'une oreille absente la suite de ses propos. Il entreprit alors d'ouvrir le présent soigneusement empaqueté avec du papier kraft, et découvrit alors le fameux flacon, l'observa alors d'un œil avide, un mince sourire satisfaire se formant inconsciemment dans jonction de ses lèvres. Toujours en préservant un air fasciné, il se lança dans de brèves explications, à l'adresse de son filleul.

« Vois-tu ce précieux liquide James ? Il s'agit d'un échantillon de sang de re'em. Comme tu dois probablement le savoir, il possède des vertus extraordinaires, et il est extrêmement rare d'en trouver. C'est Oleg, le bras-droit de Vlad, que tu as certainement rencontré, qui a fait la découverte d'un re'em lors d'un voyage d'affaires. Il ne reste plus qu'à savoir, si l'immense force qu'il promet à celui qui en boit, est son unique propriété... »

Il déposa minutieusement le flacon de verre entre James et lui, sur la table, tout en pensant qu'il lui faudrait trouver un créneau pour accorder un temps considérable à ses recherches sur le sujet. Oh, Xenophius ne possédait que de maigres bases en alchimie, et il se doutait bien que les recherches lui prendraient beaucoup de temps, ainsi, il comptait bien employer les talents de Léopoldine, l'épouse dévouée de Dereck pour ces travaux-là. Enfin, d'après ce qu'il savait, la sorcière était déjà complètement surchargée de travail, avec ses recherches sur un antidote contre la schizophrénie aiguë de Brad, son fils. Xenophius chassa la moue songeuse de son visage, et il se promit d'y repenser plus tard.

« Bien. Commence donc par le rapport de ta mission en Chine. »

La Chine... Cette affaire-là lui faisait drôlement du souci à vrai dire. Jamais dans sa carrière il n'avait eu autant de problèmes avec une affaire, et voilà qu'à présent, ces présomptueux et orgueilleux d'asiatiques cherchaient à lui mettre des bâtons dans les roues. A moins qu'il ne s'agisse de ses deux associés. Xenophius savait bien que ce genre d'association n'était pas bien vue. Déjà que les Chinois avaient du mal à voir des étrangers s'installer sur leur territoire, si en plus ils faisaient de drôles d'alliances stratégiques, ils ne le voyaient pas d'un bon œil. L'éminent mage noir se demandait à présent s'il avait bien fait de laisser Dereck et James se lancer dans une telle entreprise. Maintenant, il allait peut être devoir réviser tous les contrats concernant l'alliance le liant aux deux autres clans... Il passa une main distraite sur son menton, et réfléchit calmement, à une solution qui lui permettrait de tirer un avantage plus que considérable de cette affaire. Cela l'ennuyait de devoir rompre le contrat l'étreignant aux deux autres mafieux, cela avait ses avantages, mais si faire cavalier seul pouvait lui être plus rentable, il tenait à étudier la question plus sérieusement. Il était vrai qu'il n'avait pas eu beaucoup le temps d'y songer depuis sa mise en place, et la revente de potions en Chine avait été majoritairement léguée à son bras-droit et son filleul, il leur avait accordé une large liberté dans les manœuvres de direction.

Mais désormais, il était rentré, et tout le monde savait pertinemment, que Xenophius McGregor était capable de tout, en une fraction de secondes. Comme par exemple rompre un contrat avec deux alliés, et se les mettre à dos... Mais il était primordial et urgent d'avoir un avis professionnel, et Xenophius comptait bien tout mettre en œuvre pour obtenir un rendez-vous avec ce mafieux asiatique qui devait bien connaître le marché, et donc, lui serait d'une aide précieuse s'ils venaient à trouver un terrain d'entente...

En un rien de temps, James expédia la moitié de son café, ainsi que deux pancakes au sirop d'érable. Cette nourriture était une véritable bénédiction pour son estomac, décidément peu habitué à la vodka en guise de petit déjeuner. Le jeune homme se resservit, comme chez lui, et avala deux autres pancakes, tandis que Xenophius déballait le paquet remis par Kosloff. Mieux valait manger rapidement : il n'était pas question de présenter ses rapports à son parrain en s'interrompant toutes les deux phrases pour prendre une bouchée... Le chef de clan ne supporterait pas longtemps un tel manque de respect. L'estomac enfin calé, James posa ses couverts, fixant le paquet. Il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter un peu : la dernière fois qu'il avait apporté un paquet à son parrain, il s'agissait de la tête coupée d'un cousin McGregor. Qu'avait-il bien pu ramener, cette fois ? Kosloff ne lui avait rien dit, sinon – même si c'était inutile – de faire attention. Il se sentit étrangement soulagé lorsque Xenophius éleva devant ses yeux un petit flacon, plein d'une substance d'un rouge brunâtre, et écouta avec intérêt les explications que lui donnait son mentor. Du sang de re'em... Bien sûr, il en avait entendu parler, mais n'en avait jamais vu. Il s'agissait d'une substance extrêmement rare et précieuse, que seuls quelques privilégiés pouvaient se procurer... D'un geste prudent, il prit le flacon que Xenophius avait déposé sur la table, pour l'examiner de plus près. Était-ce possible ? Ce simple échantillon devait valoir une fortune – et il éprouva une petite pointe de satisfaction en y songeant ; c'était lui qui avait été choisi pour cette mission de confiance, lui parmi tous les autres coursiers possibles. D'ailleurs, il lui semblait que Xenophius lui confiait de plus en plus des tâches importantes (plus qu'à certains de ses parents directs, à vrai dire) et il se sentait réellement fier de mériter la confiance de son parrain – non pour de basses raisons matérielles, même s'il ne crachait pas, par principe, sur une récompense, mais par dévouement sincère. Il n'aurait pas servi son propre père avec autant de zèle, et ne se serait pas senti plus désireux de le contenter.

Après quelques instants d'examen, il reposa le flacon, et attendit que Xenophius fixe l'ordre du jour. Le chef de clan lui ordonna de commencer par le rapport de sa mission en Chine ; James se lança, plutôt heureux de ce qu'il avait à dire :

-Bien, monsieur. Vous avez eu connaissance du bilan de janvier, et des courriers que j'ai échangés avec vos associés. En accord avec eux, je me suis donc rendu sur place ces derniers jours. Quatre hommes m'avaient été fournis par monsieur Dmitriev et monsieur Murray ; avec leur assistance, j'ai pu améliorer radicalement le recrutement de sorciers pour la protection des installations. Nous avons usé de magie pour convaincre chacun de ces sorciers qu'ils seraient très heureux avec un dixième du salaire convenu à la négociation du contrat, et que travailler pour nous était, de toute façon, un immense honneur. Les contrats ont donc été revus, et chacun a signé, et s'est engagé par serment inviolable à vous servir pour une somme dérisoire... et en plus, ils sont contents.

Il n'était pas peu fier de cette entourloupe, entièrement organisée par ses soins. À l'aide de sorts divers et de potions, il avait littéralement pris possession des esprits de ces sorciers, qui s'étaient laissé dépouiller sans mot dire, et lui avaient encore baisé les mains lorsqu'il était parti.

-Pour ce qui est des autorités chinoises, Monsieur, les hommes de vos associés s'en sont occupés. Plusieurs responsables ont été éliminés, et nous avons rencontré leurs remplaçants pour mettre les choses au point d'emblée. Cela devrait se passer de manière beaucoup plus souple, à l'avenir. Nous avons pris soin de laisser des indices incriminant nos rivaux chinois, et une véritable guerre a lieu en ce moment même entre mafieux et aurors chinois.

Il prit le temps d'avaler une petite gorgée de café avant d'annoncer, souriant, la meilleure nouvelle de ce rapport :

-Je pense que vous serez satisfait, Parrain, de savoir que le budget de février pour la Chine sera à l'équilibre, voire légèrement bénéficiaire.

Les bénéfices, s'il y en avait, seraient encore faibles, mais ils intervenaient avec un mois d'avance, alors même que des pertes étaient attendues pour février. Les mesures énergiques prises en Chine expliquaient ce retournement, et laissaient présager une rentabilité rapide de l'affaire – ce que cherchait chacun des trois mafieux.

Xenophius nota l'assurance non dissimulée que son filleul arborait fièrement lorsqu'il se lança dans son premier rapport. Il apportait clairement de bonnes nouvelles, pour le plaisir de tous. Finalement, la promotion qu'il s'apprêtait à lui offrir serait certainement bien méritée. Il était vrai que depuis quelques mois, James s'était soigneusement appliqué à exécuter avec minutie les ordres de son patron, et il avait accomplit des prouesses, qui selon Xenophius, méritaient une récompense. Car si Xenophius n'était pas connu pour ses bonnes actions, il n'en demeurait pas moins un homme qui savait amplement satisfaire ses subalternes lorsqu'il le jugeait nécessaire. Et il était vrai que peu -sinon aucun ne pouvait dire qu'il ne vivait pas dans l'aisance et le luxe s'il travaillait pour McGregor. Le maître du clan veillait en effet à ce que ceux qui lui avaient prêté allégeance, ne manquent de rien dans sa famille. Ainsi, tous les membres de son Empire étaient toujours noblement vêtus, possédaient un compte en banque personnel bien dodu, un logement privé plus que convenable, et Xenophius s'engageait à leur donner des récompenses dignes des efforts fournis. Alors il était évident qu'il se montre bien généreux avec son dévoué filleul.

Il hocha le menton, satisfait du discours que lui tint James, et une moue approbatrice marqua son contentement. Parfait. En peu de temps James avait réussi à exploiter la main d'oeuvre à moindre coût, avait écarté de leur affaire les autorités, et piégé leurs rivaux. Xenophius ne pouvait plus le nier, ce garçon était devenu un homme de main très talentueux, et il n'avait pas eu tort de lui accorder sa confiance, et de le faire tremper dans des affaires plus délicates. De toutes parts il recevait des échos positives concernant le jeune héritier des Kirkby, que ce soit de Alix ou Dereck, ou même ses associés dans l'affaire en Chine, on ne lui en rapportait que de bonnes images. Bien sûr, il restait toujours Andrew pour étaler son venin, et dénigrer ouvertement le talent du jeune garçon. La jalousie mêlée à la rancoeur n'aidaient pas le sorcier à avoir un regard objectif sur le travail de James, et Xenophius trouvait cela bien dommage.

Le sexagénaire porta sa tasse de porcelaine à sa bouche, et avala une nouvelle gorgée chaude de café. Il la déposa ensuite délicatement devant lui, et plongea l'azur profond de ses iris dans ceux de son filleul. Le regard seul de l'illustre sorcier imposait le respect.

« Tu vois, c'est lorsque je vois tes incroyables progrès dans les affaires que je me console de la malheureuse disparition de Peter. Lui qui ne voyait en toi que faiblesse et incapacité, et oubliait qu'il en était la cause... Il est triste de se dire qu'il refusait d'admettre que tu possédais certaines aptitudes et certains talents, et pourquoi ? Nous ne le saurons malheureusement jamais. -il soupira profondément navré- Qu'il repose en paix et retrouve le chemin de la raison. »

Peter Kirkby avait été un grand homme aux yeux de Xenophius, et son aîné, qu'il avait toujours profondément respecté avait semble-t-il perdu peu à peu la raison. Selon le chef McGregor, son défunt ami n'avait pas suffisamment encouragé ses enfants, il ne leur avait tenu que de banales moralités, les avait sans cesse sermonné, les avait étouffé et en avait fait de pauvres ânes. Car selon le directeur de la coopération magique, c'était bien de cela qu'il s'agissait. Des ânes. Incapables de réfléchir, et qui avançaient sans trop se poser de questions. Obéissants mais qui finalement tournaient un peu dans le sens du vent. Voilà ce qu'étaient les Kirkby avec le règne de Peter. Il ne les avaient que trop sous-estimé et avaient gâché leurs capacités. Heureusement que Xenophius avait pu poser sa poigne de fer sur ses héritiers. Maintenant, il était particulièrement fier d'avoir fait de James l'homme qu'il était aujourd'hui. Il assistait à sa victoire sur son défunt ami, mais cela représentait même plus généralement une victoire sur les autres familles de Sang-Pur. Quel délice de pouvoir se targuer d'avoir un clan comme le sien. Si Xenophius avait bien réussi quelque chose dans vie, il pouvait l'avouer, c'était bien sa famille.

« Ton travail en Chine m'impressionne beaucoup mon garçon. Je savais bien que c'était une brillante idée de t'affilier à Dereck sur cette affaire-là. Lui même est très satisfait de ton travail, et ne tarit pas d'éloges à ton sujet. De même que Dmitriev et Murray. Je pense donc que tu mérites une promotion. Je vais charger Alix d'effectuer un nouveau virement sur ton compte en plus de ta paye mensuelle. Une petite prime pour récompenser tes efforts fructueux. -il lui adressa un sourire presque complice- Mais je pense que ce n'est pas ce qui te fera le plus plaisir... En fait, j'aimerais te léguer la responsabilité du réseau de vélanes dont Kelevra se chargeait jusqu'à présent. Je veux que tu le remplaces. Un poste fixe à hautes responsabilités en plus de ton association avec Dereck. Qu'en penses-tu ? »

Bien sûr, qui connaissait bien Xenophius savait qu'il n'était pas prudent de refuser. Ainsi il patienta la réponse de son filleul songeant que de toute manière, il ne voyait pas pourquoi James refuserait une telle opportunité de monter en grade et surtout d'avoir un salaire en conséquence. Et puis, c'était également une occasion de monter un peu plus dans l'estime du chef de clan.

Comme prévu, le rapport concernant les affaires chinoises sembla satisfaire Xenophius. Il fallait dire que James n'avait ménagé ni ses efforts, ni la sensibilité des interlocuteurs sur place, pour pouvoir apporter des résultats positifs à ses employeurs. La lettre de Murray et Dmitriev, lourde de menaces implicites, l'avait incité à utiliser les grands moyens – d'autant que Xenophius, s'il n'avait rien dit, devait approuver ses associés lorsqu'ils exigeaient une rentabilité rapide de l'affaire. Ainsi, pour éviter des ennuis, il en était venu à des méthodes qu'il n'aurait jamais osé employer sans cela, et il n'était pas mécontent du résultat.

Son rapport achevé, il se servit encore un pancake, qu'il arrosa généreusement de sirop d'érable avant de le dévorer. Il savait que ses manières déplaisaient fortement à certains membres du clan McGregor, à commencer par Andrew qui le trouvait mal élevé et irrespectueux ; mais James estimait que le respect devait se trouver ailleurs que dans la façon de se comporter à table, et qu'il n'avait pas à demander la permission du maître de maison à chaque fois qu'il voulait se resservir... Après tout, si son parrain l'avait invité à sa table, c'était bien pour qu'il mange, non ? De toute façon, Xenophius ne semblait pas se formaliser de ses manières un peu familières. Il avait l'air de bonne humeur, d'excellente humeur même... James s'apprêtait à terminer son café, mais le regard de son parrain posé sur lui le réduisit à l'immobilité. Le chef de clan avait cette faculté à impressionner d'un simple regard, comme tous les hommes de pouvoir, ce qui lui permettait de garder le contrôle sur ses hommes à tout moment. Le jeune sorcier interrompit donc son geste en direction de sa tasse, et écouta avec attention les paroles inattendues de son parrain... Des félicitations ! Une vague de fierté lui empourpra les joues. Recevoir des compliments de Xenophius était une récompense en soi, le mafieux sachant les réserver à ceux qui les méritaient vraiment. James était resté un véritable gosse, désireux de complaire aux grandes personnes, comme dans son enfance, et il goûta ces félicitations avec un plaisir non dissimulé. Il remercia son parrain d'un sourire, avant de baisser modestement la tête pour ne pas laisser voir sa fierté.

Xenophius marqua une brève pause, que son filleul mit à profit pour boire la fin de son café ; il en venait à regretter que ces félicitations aient été prononcées en privé, et que cette vieille carne d'Andrew, par exemple, n'ait pas pu les entendre. Cela l'aurait mis hors de lui – et le plus beau restait à venir ! Le chef de clan reprit la parole, indiquant à son employé qu'il recevait de toutes parts de bons échos à son sujet, qu'il s'agisse de la famille ou des associés à l'affaire chinoise... En conséquence, il lui annonça une petite prime – le connaissant, elle ne serait pas si petite que cela – et, avant même que le garçon ait pu remercier, une promotion. La responsabilité du réseau de Vélanes... Il avait vaguement entendu parler de cette affaire, éminemment rentable, qu'un autre homme de main, Kirk Kelevra, tenait jusque-là pour le compte de Xenophius. Pourquoi Kelevra se voyait-il retirer cette responsabilité ? Peu importait, finalement : l'essentiel était bien de la récupérer, de prendre du galon, de prouver à son parrain qu'il était digne de confiance... et là, c'était une sacrée marque de confiance ! Un peu abasourdi par la nouvelle, James mit quelques secondes à réagir :

-Vous... vous êtes sérieux, Parrain ?

Non, poisson d'avril, idiot ! Bien sûr qu'il était sérieux... Xenophius n'était pas du genre à parler dans le vide, et s'il offrait ce poste à son filleul, c'était qu'il y avait mûrement réfléchi. Le jeune homme s'empressa de poursuivre, avant d'irriter le chef de clan en tergiversant :

-Je suis très honoré que vous ayez pensé à moi pour ce travail... Je tâcherai de me montrer digne de cette promotion.

Il avait parlé le plus calmement possible, mais il se sentait fébrile, très excité par cette nouvelle responsabilité. L'air de rien, il grimpait dans la hiérarchie du clan McGregor, et nul ne pouvait dire qu'il bénéficiait de la complaisance de son parrain... Ce qu'il obtenait, c'était en prouvant chaque jour ses capacités et sa fidélité au chef de clan. Fixant Xenophius dans les yeux, il reprit, sur un ton grave :

-Je tiens à vous dire que je vous suis très reconnaissant, Parrain. Je sais tout ce que je vous dois, et je voudrais vous remercier pour votre générosité.

Bien sûr, il n'y avait pas grand-chose de gratuit dans la générosité de Xenophius, mais cela faisait partie du contrat ; pour ceux qui le servaient loyalement, il n'était pas avare de bienfaits en tout genre et de cadeaux magnifiques. Il savait acheter les fidélités – ainsi celle de James, qu'il avait gagnée en effaçant toutes les dettes de la famille – mais aussi se comporter de manière à faire oublier son pouvoir, et à ne laisser que le souvenir de ses bienfaits. Il pouvait légitimement dire que ceux qui appartenaient à son clan le servaient de leur plein gré, par reconnaissance et non par obligation. Le jeune Kirkby lui vouait ainsi le respect dû à un protecteur, bien plus profond que celui qu'il aurait accordé à un simple patron – et une part d'affection se mêlait à leurs relations, ce qui achevait de donner au chef de clan une autorité indiscutable.

-Concernant les Vélanes, conclut le garçon, conscient qu'il valait mieux revenir très vite au concret, j'étudierai l'affaire en sortant d'ici, pour me familiariser avec le réseau. Car je suppose que si vous m'offrez ce poste à responsabilité, c'est que vous voulez que je travaille pour vous à plein temps désormais ?

Le réseau de prostitution de vélanes était fort lucratif, il fallait bien le reconnaître, et il était devenu un rouage important dans l'organisation de Xenophius. Il devait donc s'assurer des capacités de ceux qui le dirigeraient pour lui. Kelevra était un homme brillant en affaires, et quelqu'un qui savait rester à son rang sans jamais chercher à discuter, tout comme James en réalité. Mais selon le chef de clan, il était bien dommage de négliger les autres qualités de Kirk en le contraignant à la vie du commerce, alors qu'il pouvait faire un excellent homme de main dans des affaires qui sollicitaient des compétences plus physiques. Sans le démettre de ses fonctions à la tête du fameux réseau, Xenophius lui avait toutefois fait part de ses intentions quant à la promotion au même poste de James. Officiellement, James n'était donc que l'associé de Kirk, mais puisque le vieux mafieux comptait utiliser le policier pour d'autres affaires, son filleul aurait la possibilité de manoeuvrer tranquillement sans les tracas d'une collaboration hasardeuse.

Satisfait et même quelque peu amusé de la réaction qu'avait suscité son annonce auprès de James, l'ancien mangemort eut un sourire en coin. Avec une attention toute soignée, il entreprit de récupérer sa tasse pour la ramener à ses lèvres, ingérant goulûment ce qui restait de café à l'intérieur. Avant même de daigner répondre à James, il éleva la voix, majestueuse et incontestable « Hermès ! » La créature aux traits déformés apparut immédiatement dans un craquement sonore significatif. Le domestique effectua son habituelle révérence. « Va donc nous refaire du café. Et fais patienter Maître McCain quand il arrivera » ordonna le maître des lieux. Sans oser protester, l'elfe se retira. Xenophius reporta son attention sur James qui ne dissimulait plus sa fierté.

« Tu sais James, ma générosité a un prix. Et tant que tu sauras me prouver ta fiabilité et ta loyauté, je saurais me montrer clément et bon. Mais Merlin sait que ce que je donne en abondance, je peux aussi le reprendre en double. Trahis-moi, et ma soif de vengeance ne s'étanchera que par le prix du sang. » avait-il confessé, ses menaces à peine voilées déclarées avec un calme troublant.

Mais Xenophius était de ceux qui pensaient que rien n'était jamais acquis. Et si un homme commençait à se sentir trop en confiance, à goûter de trop près aux délices du pouvoir, humer son exquise effluve, alors il devenait dangereux. Xenophius distribuait de plus en plus de félicitations et primes à son filleul, mais il pensait qu'il était important de songer aussi à le rappeler à l'ordre. Le pouvoir ne devait jamais séduire ses employés, sa place ne devait en aucun cas être convoitée, et pour cela, il devait rendre la suprématie aussi terrifiante que possible. Mais il ne fallait pas se méprendre, la plupart des hommes de Xenophius étaient des hommes d'ambition qui aspiraient à une certaine gloire. Mais la gloire et l'honneur qu'ils réclamaient n'avaient rien à voir avec l'avidité du pouvoir, cette gloutonnerie gourmande dont faisait preuve Xenophius.

« En ce qui concerne le réseau de vélanes, il requiert en effet une implication totale de ta part. C'est un poste à très grandes responsabilités, et j'attends de toi que tu t'y consacres autant que nécessaire. Il demande aussi une très large mobilité, et tu seras amené à énormément voyager dans les quatre coins du monde, en peu de temps parfois ! Il te faudra adopter un certain rythme, et il faut que tu saches que ce sera peut-être difficile les premiers temps. Mais j'ai toute foi en ta réussite, et je suis certain que tu sauras te montrer digne de la confiance que je t'accorde »

Xenophius marqua une pause, durant laquelle l'elfe arriva, chargé d'un nouveau plateau. Vigilent, il déposa la carafe de café entre les deux sorciers, puis se permit « Monsieur McCain vient tout juste d'arriver. Hermès l'a débarrassé de sa veste et son chapeau, et l'a conduit dans le bureau du Maître, comme Monsieur le lui a ordonné »

D'un geste apathique de la main, Xenophius congédia le domestique. L'avocat patienterait. Il n'avait guère le choix de toute manière. Rajustant machinalement la manche gauche de sa chemise, il se servit un nouveau café. « Bien, Maître McCain va s'impatienter et sera de mauvaise compagnie lors de notre entrevue. Et je ne saurais m'empêtrer d'une présence nuisible. Alors je te prierais de faire court au sujet du projet dont tu souhaitais m'entretenir l'autre jour pour recevoir mes conseils. De quoi s'agit-il mon garçon ? »

Plus de café. Dommage. James observait avec regret sa tasse vide, songeant qu'un peu plus de bon café n'aurait pas fait de mal. Tout d'abord parce qu'il avait toujours besoin de se remettre d'aplomb après le séjour express en Russie et la vodka du petit déjeuner. Et ensuite, parce que cela l'aurait aidé à supporter le soudain changement de ton de son parrain. Quelle mouche piquait Xenophius, pour qu'il se mette à le menacer ainsi ? Les choses étaient pourtant claires, entre eux, sans que le chef de clan ait jamais eu besoin de formuler clairement ses menaces. James n'ignorait pas que tous les biens des Kirkby appartenaient désormais à Xenophius qui, dans sa grande bonté, en laissait l'usage à la famille de son défunt ami. La bonté n'allant pas sans précautions, il avait fait signer à Alba et à ses trois fils une reconnaissance de dette qu'il avait probablement archivée avec soin. Et James était bien placé pour savoir ce qu'il en coûtait de décevoir son parrain ; il ne pouvait qu'imaginer le prix de la trahison... De toute façon, il n'avait jamais eu l'intention de manquer à la loyauté qu'il avait jurée à Xenophius. Pour des raisons purement matérielles, certes, mais aussi parce qu'il éprouvait quelque affection pour celui qui l'avait accueilli comme un père et lui avait donné une chance après la chute du Lord. Le jeune homme n'aspirait qu'à se rendre digne de la confiance de son parrain, et il fallait reconnaître que, dans le domaine des affaires, il ne s'en tirait pas trop mal. Il y avait eu quelques difficultés au début, le temps que Xenophius lui trouve la place où il serait le plus efficace, mais depuis, tout marchait à merveille. Le jeune Kirkby abandonna son sourire pour prendre une mine grave et, d'une voix ferme, répliqua :

-Vous savez, Parrain, vous n'aviez pas besoin de me dire tout cela. Tout d'abord parce que je sais très bien ce qu'il m'en coûterait de vous trahir. Ensuite, et surtout, parce que je peux vous garantir que vous n'aurez pas besoin de mettre vos menaces à exécution.

S'il avait envie de faire des rappels à la loyauté, Xenophius pourrait peut-être commencer par les faire dans sa famille, où certains désormais murmuraient dans son dos, sans cesser de lui faire des courbettes par-devant. Certains vagues cousins s'avisaient de trouver sa domination trop dure, ou sa mainmise sur la famille excessive (« voyez ce qui est arrivé à cette pauvre Megan »), mais pour le moment, aucun n'osait le lui dire en face. James enchaîna d'ailleurs, pour lui signaler sans en avoir l'air ces velléités de révolte :

-De plus, je sais que je n'appartiens pas à la famille McGregor et qu'à ce titre, je suis tenu à une fidélité encore plus irréprochable que n'importe qui d'autre.

L'air de rien, espérant que le chef de clan avait saisi l'allusion, il déposa un nouveau pancake dans son assiette, et le tartina lentement de sirop d'érable, en attendant le café que Xenophius avait commandé. Il écouta avec attention son parrain lui faire des recommandations au sujet du réseau de Vélanes qu'il lui confiait, et répondit tranquillement :

-Je consacrerai à ce réseau le temps et l'énergie nécessaires pour que vous n'ayez pas à regretter d'avoir fait appel à moi, soyez tranquille, monsieur McGregor.

Il ne s'en faisait guère à ce sujet ; il se savait capable de donner entière satisfaction à son patron, et, de toute façon, il n'avait pas vraiment le choix. Échouer dans une mission d'une telle importance reviendrait à signer son arrêt de mort – ou, au moins, à s'exposer à un châtiment particulièrement sévère. Pour avoir déjà fait les frais de la colère de Xenophius, James savait qu'il fallait tout mettre en œuvre pour ne plus avoir à la subir ; il le ferait donc, et il y parviendrait certainement, instinct de survie oblige.

L'elfe rentra avec une nouvelle carafe de café fumant, et annonça que l'avocat était arrivé. Cela signifiait que l'entrevue entre James et son parrain était bientôt terminée... Le jeune homme aurait voulu parler à son patron d'un projet qui lui tenait à cœur, mais il n'avait pas eu l'occasion de le faire. Une fois que Xenophius se fut resservi une tasse de café, il prit à son tour la carafe ; comme il emplissait sa tasse, le chef de clan l'invita à parler de son projet, montrant ainsi qu'il n'avait pas oublié comme le craignait le jeune Kirkby. Reposant délicatement la carafe, le jeune homme expliqua :

-Eh bien... Je voudrais votre avis au sujet d'un projet que je compte mener avec mes frères. Vous savez qu'ils ne sont pas très contents de certaines de vos décisions – il faisait allusion à la volonté de Xenophius de l'imposer comme chef de la famille – et je pense que les intéresser à quelques affaires permettrait de leur faire mieux accepter cette situation. Je pensais investir, si vous m'y autorisez, dans les paris sportifs. Il n'existe à ma connaissance aucun système unique de paris pour le Quidditch, seulement de petits bookmakers indépendants, et je souhaite récupérer ce secteur pour en confier la gestion à mes frères. Ils se sentent lésés par vos décisions en ma faveur, et cela les ferait certainement changer d'opinion. Alors, pour commencer, est-ce que j'ai votre autorisation ?

Il ne ferait rien sans la permission formelle de son parrain, pour ne pas prendre le risque de marcher sur ses plates-bandes, et aussi pour lui prouver qu'il respectait totalement son autorité. Il avait déjà soigneusement étudié le projet, mais n'avait rien lancé avant d'en parler au chef de clan, qui, qu'on le veuille ou non, dirigeait aussi la famille Kirkby. C'est bien cela que ses frères devraient, bon gré mal gré, se mettre en tête.