C’est drôle comme l’être humain à une capacité infinie à râler en continu : il semble quasi impossible de le contenter, il y a toujours quelque chose qui cloche. Prenons l’exemple du temps, l’hiver arrivé, tout le monde se plaint du froid et du vent, en automne les gens n’en peuvent plus de la pluie, mais, dès que le printemps fait son apparition, on se plaint du rhume des foins et, en été, la température est toujours trop élevée au goût de la population. Mais attention qu’un des éléments soit perturbé n’empêche nullement la litanie des protestations. Ainsi, si par malheur l’été n’est pas aussi chaud que prévu on se plaint du dérèglement de température et du réchauffement planétaire et ainsi de suite. Bref, en un mot comme en cent, le principe c’est que quoi qu’il arrive, il faut être capable de se plaindre. C’est pourquoi, malgré la chaleur qui était franchement à la limite du supportable, Lavande avait décidé ce jour-là qu’elle allait se démarquer de la majorité de la population en ne se plaignant pas et en profitant à fond des avantages fournis par la chaleur. Et en premier lieu, celui de pouvoir se payer une glace en toute sérénité.

En effet, durant l’année, passer devant le glacier est toujours un dilemme pour une fille digne de ce nom. D’un côté, les parfums tentateurs vous font de l’œil et vous invitent sans gêne à venir les goûter mais, de l’autre, votre conscience vous rappelle les calories contenues dans une de ces petites merveilles gustatives. Quelle que soit la partie gagnante de ce duel titanesque, vous avez perdu un temps fou et si jamais vous vous permettez tout de même une petite glace, votre mauvaise conscience vous accompagne tout le long de la dégustation, gâchant en partie votre plaisir. Mais dès que les grandes chaleurs de l’été arrivent, plus besoin de se ronger les sangs et de s’inventer des excuses pour pouvoir satisfaire sa gourmandise, il suffit de se dire qu’on ne s’achète une glace que pour se rafraîchir et le tour est joué. Ainsi, Lavande se dirigeait-elle donc d’un bon pas vers le meilleur glacier de tout Londres sorcier, j’ai nommé Florian Fortarôme et tout cela sans complexe aucun.

Elle était venue à pied depuis le campus, choisissant de s’ouvrir de cette façon l’appétit car, quitte à se faire plaisir une fois de temps en temps, elle avait l’intention de s’offrir une coupe géante et il fallait avoir l’estomac en béton pour les avaler. Mais alors qu’elle arrivait en vue de la terrasse du glacier, elle aperçut, assise à une des tables, une silhouette qui lui était drôlement familière. Se pouvait-il que le destin lui ait fait croiser le chemin d’Alan par pur hasard ? Après avoir fait quelques pas en plus, elle eut sa réponse : c’était bien le garçon qui lui tournait le dos. Elle aurait reconnu sa tignasse ébouriffée entre milles. Elle décida donc d’inverser les rôles pour une fois et de lui faire une petite farce. Elle s’approcha en silence par-derrière puis à la dernière seconde lui sauta dessus en traître en criant.

-Whaaaaaaah !!!!

Mais à sa grande surprise le garçon lui attrapa le poignet à la dernière seconde et se retourna pour planter un regard dur dans le sien. Surprise, elle poussa un petit cri de douleur et se retira de son emprise. Puis, elle vit les cernes sous ses yeux et elle se souvint qu’il devait être en plein rituel animagus, probablement pas le meilleur moment pour lui faire ce genre de blague de mauvais goût alors qu’il avait tous les sens en alerte. Elle s’excusa donc tandis qu’elle s’asseyait en face de lui.

-Désolée, j’avais oublié ton ... état. Je ne voulais pas te faire peur, juste m’amuser un peu mais j’aurais dû réfléchir avant. J’espère que tu ne m’en veux pas trop.

Elle fit une moue désolée, puis, lui laissant le temps de reprendre ses esprits, elle se saisit du menu et entreprit de le lire consciencieusement pour choisir sa commande.

[Hj : C’est nul, il n'y a pas d’autres mots, mais je suis de mauvaise humeur à cause de mes équivalences qui ne sont toujours pas arrivées et je préférais attendre ta réponse plutôt que de lancer vingt mille questions à la fois. Tu m’excuseras, j’essaierais de faire mieux la prochaine fois]

Alors qu’elle hésitait sérieusement entre commander une dame blanche ou bien une triple coupe fraise/framboise/stratcciatella, Alan prit la parole et la rassura concernant son humeur : il ne lui en voulait pas, Merlin soit loué ! Il la félicita même pour sa capacité à le surprendre. Personnellement, elle trouvait plutôt que sa tentative avait lamentablement échoué mais bon s’il lui faisait des compliments, elle n’allait pas se plaindre non plus. Il lui dit ensuite –de façon voilée bien entendu mais elle comprit sans problème le message- qu’il en avait fini avec son rituel d’Animagus. L’excitation s’empara d’elle et elle ne put s’empêcher de demander :

-Vraiment ? C’est trop cool ! Alors qu’est-ce que c’est ?

Par là, elle voulait savoir en quel animal se transformait son ami lors de ses métamorphoses illégales mais elle était sûr qu’il comprendrait l’implicite. Tandis qu’il lui proposait gentiment de payer sa consommation –elle se décida finalement pour la triple boule, laissant la dame blanche pour une prochaine fois- et déblatérait sur le temps qu’il faisait, elle se mit à imaginer en quoi le garçon pouvait bien se transformait. Il fallait un animal fonceur mais en même temps réfléchi, paresseux mais capable de grandes choses, ... Bon c’était peine perdue, elle ne trouverait jamais. Elle connaissait Alan trop bien pour trouver un animal qui corresponde parfaitement à son caractère. Surtout qu’elle imaginait que les gens devaient parfois avoir des surprises avec la forme de leurs animae. C’était déjà souvent le cas au moment de créer un Patronus, alors un Animae ! Dans son cas, la forme de son patronus avait été relativement surprenante. Quand elle avait vu un lapin (probablement en souvenir de son lapin mort en troisième année) sortir de sa baguette lors des séances à l’AD, elle avait été relativement inquiète. Un si petit animal arriverait-il à repousser de vrais Détraqueurs ? Heureusement Harry l’avait rassuré, la taille ne présumait en rien de la force magique de la protection. Et bien évidemment il avait eu raison, enfin elle avait eu une belle frayeur tout de même la première fois qu’elle s’était retrouvée confronter à ces horreurs !

Avant qu’Alan n’ait le temps de répondre, la serveuse arriva et prit leur commande. Lavande remercia alors son ami pour sa générosité. Puis, elle se tut attendant qu’il satisfasse sa curiosité naturelle.

Une fois que la serveuse eut déposé leurs commandes respectives, Lavande, après avoir jeté un regard gourmand à sa coupe glacée, redressa la tête pour regarder Alan en face. Elle se retrouva alors confrontée à un regard auquel elle ne s’attendait pas. Le regard d’ébène de son ami était planté dans le bleu du sien et elle sentait un sérieux peu habituel émaner du garçon. Elle remarqua également qu’il semblait mal à l’aise, triturant sa cuillère sans même y faire attention. Elle était bien trop familière de cette manière inconsciente de déstresser –elle usait de la même- pour ne pas se rendre compte que quelque chose n’allait pas avec le brun. Elle se demanda alors si elle avait dit quelque chose de déplacé sans s’en rendre compte, après tout, ce ne serait malheureusement pas la première fois que cela lui arriverait. Elle se repassa le début de leur conversation dans sa tête mais elle n’y trouva rien qui ait pu provoquer le changement de comportement d’Alan. A moins que, pour une raison connue de lui seul, l’idée de la mettre au courant de la forme de son animae ne le dérange. Se pourrait-il qu’il s’agisse d’un animal peu viril ou un peu particulier, ce qui le mettrait dans l’embarras ? Elle voulut alors le rassurer, lui dire que jamais elle ne se moquerait de lui après l’exploit magique qu’il venait de réaliser, mais il la prit de court.

-Tu aimes les devinettes ?

Euh ... elle n’était pas spécialement douée dans cette discipline, mais pourquoi cette question ? La suite des paroles de l’étudiant la tirèrent du doute : son ami avait l’intention de lui faire découvrir par elle-même la nature de son animae. Elle se concentra alors pour retenir tous les indices qu’il lui donnait, car elle allait très certainement en avoir grandement besoin, vu son intelligence très moyenne.

Il commença par lui parler du nom scientifique de l’animal et elle faillit l’arrêter pour lui dire qu’elle et le latin ça faisait deux, si ce n’est trois. Elle ne connaissait aucun des noms scientifiques des animaux qu’elle côtoyait. Enfin, elle fit tout de même un effort. Un des animaux domestiques les plus répandus chez les moldus ? C’était soit le chien, soit le chat. Mais elle ne savait pas comment on disait chat ou chien en latin. Indice suivant : une racine proche du nom d’un de leurs meilleurs profs de DFCM. Bon ça au moins c’était plus simple, il n’y en avait pas eu tant que ça et en tête de liste, elle mettrait sans doute aucun le professeur Lupin. Mais, en même temps quel animal avait un nom latin ressemblant à Lupin ? Comment diable Alan voulait-il qu’elle sache un truc pareil, elle n’avait jamais étudié de langues mortes elle, juste ce qu’il fallait pour lancer des sorts et un point c’est tout !

Elle passa donc à la suite, en essayant de ne pas se décourager. Un prédateur essentiellement carnivore, voilà qui n’allait pas l’aider à réduire l’éventail des possibilités. Par contre, le fait qu’on le confonde avec une des pires créatures de monde sorcier –enfin elle espérait que c’était à celui-là qu’Alan faisait référence en disant « notre monde » sinon elle ne trouverait jamais- était un indice plutôt bon. Surtout avec la précision sur les conditions particulières, cela voulait dire que l’animae d’Alan n’était confondu avec la dite créature qu’à certains moments et pas tout le temps. Elle chercha alors dans ses souvenirs les créatures maléfiques qui changeaient d’apparence à un moment donné et, étant donné son vécu, la première idée qui lui vint tout naturellement à l’esprit fut le loup-garou. Un frisson incontrôlé la parcourut mais elle respira profondément pour calmer sa peur. Elle se concentra ensuite sur la fin des paroles d’Alan pour tenter de trouver la solution à la devinette. Un animal moldu victime de mauvaise publicité à cause de récits et légendes qui peut vivre tant dans la solitude qu’en groupe ? Humm, ça lui disait quelque chose ... quel animal était toujours le grand méchant dans les contes que son père lui lisait quand elle était petite ?

Et soudain, elle eut l’illumination ! Toutes les pièces du puzzle s’emboîtaient parfaitement ! Alan se transformait en loup ! Elle ne connaissait pas le nom scientifique du loup mais elle savait qu’il y avait un rapport avec les chiens car ils étaient plus ou moins cousins. Voilà pour le premier indice. Quant au professeur Lupin et à la créature maléfique, les deux pointaient dans la direction du loup-garou. De plus, le loup était bien un prédateur, carnivore pour l’essentiel, qui vivait en groupe mais supportait sans problème la solitude, et qui était en voie d’extinction à cause de la mauvaise publicité liée aux récits de village.

Une fois l’animae de son ami découvert, elle crut discerner un peu mieux le malaise du garçon. Vu comment il avait tenu à bien différencier loup et loup-garou, à tous les coups, il était inquiet que Lavande ait peur de lui vu que sa plus grande peur était désormais les lycanthropes. Elle sentit alors un immense élan d’affection pour le brun qui prenait tant en considération ses sentiments, elle posa donc sa main sur celle du garçon et la serra tendrement, puis murmura pour ne pas attirer l’attention sur eux.

-Tu es un loup, n’est-ce pas ? C’est super tu sais, ce n’est pas donné à tout le monde d’avoir un animae aussi puissant et sauvage, tu es vraiment quelqu’un de spécial.

Puis elle capta une nouvelle fois le regard de charbon du garçon, et rajouta toujours aussi doucement.

-Et ne t’inquiètes donc pas pour moi, je ne te vois pas différemment pour autant. Je suis assez mature pour savoir faire la différence entre un loup et un lycanthrope, surtout qu’après avoir connu le professeur Lupin, il m’est impossible de considérer les personnes touchées par la lycanthropie comme nécessairement mauvaises. Ils n’ont pas choisi d’être mordus et ne sont pas des Greyback en puissance. Par conséquent, si je n’ai pas de préjugés contre eux, comment pourrais-je en avoir contre mon meilleur ami ?

[Hj Et voici le grand retour de Cruchinette l'insouciante bavarde, j'avoue qu'elle m'avait manqué mine de rien ]

Elle perçut l’amertume dans les paroles de son ami lorsqu’il évoqua le thème du professeur de Magie Noire et elle ne put qu’y adhérer. Bien qu’elle ne savait pas exactement ce qui s’était passé entre Alan et lui –elle considérait que si un jour le brun voulait lui en faire part, il le ferait et que sinon, chacun ayant le droit à son jardin secret, elle ne l’interrogerait pas là-dessus-, elle imaginait facilement que McAlric s’était gagné à la force du poignet le ressentiment de l’étudiant. Un type qui prononce le début du sortilège de Mort en cours devait être capable d’à peu près n’importe quoi. A vrai dire, elle préférait encore ne pas savoir exactement ce qu’il avait fait. Sachant qu’elle l’aurait encore en prof l’année suivante, elle préférait en savoir le moins possible sur ce type détestable, pas la peine de se déprimer avant l’heure. Pour l’instant, il fallait profiter des deux mois d’été qui approchaient de plus en plus et des possibilités d’activités multiples et agréables qu’ils amenaient. Alan amena d’ailleurs la conversation sur ce terrain en l’interrogeant sur ses projets de vacances. Elle retrouva alors le sourire et commença à lui raconter avec enthousiasme son planning pour les deux mois à venir.

-Merci pour tes paroles d’amitié, je ne les oublierais pas. Et ne t’inquiète pas pour McAlric et les autres crétins dans son genre, t’auras tout le temps de me montrer tes nouveaux talents à un autre moment. Et, te connaissant, je suis sûre que tu pourras t’en servir pour faire ce qui est juste. Mais maintenant passons à un thème moins glauque. J’ai effectivement l’intention de partir avec Parvati cet été.

Sa glace commençant doucement à fondre, elle en enfourna une grande bouchée avant que les trois parfums ne se mélangent trop, puis elle continua.

-Début juillet, elle part avec son mec deux semaines en Italie dans sa famille à lui mais ensuite on part une semaine juste toutes les deux à Paris ! T’imagines ?! La ville de la mode et de l’amour ! C’est juste trop trop génial ! J’ai tellement envie de visiter tous les endroits sur-romantiques : le pont des Arts, Notre-Dame, et puis bien sûr les trucs touristiques style la tour Eiffel ou le Louvre. Bref, je suis trop enthousiasmée ! Surtout qu’on est hébergées par un collègue de la mère de Parv’ donc on a même pas de loyer à payer et on a la bouffe faite. C’est terrible !

Elle sentit qu’elle commençait à s’exciter toute seule, donc elle tenta de se calmer en respirant profondément, mais l’idée du futur voyage l’en empêchait. Ça allait être tellement bien !

-Et puis après, en août, c’est plus tranquille je reste chez moi et toute la cousinade se pointe à la maison. Enfin, maintenant que je le dis, le terme « tranquille » est peut-être mal choisi, parce que quand on se réunit tous ça fait plutôt un joyeux bordel. Mais bon je m’ennuierais trop sans eux, même si parfois ils me fatiguent, en tant que fille unique avoir des enfants de mon âge dans la famille c’est cool. Cette année, les plus vieux viennent pas mais les plus jeunes et ceux qui ont mon âge viennent. Ceux avec qui je m’entends le mieux ce sont Eric et Jordan, ceux qui ont mon âge, ce sont deux jumeaux et à eux deux ils font à peu près autant de bordel que tous les autres réunis. Un peu comme les frères Weasley sauf qu’eux ils ne sont pas versés dans les farces mais dans le sport. Dès qu’ils arrivent, il faut qu’ils courent, qu’ils sautent, qu’ils nagent et j’en passe et des meilleures. Ce sont aussi les seuls à savoir que je suis une sorcière et je dois dire qu’ils sont atrocement jaloux de ne pas pouvoir faire du Quidditch. Bref, tu comprendras qu’avec douze Brown en plus à la maison (oui mon père a beaucoup de frères et sœurs), ça va être animé. Surtout que la famille a une majorité de mecs, on est que trois filles dont une qui est nettement plus âgée que moi donc qui sera pas là et une qui n'a encore que sept ans. Mais bref, j’arrête de te raconter ma life et j’écoute tes projets. Tu m’as dit que tu savais déjà quoi faire c’est ça ?

En effet, quand elle commençait à parler de sa famille, elle ne s’arrêtait plus. Elle avait beau ressentir un certain choc culturel avec ses cousins qui étaient tous moldus pure souche, elle les adorait et malgré ses plaintes, elle serait incapable de passer un été sans les voir, tout particulièrement Eric et Jordan -ce n'était pas pour rien qu'elle avait fini par leur faire part de son statut de sorcière. Ainsi, vu qu’elle avait déjà une tendance plus que développée pour la parlotte, quand elle se lançait sur le sujet famille, elle était intarissable. Elle se concentra donc sur sa glace, en attendant la réponse d’Alan. Elle avala une bouchée mi-fraise, mi-framboise et se retint de pousser un soupir d’extase : définitivement les glaces de Fortarôme étaient les meilleures de Londres !

Lavande notait consciencieusement les informations fournies par son ami dans un coin de sa tête : les Parisiens étaient des chics types mais il fallait faire attention à leur manière de conduire, surtout sur le rond-point de la place de l’Etoile … Hein ? … mais … s’il savait tout cela, ça voulait forcément dire qu’Alan était déjà allé à Paris ! Le veinard ! Il avait beau dire qu’il avait flippé sur la moto de son ami d’enfance, Lavande l’enviait d’avoir déjà foulé le sol de la capitale française. Paris c’était sa Mecque à elle, THE lieu to be. Bon Milan n’était pas loin derrière dans sa liste des endroits à visiter avant d’avoir vingt ans (oui elle avait une liste de choses à faire avant d’entrer dans la troisième dizaine, tout à fait m’sieurs-dames ! ) mais rien n’égalait l’aura de romantisme et de nouvelles tendances qu’avait Paris dans l’esprit de notre cruche nationale. De plus, maintenant que Milan et l’Italie étaient associés à Sergio le bellâtre, ils avaient perdu un peu de leur superbe aux yeux de Cruchinette. Par contre, elle était intimement convaincue qu’à Paris elle trouverait des hommes à tomber parterre qui craqueraient tous pour son adorable accent anglais et son joli minois et qui se bousculeraient pour l’emmener dîner aux chandelles dans une péniche sur la Seine ou dans un restaurant avec vue sur Notre-Dame. Bon, évidemment vu qu’elle partait avec Parvati, elle n’avait nullement l’occasion d’abandonner son amie désormais casée et de partir avec un bel éphèbe parisien, mais elle ne se priverait nullement pour prendre des numéros de téléphone, voire qui sait peut-être même passer une nuit torride avec un beau Français si Parv’ le lui permettait.

Elle se perdit dans ses fantasmes jusqu'à ce qu'Alan commence à lui raconter son planning de vacances. Deux semaines de boulot pour se faire un peu d’argent de poche en août, rien de bien folichon surtout qu’elle n’était pas une grande férue d’informatique, mais c'était un bon moyen de gagner de l’argent pour se payer son voyage de juillet. Car bon sang, ça avait l’air génial comme projet ! Un mois de road-trip à travers la campagne écossaise en solo, pour un mec ça devait être le pied. Personnellement, elle finirait par s’ennuyer toute seule, mais Alan avait l’air d’y trouver son compte donc elle ne put que se réjouir pour lui.

-Mais c’est trop cool comme projet ! Faut trop que tu m’envoies une carte postale ! Moi je t’en enverrais une de Paris c’est promis. D’ailleurs, tu fais bien de le préciser j’ai pas ton numéro portable ni ton adresse postale. Parce que finalement entre le fait que sur le campus on se voie tout le temps et que durant l’année, on fonctionne via hibou, on oublie trop souvent que les vacs c’est le retour au monde moldu. Et perso j’ai pas de hibou donc pour écrire aux gens sans connaître leur adresse c’est le bordel, si tu me passes l’expression.

Elle sortit donc un bout de parchemin et sa plume de son sac et y griffonna son adresse ainsi que son numéro de portable. En effet, les ondes électromagnétiques étant brouillées dans le monde sorcier, elle n’avait pas pris son portable avec elle ce jour-là. Elle tendit ensuite le parchemin à Alan ainsi qu’un autre vierge.

-Voilà, comme ça on n’aura aucune excuse pour ne pas s’écrire. Remplis celui qui est vierge avec tes coordonnées et je le garde.

Puis, tandis qu’Alan écrivait son adresse et son numéro de téléphone, elle changea de sujet.

-Et sinon, je suppose que tu vas venir à la soirée de commémoration ? Perso, Kael m’a convaincue de venir et j’ai fini par décider Parv’ –qui bien évidemment invite Sergio, mais bon qu’est-ce que j’y peux ? Ils ont l’air bien partis pour se marier alors bon j'fais avec- donc ce serait cool si on y allait tous les quatre. Tout d’abord tu rencontrerais enfin Parv’ dont je te parle tout le temps et elle te rencontrerait après m’entendre constamment parler de toi –d’ailleurs, elle m’a demandé si je ne craquais pas un peu pour toi, mais je lui ai bien dit qu’entre nous c’était purement amical, dit-elle avec un clin d'oeil- et puis j’aurais moins l’impression de tenir la chandelle entre eux comme ça.

Elle lui fit alors un regard implorant de chiot éploré pour le gagner à sa cause. Il fallait vraiment qu’il vienne, ils passeraient un bon moment tous les quatre, elle en était sûre. Cependant, elle savait aussi qu’Alan risquait de ne pas être très chaud avec tous les souvenirs douloureux que la bataille impliquait pour lui. Mais, comme elle l’avait découvert en parlant avec Kael, cette soirée était justement le moyen de tirer définitivement un trait sur le passé et de continuer à avancer en se créant de nouveaux souvenirs, sans pour autant oublier les anciens, mais en partant d’eux pour continuer à progresser.

Comme prévu Alan opposa une certaine résistance à l’idée de se rendre à la commémoration, mais Lavande sortit le grand jeu et lui fit le regard de la mort qui tue, celui du chiot battu qui vous regarde avec des yeux mouillés en poussant un cri déchirant voulant dire « Vraiment, tu vas me laisser tout seul ici alors que je suis dans un état aussi piteux ? Non, tu as plus de cœur que ça n’est-ce pas ? ». Et bien entendu, son ami fut incapable de résister à ses charmes et céda à contrecœur, en précisant bien qu’il n’acceptait que dans l’unique but de lui faire plaisir. Elle ne put retenir un cri de victoire :

-Yes ! Trop cool, tu gères, merci vraiment ! L’idée de me coltiner le couple toute seule ne me disait rien qui vaille. T’es vraiment un ami sur qui on peut compter.

Elle lui adressa alors un sourire rayonnant et se leva même de sa chaise pour déposer un baiser tout ce qu’il y a de plus amical sur la joue du garçon. Une vieille femme qui passait devant la terrasse eut un sourire nostalgique en observant la scène et l’étudiante lui adressa un nouveau rayonnant, auquel la dame répondit prestement par un sourire de son propre cru qui fit ressortir les rides entourant ses yeux. Néanmoins, le garçon était perdu dans ses propres pensées et non seulement ne se rendit pas compte de ce qu'il s'était passé mais en plus tordit la pauvre cuillère innocente qu’il tenait dans sa main, preuve de sa rage contenue. Lavande fut surprise par cette réaction. Quelle était la raison d’une telle colère ? Elle savait que le sujet de la commémoration ramenait des souvenirs douloureux pour son ami, en particulier concernant ses anciens amis, mais jusqu’à maintenant il avait plutôt été triste et honteux de son comportement qu’énervé. Elle n’eut cependant pas l’occasion de découvrir la raison de ce brusque changement d’attitude car Alan se reprit bien vite et prit la chose avec humour. Elle renchérit donc dans la légèreté, bien décidée à ne pas retomber dans les sujets graves.

-Mais non tu n’es pas un abruti, c’est juste que même si t’as pas vraiment eu l’air de remarquer, inconsciemment ton corps a réagi à sa manière au fait qu’une bombasse telle que moi t’ait embrassé, même si ce n’est que sur la joue.

Elle lui tira la langue en signe d’autodérision et il enchaîna en lui précisant comment être certaine de réussir à le joindre pendant les vacances. Elle nota donc consciencieusement où trouver la chouette de son ami selon les différentes périodes. Puis, le garçon évoqua à nouveau un sujet plus sérieux en parlant du prof de Magie Noire. Lavande n’apprécia pas trop le changement de sujet puisqu’elle n’avait plus aucune envie de se prendre la tête si près des vacances, elle conclut donc rapidement sur le sujet.

-Ne t’inquiètes pas pour moi, même sans tes conseils, je ne peux que me méfier d’un type qui la première fois que je le rencontre est sur le point de m’assassiner pour le bien de la « pédagogie ».

Elle mima bien les guillemets avec ses mains pour bien insister sur ce qu’elle pensait réellement de la fameuse pédagogie de l’enseignant en question. Elle jeta ensuite un coup d’œil à sa montre et constata que, comme d’habitude lorsqu’elle traînait avec Alan, le temps avait filé sans qu’elle ne s’en rende compte. Or elle avait encore quelques choses à faire dans l’après-midi avant de rentrer au campus, elle prit donc congé du brun.

-Bon c’est pas tout ça, j’ai adoré te rencontrer comme ça par hasard et merci infiniment pour ce petit délice glacé, mais faut que j’y aille j’ai deux trois trucs à régler avec l’administration de la fac concernant mon choix de section pour l’année prochaine et si j’y vais pas aujourd’hui, faudra que j’attende la semaine prochaine et je préfère m’en débarrasser au plus vite. Au fait, j’te le précise, je passe en Médicosoins, j’espère que toi aussi, mais même si tu vas en Magibiologie, t’inquiètes pas on continueras à se voir. Tu me diras tout ça demain en cours de Vawdrey.

Elle lui fit ensuite la bise puis transplana devant le bureau des inscriptions universitaires. Une nouvelle rencontre avec la vieille bique de ce service ne lui faisait pas particulièrement plaisir, mais bon il y avait des choses qui n’attendaient pas en ce bas monde.