Cela faisait un moment qu’elle n’avait pas été se promener en dehors du château. Ou même longtemps qu’elle n’avait pas été se promener même à l’intérieur du château. En fait, depuis quelques semaines déjà, Lexy restait la plupart du temps enfermée dans sa salle commune. Elle en avait vraiment marre de croiser des têtes d’imbéciles … Du coup, elle ne sortait quasiment jamais, sauf pour aller en cours. Ses « amies » de Serpentard avaient bien tenté de la forcer à aller dehors, mais elle les avait tout simplement renvoyés balader. Qu’est-ce qu’elles étaient lourdes, parfois, ces bécasses !

Et pourtant, ce jour-là précisément, Lexy en avait plus que marre de rester enfermer dans les salles de cours, dans la salle de bain ou dans la salle commune … Il fallait qu’elle respire un bon bol d’air, et si possible autre part que pendant les cours qui se déroulaient à l’extérieur … Mais, détestant être seule, elle n’avait pas envie d’aller dehors et de passer pour une idiote, à se promener seule comme une pauvre petite fille sans amis. C’était peut-être ce qu’elle était, finalement … Si on excluait quelques élèves de sa maison, elle n’avait pas d’ami ici, ou du moins aucun véritable ami. C’était peut-être de sa faute, à force de se conduire comme une teigne avec tout le monde, personne ne voulait lui parler …

Au fond, cela blessait profondément la fillette. Elle aurait voulu être aimée et appréciée à Poudlard. Elle aurait voulu que tout le monde ait peur d’elle, et la respecte. Être populaire, autrement dit … Seulement, le rôle de petite garce qui renvoie balader chacun qui s’approche d’elle et qui insulte tous ceux n’étant pas dans sa maison, c’était loin d’être les personnes les plus appréciées dans l’école. Et pourtant, Lexy n’y pouvait rien, c’était sa nature, après tout ! N’empêche qu’elle avait fini par se mettre tout le monde à dos …

Il fallait vraiment être nouille, aussi ! Passer son temps à rabaisser les autres, à se moquer d’eux et, quand elle montrait un minimum de gentillesse avec quelqu’un, elle se servait de lui et le manipulait comme un jouet. Comment voulez-vous que les gens ne la détestent pas, après ça ? C’était elle-même qui s’était mise dans ce pétrin, en voulant jouer la Serpentard dure et sans cœur que rien n’atteint, alors que c’était faux.

S’excuser n’était cependant pas envisageable, à son avis. Elle avait bien trop de fierté pour s’abaisser à cela. Si seulement elle aurait comprit que demander pardon n’était pas une preuve de faiblesse … Si seulement elle avait été moins hargneuse et teigneuse, elle aurait de véritables amis maintenant, et ne se retrouverait pas dans le parc, seule comme une enfant abandonnée de tous …

La demoiselle s’installa devant le lac, pieds et bras croisés. Ce genre d’attitude qui montrait qu’elle n’était pas très sociable. Elle aurait eut quarante ans, on l’aurait considérée comme aigrie. Il fallait réellement qu’elle fasse des efforts, si elle ne voulait pas finir comme ça … Et, pour le moment, elle donnait l’impression d’une gamine complètement isolée.

« Qu’est-ce que c’est nul de passer pour la pouffe de service ... » marmonna-t-elle entre ses dents.

Mais n’allez pas croire pour autant que Lexy allait soudain devenir une de ces fifilles niaises et très gentilles, quand même ! Elle resterait toujours la petite peste qu’elle était, ne changerait pas comme ça … Cependant, il faudrait qu’elle fasse de sérieux efforts si elle ne voulait pas être délaissée par tout le monde. Cela faisait un an et quelques mois qu’elle était arrivée, et beaucoup ne la supportaient déjà plus …

Profitant d’une période libre, et repoussant d’une heure la rédaction d’un devoir, Gauvain était parti respirer l’air du parc, pas loin du lac, histoire de s’oxygéner avant d’entamer courageusement les 30 centimètres demandés par le professeur Binns afin de compléter sa biographie. Pourtant, elle lui semblait pas mal sa bio, et il n’avait rien trouvé d’autre à la bibliothèque. Compléter allait s’avérer ardu… ou pas.

Il se promenait seul, la tête dans ses pensées, laissant son esprit vagabonder d’un sujet à l’autre sans lien logique (avec apparition régulière d’une tête blonde), et profitant de la caresse d’un soleil qui parvenait à peine à procurer un peu de chaleur.

Au détour d’un bosquet, il aperçut Lexy Jenkens, une Serpy de 2ème année. Il ne la connaissait pas personnellement mais à ce qu’il avait entendu dire, elle avait une sale réputation, ne côtoyant que des élèves de sa maison (et encore) et ignorant superbement tous les autres, qui ne devaient paraître que quantité insignifiante pour elle.

Il y a quelques semaines, un pauvre Poufsouffle de première année avait « osé » la bousculer accidentellement dans un couloir, et elle en avait une montagne, n’écoutant même pas les excuses du garçon afin de profiter de l’occasion pour se défouler et le rabaisser plus bas que terre sous un monceau d’insultes toutes plus imagées que les précédentes ; son répertoire était large !

Gauvain comptait donc faire comme si de rien était et continuer son chemin, quand il se rendit compte du coin de l’œil que la jeune fille avait vraiment une tête de papier maché, comme si sa maison avait perdu un match de quidditch. Bon, c’était le cas en fait, mais de l’eau avait déjà coulé sous les ponts, et même les plus ardents supporters de ce sport avaient tourné la page. (McHenry)

Il hésita quelques secondes entre son intention première et un élan de gentillesse inspiré par un sentiment de compassion. Finalement, qu’est-ce qui pouvait arriver ? Au pire il se ferait agonir d’injures, et ça n’allait pas le tuer ; de plus le parc était désert, il n’y aurait donc pas de témoins si la jeune fille réagissait comme à son habitude, ce qui pouvait également lui faciliter la tâche si elle éprouvait le besoin de se confier au premier venu.

- Heu.. salut. Ca a pas l’air d’aller… heu… t’as perdu quelque chose ?

Pourquoi, oh mais pourquoi les parents de Lexy avaient-ils habituée celle-ci à se prendre pour le centre du Monde ? La famille de la jeune sorcière se sentait au-dessus des autres. Les Jenkens étaient appréciés et reconnus dans le monde des sorciers, et, bien malheureusement, la fillette aimait cette sorte de célébrité, cette façon de diriger et commander. Elle avait voulu être la petite chef à Poudlard et, manque de chance pour elle, cela n’avait pas marché …

Bah oui, il faut croire que les élèves n’étaient pas forcément aussi faciles à manipuler qu’elle l’avait pensé au début. Car, étant douée pour le mensonge, elle aurait pensé se mettre tout le monde dans la poche sans problème. Mais, soit elle s’y était mal prise, ce qui était peu probable car, selon elle, elle ne ratait jamais ce qu’elle entreprenait ; soit les élèves avaient décelé le fait qu’elle voulait les avoir.

En tous cas, elle se retrouvait seule. Ou quasiment seule. Il y avait toujours quelques dindes et quelques crétins de sa maison. Merveilleux, n’est-ce pas ? C’est fou ce que ses « amis » pouvaient se montrer stupides par moments, à ricaner bêtement et pouffer à chaque fois qu’elle se moquait de quelqu’un. Ce qu’elle voulait, elle, c’était des amis un minimum intelligents et capables de l’aider pour manipuler tous les autres. Mais elle ne disposait que de quelques imbéciles …

Le jeune Serdaigle confirma que les amitiés étaient plus difficiles à trouver qu’une baguette magique, un bouton ou encore un livre et qu’il était quasiment impossible de changer ce qui avait été fait, qu’on pouvait simplement essayer de recoller les morceaux, à défaut de remonter dans le temps. C’était certain maintenant, il avait eu vent de la méchanceté de Lexy ; mais était décidé à ne pas la juger sur ce qu’il avait entendu, apparemment.

Le gamin alla s’asseoir sur un tronc d’arbre, et fit signe à la demoiselle de le rejoindre. Celle-ci hésita un instant, et, ne se laissant pas démonter, le Serdaigle continua à parler, disant qu’il n’était pas doué pour parler mais qu’il savait cependant écouter, et qu’elle pouvait lui parler de ce qui la tracassait. Une nouvelle fois, la fillette hésita.

Bien entendu, elle aurait pu réagir comme à son habitude, et lui répondre qu’elle n’avait pas besoin de lui, et qu’elle n’avait pas besoin de parler ! Ce qui aurait été un mensonge. Elle n’avait pas besoin de lui, mais venait de comprendre qu’elle avait besoin de parler, alors à quoi bon jouer la méchante à chaque fois ? Ce serait stupide … Mettant son mauvais caractère de côté, une fois n’est pas coutume, elle alla s’asseoir à ses côtés.

« J’ai été tellement peste avec les autres que même ceux qui ne me connaissaient pas me regardent comme si j’étais la pire des garces. » expliqua-t-elle, sans ciller et sans montrer d'émotion quelconque. « Ou alors, ils m’évitent. Comme toi tout à l’heure. »

C’était vrai qu’à la fin, même pour quelqu’un comme elle, il était agaçant de voir que quasiment tout le monde vous détestait, ou désirait vous éviter. Ce n’était peut-être pas la pire peste de l’école – ou alors, pas la peste la plus connue de Poudlard, d’autres étaient bien plus populaires, que ce soit dans le bon ou le mauvais sens – mais très peu de gens la supportaient. Et elle en avait marre.

« J’ai été tellement peste avec les autres que même ceux qui ne me connaissaient pas me regardent comme si j’étais la pire des garces. » « Ou alors, ils m’évitent. Comme toi tout à l’heure. »

Gauvain se gratta les cheveux, signe de gêne. C’est vrai qu’il n’avait pas été très sympa en essayant d’éviter la Serpy alors qu’il ne lui avait même pas adressé la parole une seule fois auparavant. Comme quoi les ragots et les réputations, il fallait toujours s’en méfier, ou en tout cas se faire sa propre idée avant de s’approprier celles des autres. Il tourna sept fois la langue dans sa bouche avant de répondre,

- Ouais, j’avoue que c’était pas très sympa, j’en suis désolé. Faut pas juger les gens sans les connaitre. Je te propose de repartir sur d autres bases !

Se levant d’un bond du tronc pour se planter devant Lexy, qui sursauta légèrement en se demandant visiblement ce que le Serdaigle voulait faire, Gauvain lui tendit la main et se présenta, un large sourire spontané aux lèvres. Attrapant la main de la jeune fille clairement sur la défensive, il la secoua délicatement en disant,

- Bonjour, je m’appelle Gauvain Gammach, enchanté de te rencontrer !

Il se rassit ensuite à côté de Lexy et continua la réflexion entamée précédemment tout haut,

- On ne change peut-être pas le passé, mais on peut souvent réparer ce qui est cassé, même si c’est parfois pas facile. Et dans tous les cas, l’avenir est ce qu’on veut en faire. Ya des gens qui ne te connaissent pas, pourquoi tu ne t’en ferais pas sincèrement aimer ?

Visiblement, le jeune garçon était gêné par les dernières paroles prononcées par la demoiselle. Cela la fit sourire narquoisement, mais elle tenta de le cacher, chose qu’elle n’aurait pas faite habituellement. Mais elle préféra se concentrer sur ce qu’il lui disait, c’est-à-dire des excuses pour avoir tout d’abord tenté de l’éviter et qu’il proposait de repartir de bon pied.

Repartir de bon pied pourquoi, exactement ? Après tout, étaient-ils vraiment partis de mauvais pied ? D’accord, il l’avait évitée au départ, mais c’était tout. Il était venu lui parler et, contrairement à d’habitude, elle n’avait nullement été agressive. Aucune raison de repartir de bon pied, puisque rien de mauvais n’avait été commis. Le regardant droit dans les yeux, la fillette déclara :

« Pourquoi ? On est partis de mauvais pied ? »

Cela aurait pu certes paraître agressif, et elle ne l’avait pas vraiment voulu. Mais aussi, allez-vous débarrasser en quelques minutes de toutes les mauvaises manies qui faisaient votre caractère ! Ce n’était pas facile. Surtout qu’elle n’avait pas réellement envie de changer, mais seulement de s’améliorer ne serait-ce qu’un petit peu. Alors quand le Serdaigle lui serra la main en disant qu’il s’appelait Gauvain Gammach et qu’il était enchanté de la rencontrer, la demoiselle ne put s’empêcher de sourire.

« Lexy Jenkens, Serpentard de deuxième année. » répondit-elle d’un ton quelque peu solennel.

Cependant, elle ne lui avait pas renvoyé le « enchantée de te rencontrer », puisque ce n’était pas franchement le cas. OK, il n’était pas méchant et, bien qu’il soit d’une maison différente de la sienne, elle ne voyait pas pourquoi ils ne pourraient pas s’entendre. Seulement, elle ne connaissait strictement rien de lui, mis à part son nom et sa maison.

Le jeune homme se mit à philosopher en disant qu’on ne pouvait pas changer le passé mais réparer quelques erreurs mais si cela était peu facile et qu’elle pouvait toujours se lier avec les gens qu’elle ne connaissait pas, qui pourraient devenir ses amis.

« Comme toi par exemple ? » railla-t-elle avec un sourire narquois.

Mais qu’elle était bête ! Il était gentil avec elle et voulait l’aider, n’ayant pas de préjugés sur ce qu’il avait entendu à son sujet, et elle ne trouvait rien de mieux que d’être méchante, comme toujours. Il fallait qu’elle se rattrape, du moins cette fois.

« Pardon, tu as raison. »